Un secret qui peut valoir des centaines de milliers de dollars

Publié le 12/04/2019 à 18:01

Un secret qui peut valoir des centaines de milliers de dollars

Publié le 12/04/2019 à 18:01

BLOGUE INVITÉ. Dans l’industrie des services financiers, il existe un véhicule de placement qui, malheureusement pour les investisseurs, fait l’objet de critiques qui sont souvent non fondées. Je parle des fonds communs de placement constitués en société (FCPS). Ces fonds possèdent un avantage fiscal. Cependant, pour toutes sortes de raisons, leur promotion n’est pas à la hauteur de cet avantage. Est-ce normal ?

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On parle de « fonds corpo », « fonds catégorie », « fonds en société », « fonds corporate class » et autres. C’est la même chose. On parle de fonds communs de placement qui ne sont pas comme leurs cousins « ordinaires », en fiducie (FCPF). En fait, ils donnent sensiblement le même rendement brut que ces derniers mais ils bénéficient d’un traitement fiscal particulier.

Ce qui me frappe, c’est l’espèce de croyance, de la part de certains intervenants dans l’industrie des services financiers, que ces fonds n’apportent aucune valeur. Certains de ces intervenants sont des conseillers financiers qui n’ont pas accès à ces véhicules… je peux comprendre leur frustration.

Avant d’aller plus loin, regardons ce que sont ces fonds de placement et comparons-les aux FCPF, plus courants.

Un FCPS est une catégorie d’actions émise par une grande société, une société d’investissement à capital variable (SICAV). Certaines de ces SICAV gèrent plus de 300 fonds communs. Lorsqu’on investit dans un FCPS, on est donc un actionnaire.

Un FCPF, quant à lui, est, pour des fins fiscales, une fiducie. Donc, un fonds égale une fiducie. Lorsqu’on investit dans un FCPF, on est un détenteur de parts.

Or, au niveau fiscal, la différence entre les deux types de fonds est majeure.

Dans le cas des fiducies, une fois les dépenses d’opérations et autres frais payés, tous les rendements réalisés à chaque année sont distribués aux investisseurs. La raison est simple: si une fiducie, qui est un particulier aux fins fiscales, conserve des revenus, elle est imposée au taux marginal supérieur, ce qui n’est pas efficace. Ce sont donc les investisseurs qui s’imposent sur ces revenus. Ces revenus peuvent être des intérêts, des dividendes ou du gain en capital. Dans ce qu’on appelle des fonds « de série T », il est possible qu’en plus du rendement distribué, il y ait une distribution de capital.

Pour les FCPS, comme les investisseurs dans ces fonds sont des actionnaires, ils ne peuvent recevoir d’intérêt car une action ne distribue pas d’intérêts. Les investisseurs reçoivent ainsi soit des dividendes, soit du gain en capital ou soit, comme dans le cas des FCPF, un retour de capital.

Mais où est ce fameux avantage ?

Imaginez un fonds commun équilibré avec sa version en fiducie et sa version en société. Comme c’est un fonds équilibré, il investira une bonne partie de son actif dans des obligations. Or, une obligation verse souvent des revenus d’intérêt. Il est donc normal que ce type de fonds distribue régulièrement des intérêts.

Le fonds peut également investir dans des titres étrangers. Si vous êtes un investisseur qui est ou a été en affaires, vous êtes probablement actionnaire d’une société de gestion. Si votre société investit dans ce type de fonds commun, ça vous coûte une « beurrée », ces revenus étrangers. Lorsqu’on fait des calculs d’impôt total (société de gestion plus impôt personnel de l’actionnaire), le taux combiné est de 63,18 % en 2019 sur les dividendes américains et, tenez-vous bien, 67,44 % pour des dividendes, par exemple, du Royaume-Uni ! N’aimeriez-vous pas que ces revenus toxiques disparaissent ? En fait, peut-être voudriez-vous avoir accès au rendement brut de ces titres étrangers sans être imposé de façon aussi indécente…

