Trump ravive l'appétit du risque

Publié le 11/02/2017 à 11:39, mis à jour le 11/02/2017 à 16:32

Trump ravive l'appétit du risque

Publié le 11/02/2017 à 11:39, mis à jour le 11/02/2017 à 16:32

Ceux qui ont eu le réflexe d’acheter des actions après le pire début d’année de l’histoire l’an dernier ont eu la main heureuse.

Au moment où tous les indices touchent de nouveaux sommets, les rendements d’un an ont repris l’allure d’un «bull market».

Le S&P 500 a bondi de 24% depuis 12 mois, le Dow Jones, de 27%, le Nasdaq, de 34%, le S&P/TSX, de 27%.

Le 10 février 2016 marque le premier anniversaire de plusieurs creux qui ont préparé le terrain à la reprise, rappelle Michael Hartnett, stratège en chef de Bank of America Merrill Lynch, pour mettre les sommets actuels en contexte.

Il y a un an, le pétrole touchait un plancher de 26$US, le S&P 500 avait atteint un creux de 1810, les attentes inflationnistes étaient à leur plus bas, l’indice de volatilité avait grimpé à 30 et l’écart entre les rendements des obligations de sociétés et gouvernements s’était rendu jusqu’à 9,0%.

Les expressions «appât du gain» (animal spirits) et «goldilocks» (une économie assez solide pour nourrir les bénéfices, mais pas trop forte pour faire grimper l’inflation et les taux d’intérêt) font un retour dans les déclarations et les écrits de stratèges et de gourous financiers.

Le stratège mondial de Deutsche Bank écrit même que l’effet Trump n’a pas encore vraiment commencé, dans une note publiée le 9 février.

À son avis, les gains depuis novembre reflètent surtout de la fin du suspense entourant toutes les élections et incorporent bien peu encore les politiques de relance telles que la baisse des impôts et les dépenses en infrastructures.

Son cours-cible de 2600 pour le S&P 500 est le plus élevé des 18 stratèges sondés par Bloomberg. Il est porteur d’un gain d’encore 12%.

Les gazouillis présidentiels redeviennent du spectacle

Les gazouillis de Donald Trump semblent aussi perdre de leur impact.

Une série d’analyses a démontré que leur effet est au mieux éphémère sur les entreprises ciblées.

Le président lui-même a conseillé à ceux qui réagissent à ses déclarations de ne pas s’inquiéter de ses paroles ou du ton dur de ses conversations avec les chefs d’état, reconnaissant tacitement que Twitter lui sert de déversoir pour des commentaires impulsifs.

Sur le terrain, ses prises de position perdent un peu de leur mordant. Le président a cette semaine exprimé son respect pour la politique «Une seule Chine», après une conversation téléphonique avec son président Xi Jinping.

L'Organisation du traité de l'Atlantique nord (OTAN) est aussi revenu dans ses grâces, le président mettant surtout l’accent sur un meilleur partage de ses coûts.

Au lieu d’abroger Obamacare (la Loi sur la protection des patients et les soins abordables), les Républicains parlent plutôt de l’améliorer.

Donald Trump a également fait volte-face cette semaine concernant Israël déclarant au quotidien Israel Hayom que l'expansion des colonies n’est pas «bonne pour la paix». 

Cet apaisement bien relatif incite pour l’instant les investisseurs de mettre de côté les aspects économiques les plus inquiétants de ses politiques nationalistes concernant l’immigration, la taxe à l’importation et le protectionnisme.

Sa promesse, le 9 février, du dévoilement prochain des détails d’une réforme «phénoménale» des impôts, a suffi à échauffer les esprits, surtout que c’est l’ex-pdg de la réputée banque d’affaires Goldman Sachs, Gary Cohn, qui s’en charge.

L’annonce que l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) respecte 90% de ses engagements de coupes de production, la révision à la hausse de la demande mondiale pour le pétrole par l’Agence internationale de l’énergie et le bond de 5% du cours du cuivre, le 10 février, ont aussi ranimé les «paris de croissance» (reflation trade).

Le départ inattendu du gendarme des banques Daniel Tarullo, dévoilé le 10 février, laisse trois postes vacants au conseil des gouverneurs de la Fed américaine laisse plus de champ libre à la nouvelle administration pour imposer la déréglementation du secteur financier très attendue par les banques.

La perspective de taux plus élevés réduit aussi l’attrait des obligations dont la valeur diminue lorsque les taux remontent et redirige les investisseurs vers les actions et les obligations de sociétés.

Cet «appétit du risque» s’étend aux marchés qui profitent en général le plus d’une économie mondiale qui s’accélère et du retour de l’inflation. 

Après un gain de 1,6% durant la semaine écoulée, le S&P/TSX a fracassé son sommet de septembre 2015, tandis que les marchés émergents se rapprochent de leur sommet de septembre, après s'être apprécié de 7,3% depuis le début de l’année.

Un autre 10% aux États-Unis

Se fiant à sept indicateurs tactiques, M. Hartnett répète que le mouvement haussier peut donner des gains d’encore 10%, avant de tirer sa révérence.

«L’optimisme est revenu, mais il n’atteint pas le niveau euphorique qui signale un danger», dit-il.

La mesure, qui indique que 76% des marchés de l’indice MCSI de tous les pays se négocient au-dessus de leur moyenne mobile de 200 jours, est la plus proche d’un niveau d’euphorie.

Le stratège reconnaît que ses indicateurs sont plus efficaces à détecter la peur lors des creux que l’avidité lors des sommets boursiers, mais pour l’instant aucun indicateur n’envoie de signal de vente, quatre sont au neutre et trois sont favorables à d’autres gains boursiers.

Un autre 4% pour le S&P/TSX

Bien qu’il faudra du temps avant que les politiques pro-croissance de Donald Trump deviennent réalité, Martin Roberge, de Canaccord Genuity, croit que les chances sont bonnes que le S&P/TSX atteigne éventuellement sa cible de 16300, pour un gain d’encore 4%.

Depuis les années 1990, tous les sommets cycliques sont survenus après que l’indice ait dépassé la barre de deux fois sa valeur comptable.

L’indice est encore sous ce seuil alors qu’il avait atteint 2,5 fois en 1998 et 2,7 fois en 2007.

Les achats d’actions canadiennes par les investisseurs étrangers depuis 12 mois représentent 1,4% la valeur de l’indice, alors que cette proportion dépasse 2% lors des sommets.

M. Roberge adopte une stratégie «ultra-cyclique» qui privilégie l’énergie, les matériaux, le secteur américain de la technologie, les titres industriels et les fonds immobiliers américains à capital fermé (FPI ou Reits).

À propos de ce blogue

La Sentinelle de la Bourse se veut un blogue pour les investisseurs qui s¹intéressent aux rouages de la Bourse et aux marchés financiers. Son objectif : surveiller et débusquer des repères financiers pertinents pour prendre le pouls des Bourses et ainsi mieux aiguiller les décisions de placement de l¹investisseur.

Dominique Beauchamp
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