La rhétorique de Trump annonce-t-elle un plongeon des actions?

Publié le 31/01/2017 à 18:50

La rhétorique de Trump annonce-t-elle un plongeon des actions?

Publié le 31/01/2017 à 18:50

Normalement à ce stade du cycle économique, les revenus des entreprises et la rémunération des travailleurs augmentent ce qui prolonge le mouvement haussier de la Bourse, même si les taux remontent. 

Or, la menace que font peser les mesures protectionnistes de Donald Trump sur l’économie et l’inflation mondiales, ainsi que les conditions qu’il pourrait imposer aux entreprises en échange d’une réforme des impôts, exigent de la circonspection.

Stéfane Marion, stratège de la Financière Banque Nationale, conserve donc la répartition élevée en encaisse de 10% qu’il avait établie avant le Brexit, en juin 2016.

Le record pour l’indice Morgan Stanley Capital tous les pays (MSCI AC) et l’évaluation de 16 fois les bénéfices de cet indice, la plus élevée depuis 2004, l’incitent aussi à la prudence, puisqu’elle dépend d’un rebond prévu des bénéfices.

L’autre motif de sa réserve tient au niveau remarquablement bas du baromètre de la peur, l’indice de la volatilité VIX qui suggère un peu trop d'insouciance de la part des investisseurs, à court terme.

Fondamentalement, les actions ont bien sûr l’avantage sur les obligations puisque les indicateurs économiques avancés mondiaux pointent encore vers une ré-accélération propice à la croissance des revenus des entreprises.

Les taux d’intérêt un peu partout dans le monde sont également encore accommodants, tandis que les écarts de rendements entre les obligations de sociétés et celles du Trésor américain ne s’élargissent pas. Ce sont deux autres facteurs favorables aux actions, rappelle M. Marion.

Le stratège mise aussi sur deux seuls tours de vis par la Fed en 2017.

Un dollar américain moins fort et un peu plus d’inflation sont aussi bénéfiques pour les revenus des entreprises et les cours des matières premières.

Comment éviter le plongeon de 19% de 2011?

M. Marion craint toutefois une répétition de 2011. Cette année-là, le président Obama avait prolongé diverses mesures de relance de l’administration Bush, incluantdes réductions d’impôts et la dépréciation accélérée des dépenses en capital, avaient gonflé les prévisions de profits.

Le S&P 500 s’était apprécié de 6,8% lors des quatre premiers mois de l’année, le S&P/TSX, de 6,4% rappelle M. Marion.

L’impasse politique concernant le plafond de la dette américaine, la décote des Etats-Unis par Standard & Poor’s ainsi que la crise de la dette des pays européens de la périphérie, avaient vite renversé la vapeur.

L’année 2011 s’est soldée par un gain de 2,5% pour le S&P 500 en dollars canadiens, mais pas sans une chute de 19% en cours de route.

Le S&P/TSX avait clos 2011 avec une perte de 11%.

«La seule façon d’éviter une répétition de 2011 est justement de s’assurer que les mesures de relance ne soient pas temporaires, cette fois. Ça passe par une réforme permanente des impôts des entreprises et des contribuables, l’allègement réel de la règlementation et le déblocage rapide de fonds pour les infrastructures», fait valoir M. Marion.

Le stratège a encore espoir que le pragmatisme libre-échangiste des Républicains prendra le dessus. Sinon, les mesures protectionnistes perturberont sérieusement la chaîne d’approvisionnement des entreprises américaines au moment où leur rentabilité reprend du mieux, après deux ans de stagnation.

Les prévisions de Thomson Reuters tablent sur une croissance de 4,1% des revenus des entreprises du S&P 500, au quatrième trimestre, une première depuis de nombreux trimestres.

«Cela pourrait même déclencher une vague de poursuites de la part des entreprises contre le gouvernement qui consumerait toutes les ressources de l’administration Trump et qui menacerait tout son agenda pro-croissance», évoque-t-il.

Les actions canadiennes sont chères et les attentes de bénéfices trop élevées

M. Marion apporte un seul autre changement tactique à sa stratégie: il redirige 2% de sa répartition en actions du Canada aux États-Unis.

Le S&P/TSX se négocie au multiple d’évaluation le plus élevé depuis 2001, soit 16,4 fois les profits prévus dans 12 mois.

De plus, les prévisions pour une hausse de 25% des bénéfices des entreprises de l’indice sont trop optimistes.

«Ces attentes seront difficiles à rencontrer. Depuis un mois, les analystes tempèrent déjà leurs prévisions pour sept des onze secteurs du S&P/TSX», dit-il.

Le Canada est aussi soumis aux humeurs des investisseurs étrangers qui pourraient être moins présents dans le marché cette année s’ils croient que les rendements éclatants de 2016 ne se répèteront pas.

Le huard joue aussi un rôle dans la légère préférence de M. Marion pour les actions américaines. Le dollar pourrait se déprécier d’encore 4,6% selon les cambistes de la Financière Banque Nationale, ce qui gonflerait d’autant les rendements réalisés aux États-Unis.

«Si ce n’était que du seul aspect cyclique de l’économie, nous aurions déjà redéployé nos liquidités dans les actions, mais le contexte géopolitique nous retient pour l’instant», conclut M. Marion.

Le stratège a établit une cible de 15600 pour le S&P/TSX à la fin de 2017, par rapport au niveau actuel de 15400.

Son cours cible de 2340 pour le S&P 500 américain laisse entrevoir un modeste gain de 2,6%.

Ses choix de secteurs au Canada ne changent pas. Sa préférence va au secteur bancaire et à celui de la technologie.

 

Voici sa plus récente répartition d’actif:

  • Actions canadiennes/18%
  • Actions américaines/23%
  • Actions EAEO*/5%
  • Actions des marchés émergents/5%

Obligations/39%

Encaisse/10%

*Europe, Australie, Extrême-Orient

 

 

 

 

 

À propos de ce blogue

La Sentinelle de la Bourse se veut un blogue pour les investisseurs qui s¹intéressent aux rouages de la Bourse et aux marchés financiers. Son objectif : surveiller et débusquer des repères financiers pertinents pour prendre le pouls des Bourses et ainsi mieux aiguiller les décisions de placement de l¹investisseur.

Dominique Beauchamp
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