C’est précisément ce que font les FCPS…

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Un des avantages de ces fonds est que la SICAV (vous vous souvenez, cette grande société qui gèrent des dizaines, voire centaines de fonds) peut utiliser ses dépenses d’opérations et autres pour annuler complètement ses revenus d’intérêt et ses revenus étrangers. Cet objectif est généralement atteint. Si jamais ce n’est pas le cas, la société paiera de l’impôt (élevé) sur ces revenus mais ne les distribuera pas aux investisseurs. En ne distribuant pas ces revenus toxiques, le montant après impôts fera croître la valeur du fonds. L’investisseur aura donc un gain en capital plus élevé à la vente. Vous voyez qu’on a ainsi « transformé » un revenu toxique en gain en capital, moins imposé.

Lorsque le fonds réalise du rendement sous forme de dividendes ou de gain en capital, il peut le distribuer.

L’objectif ultime d’un FCPS est de distribuer le moins possible de revenus à ses investisseurs. Un fonds « parfait », serait un fonds où il n’y aurait aucune distribution, tout le rendement réalisé au fil du temps ne faisant qu’augmenter la valeur des actions. Pour l’investisseur, cela signifierait une imposition sous forme de gain en capital seulement, et au moment où il décide de vendre, en plus!

Mais comment atteindre cet objectif ?

Le principe est simple mais l’application est complexe.

En fait, les différents fonds gérés par la SICAV s’entraident à chaque année sur le plan fiscal. Un fonds réalise un certain rendement brut. Un FCPF (en fiducie, je le rappelle), n’a d’autres choix que de refiler ce rendement, après dépenses, aux détenteurs de parts qui en paient l’impôt. Un FCPS, quant à lui, peut voir un gain en capital annulé par une perte en capital d’un AUTRE FCPS, évitant ainsi une distribution…

On comprendra que, au niveau fiscal, si un fonds en a aidé un autre dans une année donnée, il devra se faire aider à son tour dans une autre année, sinon, ce ne serait pas équitable. De toute façon, la loi du marché s’appliquerait et les investisseurs de ce fonds le délaisseraient avec le temps car il ne livrerait pas la marchandise.

Or, les fiscalistes de ces fonds ont tous développé des formules d’équité entre les différents fonds. Ces formules sont réellement un secret. Personne, à l’exception de ces fiscalistes, n’est au courant de ces formules. Les détracteurs des FCPS ont souvent la « boîte noire » pour argument lorsque vient le temps d’en parler.

Mais, entre vous et moi, il n’y a rien de plus normal que la recette secrète reste à l’interne chez les grandes maisons de fonds. L’important n’est pas de connaître la recette mais de voir si elle marche…

Finalement, lorsque vient le temps de procéder à des comparaisons entre des FCPS et des FCPF, il est virtuellement impossible de le faire. Les analyses qui prétendent comparer les distributions des fonds « identiques » dans leurs versions en fiducie et en société doivent être faites sur un très grand nombre d'années car les paramètres sont trop nombreux et variables pour être utilisé sur une courte période.

En résumé, ayez à l’esprit que les fonds communs de placement constitués en société, les FCPS, ont un avantage fiscal certain sur leurs cousins, constitués en fiducie. Cet avantage, illustré sur quelques décennies, pourrait représenter des centaines de milliers de dollars pour vous. À vous de choisir.

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À propos de ce blogue

Dany Provost possède une formation multidisciplinaire lui permettant d'avoir une vue d'ensemble d'une situation financière. Combinant l'actuariat, la fiscalité, le placement et une grande maîtrise de l'environnement Excel, son expertise lui a permis de développer plusieurs outils de modélisation complexes, notamment en optimisation fiscale et avantages sociaux. Il est directeur planification financière et optimisation fiscale chez SFL Expertise et est l’auteur des livres «Arrêtez de planifier votre retraite, planifiez votre plaisir» et «As-tu réglé ça?» Membre honoraire et expert désigné de l’Institut de planification financière, il est un collaborateur régulier dans les médias en plus d’être chroniqueur en fiscalité dans le journal Finance et Investissement.

Dany Provost