Autogestion : Si vous embauchez des adultes, pourquoi les traiter comme des ados ?

Publié le 23/03/2018 à 10:08

Autogestion : Si vous embauchez des adultes, pourquoi les traiter comme des ados ?

Publié le 23/03/2018 à 10:08

Finis les titres, les structures hiérarchiques, les ordres donnés par des patrons à des subalternes. Des entreprises balancent tout cela par-dessus bord pour adopter un fonctionnement fondé sur la confiance envers les individus et la capacité de chacun à s’autogérer.

Pour Guy Doucet, fondateur d’Alfred l’expert en vin, opter pour une structure d’entreprise libérée est une question de survie. « Ça permet de mieux répartir les efforts dans l’entreprise. Nous sommes passés de 450 à 27 000 clients en 11 mois. Nous aurions eu de la difficulté à gérer une telle croissance avec une structure pyramidale traditionnelle. Mais surtout, je suis convaincu que pour garder ses bons collaborateurs, il faut leur donner de la latitude et leur offrir un environnement où ils peuvent grandir. »

L’homme d’affaires était conférencier au Sommet transformation du travail, présenté par les Événements Les Affaires le 20 mars dernier. Sa PME de 24 employés, qui offre une application de sommelier virtuel et de gestion de cave à vin, fonctionne maintenant en holacratie, un mode d’organisation et de gestion basé sur l’intelligence collective.

« L’idée, c’est de prendre ensemble les meilleures décisions possibles et de réaliser les meilleurs livrables possibles », a résumé Guy Doucet. Dans sa PME, il n’y a plus de titres ni de hiérarchie. Les gens ont plutôt des rôles reliés à leurs talents. Et chacun en a plusieurs, car l’entreprise en compte en tout 178.

Au lieu de départements, elle est aussi structurée en cinq cercles interdépendants et autogérés. Outre un cercle général, les autres sont dédiés à générer la croissance des revenus et des bénéfices, à livrer l’expérience aux membres, à développer le savoir et les outils, ainsi qu’à gérer l’environnement de production.

« C’est un peu comme jouer au hockey dans une ligue de garage, a comparé M. Doucet. On n’a pas besoin d’avoir un arbitre, car tout le monde s’autodiscipline. »  

« Plutôt que de donner ou de recevoir des ordres, les gens se centrent sur la raison d’être de l’entreprise », a souligné pour sa part Michel Bundock, leader du Groupement des chefs d’entreprise du Québec, dont l’organisation est elle aussi passé au système holacratique. Celui qui était auparavant PDG combine désormais 33 rôles, dont ceux de leader, d’ambassadeur et d’architecte.

La clarté des rôles de chacun, l’agilité décisionnelle, la transparence des communications et la prise d’initiatives figurent parmi les bénéfices de ce concept, selon les conférenciers.

Rémunération globale

Toutes de bonnes personnes

Pour Cendrine Cartegnie, cofondatrice de Synertek Industries, une PME spécialisée dans la transformation du métal en feuilles, les êtres humains sont foncièrement bons, de bonne foi et ils ont un potentiel immense. « Pourquoi mettre en place des règles et des systèmes pour gérer la minorité de gens dysfonctionnels ? », a lancé celle dont l’entreprise fonctionne aussi en holacratie et qui était dans son rôle de rayonnement lors de sa participation au Sommet.

Les changements, même bénéfiques pour les employés, peuvent toutefois entraîner des résistances. « Entre une situation connue, mais douloureuse, et une situation inconnue, le cerveau va toujours préférer la première », a-t-elle fait remarquer en donnant l’exemple du signal sonore marquant le début et la fin des pauses en usine.

« Dans le milieu manufacturier, c’est un standard. Mais pour être cohérents avec nos valeurs, nous avons éliminé la cloche pour donner aux employés la liberté de prendre leurs pauses quand ils le voulaient. Mais le lundi suivant, un employé, en accord avec ses collègues, avait acheté un klaxon pour rétablir le rituel ! Maintenant, il ne l’utilise plus, mais 90 % des gens continuent cependant de prendre leurs pauses à 10 heures et à 15 heures pile. »

Pour terminer, Cendrine Cartegnie a partagé sa vision du leadership. « Au lieu d’être un dirigeant, il faut se voir comme un accompagnateur. Quelqu’un qui révèle le potentiel des gens, qui génère du sens et qui est le gardien de la cohérence entre les valeurs et les actions. »