Ce que nous apprend Johnny Depp sur l'art du budget

Publié le 07/02/2017 à 11:40

Ce que nous apprend Johnny Depp sur l'art du budget

Publié le 07/02/2017 à 11:40

Une collègue m’a abordé la semaine dernière pour me signaler une carence particulière dans la couverture des finances personnelles. C’est beau creuser les questions de REER et d’hypothèque, me dit-elle, mais pourquoi ne parle-t-on pas davantage du budget personnel? Si le sujet était adéquatement traité, peut-être que les statistiques sur l’endettement des ménages cesseraient de se détériorer.

Mais que peut-on encore apprendre aux lecteurs? Il suffit après tout de consigner ses dépenses dans un document Excel et de les faire balancer avec son chèque de paie. La première étape est ennuyeuse. La seconde est plus exigeante puisqu’elle nécessite souvent réflexion et sacrifices.

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Parlez-en à Johnny Depp. Pauvre Johnny! Visiblement, il n’a pas été initié au concept d’«appariement» entre revenus et dépenses, ce qui lui vaut aujourd’hui des soucis financiers.

On a appris la semaine dernière que la vedette des Pirates des Caraïbes était quasi ruinée. Elle est poursuivie pour des remboursements en souffrance. Il faut dire qu’il ne regardait pas la dépense, Johnny. Île personnelle dans les Bahamas, château en France, maisons nombreuses, voitures de luxe, yacht, déplacement en avion privé… des fantaisies auxquelles se sont ajoutés récemment les frais exorbitants d’un divorce acrimonieux avec l’actrice américaine Amber Heard. Quand ça va mal!

Bref, si Johnny Depp, avec un patrimoine estimé à 400 millions de dollars, a du mal à balancer à la fin du moins, peut-être qu’une révision des principes budgétaires de base sont de mise.

Le budget, donc. À quoi sert-il? Platement, à gérer les flux monétaires d’un ménage de manière à ce qu’il subvienne à ses besoins sans se mettre dans le trou et, idéalement, à générer de l’épargne. Est-il nécessaire pour tout le monde? Non. Un ménage avec des revenus importants, peu d’obligations financières et un rythme de vie modeste peut s’en passer. Non seulement ce ménage paiera ses factures sans souffrir, il pourra accumuler de l’épargne sans effort.

La rigueur à appliquer à l’exercice dépendra de ces trois paramètres: revenus, obligations et dépenses discrétionnaires. 

Pour une personne normale, l’éducation des enfants, la nourriture, le logement et la facture d’électricité font partie de ces dépenses dont on ne peut pas se dérober. Si elle a un enfant handicapé, ou un parent qui dépend d'elle, cela fait des obligations supplémentaires. La cave à vin, le voyage annuel, la deuxième voiture neuve et les repas au restaurant le vendredi soir font partie des dépenses discrétionnaires.

Pour Johnny, son yacht, son île et son château français entrent dans les dépenses discrétionnaires. Les millions qu’il doit payer dans le cadre de son divorce font partie de ses obligations financières.

Les obligations sont des dépenses difficilement compressibles. Il faut se nourrir, se loger et assurer l’éducation des enfants. Le budget discrétionnaire, au contraire, peut être réduit à zéro, la preuve étant que bien des ménages n’ont pas le luxe d’en avoir un, ou si peu. Quant à Johnny, cela représente 99,6% de son budget.

La manière simple de gérer le budget est de diriger les revenus vers trois comptes prévus pour trois grands postes budgétaires: épargne, besoins essentiels et plaisirs de la vie dans une proportion qui dépendront des obligations de la famille et du revenu, mais disons qu'avec 20-50-30, on jase. En fait, ce pourrait être seulement deux: épargne et le reste. Cette approche convient dans le cas des gens qui ne sont pas portés sur la dépense et qui peuvent compter sur de bonnes entrées d'argent.

Une approche motivante consiste à ajouter des postes par projets: par exemple un voyage, une mise de fonds pour acheter une maison, des rénovations ou tout simplement l’achat d’une télévision. Pour que ça fonctionne, il faut idéalement ouvrir un compte d’épargne pour chaque projet. Mais ici encore, cette méthode convient aux gens capables de générer un bon revenu et qui ne succombent pas facilement aux dépenses non nécessaires. Il faut penser à se payer en premier, toujours. 

Plus cela est difficile, plus le budget devra être détaillé. Il faudra préciser ce qui entre (salaire net, crédits et programmes du gouvernement, etc.) et ce qui sort. Je ne vous énumérerai pas les postes de dépenses (le web regorge de modèles), il y en a des dizaines. L'objectif ici est de détecter les fuites et de remettre en question chacune des dépenses. Un bon budget devrait comptabiliser certaines provisions pour les imprévus «prévisibles», comme le réservoir d'eau chaude qui lâche.

Le budget fonctionne sur le principe des vases communicants, s’il en manque quelque part, il faudrait couper ailleurs. Tout l’art de la finance personnelle repose dans cet arbitrage. Et si on ne veut (ou ne peut) couper nulle part, il faut trouver un moyen d'augmenter les revenus. On n’en sort pas. L'autre solution, qui n'en est pas une, est la carte de crédit. 

Quant aux problèmes de l’endettement soulevés par ma collègue, elle n’a pas tort d’y voir une cause dans le manque de compétences budgétaires. Mais le problème n'est souvent pas tans dans la maîtrise de l'outil que dans la capacité à distinguer le superflu de l’essentiel. 

Vous demanderez à Johnny! 

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À propos de ce blogue

Les finances personnelles, ça consiste à gérer son argent au jour le jour en fonction d’objectifs plus ou moins éloignés. En regardant du bon angle, on constate qu’il s’agit d’un instrument pour réaliser ses ambitions et ses rêves. C’est avec humanité et une pointe d’humour que Daniel Germain compte aborder les finances personnelles dans ce blogue, dont l’objectif est de vous informer et de vous faire réagir. Daniel Germain assume la direction du magazine de finances personnelles Les Affaires Plus depuis 2002 et a développé de vastes connaissances sur le sujet.