Un autre stratège réagit à la remontée des taux

Publié le 08/07/2017 à 15:41

Un autre stratège réagit à la remontée des taux

Publié le 08/07/2017 à 15:41

(Photo: 123rf.com)

Il n’y a pas de doute que les bonnes données économiques donnent des munitions aux banques centrales pour devenir moins accommodantes.

Si la croissance mondiale plaît, la remontée des taux, tant les taux à un jour des banques centrales que les taux de 10 ans, suscite un peu d’anxiété et surtout incite les investisseurs actifs à se déplacer fébrilement d’un secteur à l’autre.

Les différents indices bancaires américains, par exemple (XLF, KRE, KBE), ont grimpé de 9% depuis le 1er juin. Des taux plus élevés devraient en principe gonfler leurs marges, au moment où les autorités leur permettent de relever leurs dividendes et de racheter leurs actions.

Les taux américains de dix ans, qui servent de repères au monde entier, ont grimpé de 21 points de base à 2,39% depuis un mois.

Ce taux phare demeure en deça du sommet de 3,02% qu’il avait atteint en 2013, mais sa hausse d’un pour cent en 12 mois attire l’attention à nouveau, au moment où la Fed voit l’appréciation des actifs financiers d’un moins bon œil.

Pour l’instant, les écarts de crédit dans le marché des obligations de sociétés ne montrent aucun signe de stress financier et les bénéfices des entreprises sont au rendez-vous.

C’est ce qui permet d’ailleurs aux Bourses de si bien résister à la hausse des taux jusqu’ici.

«Les investisseurs actifs se demandent où mettre leur capital. Achètent-ils les titres et les secteurs vedettes pendant leur repli malgré leur évaluation élevée ou cueillent-ils des titres pétroliers déprimés en pleine crise de confiance. Dans le doute, l’inaction leur semble plus sécuritaire», évoque Martin Roberge, de Canaccord Genuity.

D’ailleurs Michael Hartnett, stratège en chef de Bank or America Merrill Lynch, surveille de près les écarts de crédit et les profits, en prévision de marchés beaucoup plus tumultueux cet automne.

Rattrapage canadien ou non?

À Toronto, l’indice S&P/TSX ne participe pas à la fête même si son économie est la meilleure du G7.

Nombreux sont les stratèges qui misent sur un rattrapage de l’indice torontois au deuxième semestre, parce que l’économie interne se porte mieux que prévu alors que l’inflation immobilière suscite moins d’angoisse qu’avant.

Les Banque Scotia, CIBC, BMO, Nationale et Laurentienne ont tous prédit une embellie de la Bourse canadienne d’ici à la fin de l’année, dans leurs plus récents bulletins de stratégie publiés en juillet.

M. Roberge fait bande à part.

Si le stratège quantitatif s’attend à ce que les ressources performent beaucoup mieux, de concert avec l’accélération mondiale, le S&P/TSX pâtira de la moins bonne performance de tous les autres secteurs (71% de l’indice).

Le S&P/TSX est tombé sous la barrière psychologique de 15000 points cette semaine. Ses onze industries ont décliné.

Techniquement, le prochain point d’appui est la moyenne mobile de 200 jours de 14400.

«Ce n’est pas surprenant étant donné la récente rhétorique moins accommodante des banques centrales les plus en vue. Les secteurs sensibles à la hausse des taux ont joint le mouvement de repli cette semaine», explique-t-il.

Les taux canadiens de 10 ans de 1,88% sont les plus élevés depuis juin 2015.

La dernière fois que la Fed et la Banque centrale chinoise ont retiré leurs liquidités en même temps, en 2006, le S&P 500 a perdu 12,7% et le S&P/TSX 7,7%, rappelle M. Roberge.

«Un mouvement de repli est un risque d’où notre répartition tactique prudente en actions à court terme», écrit-il. Le portefeuille modèle a 56% d’actions par rapport à une répartition neutre de 60%. 

L’encaisse est aussi de 10% au lieu de l’habituelle 5%.

La Bourse canadienne est bipolaire

Le bond d’encore un pourcent du huard à 0,77$US cette semaine est défavorable aux producteurs de ressources à court terme. Ils reçoivent moins de revenus canadiens pour chaque dollar de vente puisque les cours des matières premières sont exprimées en dollars américains.

Toutefois, la bonne tenue de l’économie mondiale et la valeur d’aubaine des titres des producteurs de métaux devraient raviver la performance relative des ressources.

«Si le premier élan des ressources de 2016 est venu de la dépréciation du dollar américain, le deuxième proviendra d’une demande accrue pour les matières premières et éventuellement d’un retour des attentes inflationnistes», avance-t-il.

Par contre, les secteurs canadiens les plus aimés (épiciers, détaillants, fournisseurs de télécommunications, exploitants de pipelines, etc) ont rarement été aussi chèrement évalués et endettés, ce qui les rend vulnérables à une contraction de leur multiple d’évaluation, lorsque les taux remontent.

Quant au secteur influent des banques, M. Roberge suggère de profiter du rebond en juin des titres bancaires pour encaisser des profits.

Il est neutre envers les banques américaines et canadiennes.

La croissance des bénéfices des premières se modérera à mesure que l’écart entre les taux à court et à long terme se rétrécira, plus tard cette année, au sud de la frontière.

Les banques canadiennes souffriront éventuellement de la désinflation du prix des maison qui ralentira les prêts et la progression de leurs profits.

Profiter du huard pour diversifier à l’étranger

M. Roberge recommande à ses clients qu’ils profitent de l’appréciation du huard pour acheter dans les pays développés d’Europe et d’Asie et dans les marchés émergents leurs placements hors du secteur des ressources.

«Les actions non nord-américaines offrent le meilleur rapport risque-rendement», dit-il.

Les exceptions. M. Roberge aime les chemins de fer et les fournisseurs aérospatiaux ainsi que les fournisseurs de machinerie et les transporteurs aériens nord-américains, dans le secteur industriel, ainsi que les fabricants canadiens de pièces d’autos, dans celui de la consommation discrétionnaire.

La répartition idéale pour un investisseur local est d’avoir 30% de son portefeuille d’actions au Canada et 70% à l’étranger. Cette répartition optimise le rendement sans en augmenter la volatilité, fait valoir le stratège.

À propos de ce blogue

La Sentinelle de la Bourse se veut un blogue pour les investisseurs qui s¹intéressent aux rouages de la Bourse et aux marchés financiers. Son objectif : surveiller et débusquer des repères financiers pertinents pour prendre le pouls des Bourses et ainsi mieux aiguiller les décisions de placement de l¹investisseur.

Dominique Beauchamp
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