Vous essuyez un échec? Tant mieux!

Offert par Les Affaires


Édition du 14 Novembre 2015

Vous essuyez un échec? Tant mieux!

Offert par Les Affaires


Édition du 14 Novembre 2015

Photo: Shutterstock

Les revers sont indissociables du monde entrepreneurial. Je le constate chaque jour en tant que mentore et dirigeante. Comment peut-on se démarquer si on se contente de suivre des chemins parfaitement balisés? Le droit à l'erreur est fondamental pour tous ceux qui gravitent dans le milieu des affaires.

Pourtant, de nombreux entrepreneurs sont paralysés devant le spectre de la défaite. Selon le Global Entrepreneurship Monitor, environ 40 % des Québécois qui envisagent de fonder une entreprise seraient en effet freinés par la peur de l'échec. Comparativement aux autres pays du G8, les entrepreneurs potentiels de notre province seraient proportionnellement plus nombreux à ne pas se sentir assez compétents pour démarrer leur entreprise.

Il est facile de comprendre leur hésitation. Après tout, la moitié des nouvelles entreprises ne célébreront pas leur cinquième anniversaire. Le risque de faillite n'est pas un mythe, mais une réalité.

Je me permets toutefois de vous poser cette question : et si ce n'était pas tant la peur de l'échec qui décourageait la prise de risque, mais plutôt la peur du regard social ? Au-delà des entrepreneurs, c'est tout l'entourage qui tremble et recule devant la défaite.

Si la faillite est synonyme d'apprentissage aux États-Unis, elle provoque encore le jugement chez nous.

Je remarque toutefois un vent de changement favorable. Depuis quelque temps, de grands entrepreneurs québécois prennent la parole devant des salles combles pour partager ouvertement leurs déboires. On voit aussi naître des événements qui visent à promouvoir la prise de risque par la célébration de l'échec. Le tabou se brise lentement. Je me réjouis de cette évolution des mentalités qui saura certainement servir la cause entrepreneuriale.

J'ai vécu un échec... Et alors?

L'histoire nous prouve que la plupart des grands exploits ont été précédés de ratages en série. Walt Disney a notamment été viré par le journal Kansas City Star sous prétexte qu'il manquait de créativité et d'imagination. L'inventeur Thomas Edison a essuyé plus de 1 000 échecs avant de mettre au point le concept d'ampoule gagnant.

Les erreurs sont salutaires, sur le plan tant entrepreneurial qu'humain. Quand on se heurte à un mur, quand on se retrouve face contre terre, on est forcé de se poser des questions. Ai-je été trop prudent ou trop empressé ? Devrais-je revoir mon approche, mon produit, ma cible, mon objectif ? Il faut se regarder dans le miroir, sans excuse ni bouc émissaire, et s'observer en toute humilité. C'est lorsque les choses fonctionnent le moins que nous apprenons le plus.

Comme tous les entrepreneurs, j'ai connu des coups durs en affaires. Je ne mentirai pas : les échecs font mal. J'ai tout de même fait le choix de les envisager comme autant d'occasions d'apprentissage. Chaque revers peut nous permettre de mieux nous connaître. Chaque échec peut nous révéler une lacune de notre plan d'affaires.

L'ouverture d'esprit, la responsabilisation et l'humilité me semblent primordiales pour tirer profit de nos échecs. Si nous élaborons un plan d'action qui repose sur des faits concrets, il est alors possible de soigner nos plaies et de tourner la page.

Je tombe, donc je suis

L'humain est toujours au coeur de l'entreprise, quels que soient son secteur d'activité et sa taille. La croissance d'une entreprise passe inextricablement par l'évolution des gens qui la composent. Par l'intermédiaire des échecs et des défis, on peut non seulement grandir comme personne, mais gagner une vertu aussi rare que nécessaire : la compassion.

Quand on tombe, on redevient petit. On prend conscience de notre vulnérabilité, de notre humanité. Nous sommes tous faillibles. Alors que les succès consolident nos forces, les échecs nous obligent à devenir plus indulgents à l'égard de nos faiblesses. C'est en embrassant nos erreurs qu'on pourra ensuite éprouver de la compassion pour ce que vivent les autres.

Lorsqu'on subit un échec, notre ego et notre identité peuvent en prendre un coup. On doute de nos compétences. On se remet en question. Est-ce que je suis une bonne personne ? Est-ce que j'ai vraiment du talent comme entrepreneur ? Il importe de changer notre perception. Les résultats nous permettent de valider la pertinence de notre démarche, mais jamais de confirmer notre valeur comme être humain !

L'échec n'est pas une fin en soi. Si on en tire bien des enseignements, il constitue néanmoins un formidable tremplin vers la réussite. Au fil des épreuves, j'ai appris qu'il ne faut jamais baisser les bras devant un revers. C'est peut-être la dernière étape avant de conquérir un sommet inexploré...

Pour illustrer mon propos, je me permets de conclure avec cette sage citation de Winston Churchill : «Le succès, c'est être capable d'aller d'échec en échec sans perdre son enthousiasme».

Danièle Henkel a fondé son entreprise en 1997, un an après avoir créé et commercialisé le gant Renaissance, distribué partout dans le monde. Mme Henkel a été plusieurs fois récompensée pour ses qualités de visionnaire et son esprit entrepreneurial. Elle est juge dans la téléréalité à caractère entrepreneurial Dans l’œil du dragon, diffusée à Radio-Canada.