Placement: préparez-vous à l'invasion des robots

Publié le 14/04/2015 à 11:49

Placement: préparez-vous à l'invasion des robots

Publié le 14/04/2015 à 11:49

La nouvelle est passée sous les radars la semaine dernière, mais elle ne présage pas moins d’importants changements dans l’industrie du placement. La Financière Power (Tor., PWF) a investi 30 millions de dollars dans l’entreprise Wealthsimple, un gestionnaire d’investissement en ligne.

WealthSimple est l’une des dernières manifestations d’une tendance déjà bien engagée aux États-Unis : les robots-conseillers (robo-advisors). Pour expliquer la chose simplement, il s’agit de services de gestion de portefeuille automatisée en ligne. On compte plus d’une vingtaine de petites sociétés qui offrent ce genre de service chez nos voisins. Une poignée est en opération au Canada, surtout active dans les provinces anglophones.

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Je ne connais personne qui s’est précipité sur leurs services. Pour l’heure, les robots-conseillers ont quelque chose du Bitcoin : ç’a l’air cool, mais peu s’en servent encore à part quelques utilisateurs précoces. Aux États-Unis, on prévoit qu’ils auront des actifs sous gestion de 255 milliards de dollars d’ici cinq ans, ce qui est modeste dans une industrie qui brasse des milliers de milliards. Je miserais néanmoins quelques dollars sur le succès des robots-conseillers. Ils sont loin d’être parfaits, mais ils offrent une solution simple et économique de concevoir un portefeuille de placement.

Les fervents du stock picking et autres admirateurs de mon collègue Bernard Mooney n’auront aucun intérêt pour la chose. Ce genre de service s’adresse à ceux qui préfèrent tondre leur gazon à lire des rapports annuels et la «prose» des analystes financiers. Il cible aussi les gens à l’aise avec les services en ligne. Et ceux qui ont confiance dans la technologie.

Il faut comprendre que les décisions d’investissement sont abandonnées à des machines. Ça ne débouchera pas sur des relations chaleureuses, mais cela dissipe tous les doutes quant aux intérêts qui animent celui qui transige les titres du portefeuille. La clientèle visée est clairement les Y et leurs cadets, quand ces derniers auront de l’argent.

Il y a plusieurs modèles, mais ils ont comme point commun d’être abordables. Parfois, de vrais conseillers interviennent, mais la majorité des services sont basés sur des algorithmes qui conçoivent des portefeuilles de fonds négociés en bourse (FNB) en fonction des objectifs et de la tolérance au risque du client (qui doit être validé avec un vrai conseiller pour être conforme à la réglementation canadienne). Ça ressemble aux outils d’allocation d’actifs qu’utilisent les professionnels du placement, mais conçus et enveloppés de manière à plaire au grand nombre. Les frais de gestion tournent autour de 0,5%, auxquels il faut ajouter ceux des produits qui composent le portefeuille.

Les services des robots-conseillers sont attrayants sous d’autres points de vue. Ils sont accessibles pour de petits portefeuilles et offrent le rééquilibrage automatique à une fréquence élevée, parfois de manière quotidienne. Ce mécanisme améliore les performances à long terme du portefeuille, pour peu qu'il soit à l’intérieur du CÉLI ou du REER. Dans un compte non enregistré, les transactions pour rééquilibrer régulièrement le portefeuille peuvent être coûteuses d’un point de vue fiscal.

L’investissement de 30 millions de dollars de Power Corporation dans WealthSimple est significatif. Sa filiale Financière Power est le géant derrière, notamment, le Groupe Investors, dont le modèle repose sur une armée de conseillers en chair et en os. Power suit ainsi les traces de la firme américaine de courtage Charles Schwab qui a lancé son propre service de gestion de portefeuille automatisée. Power ne dévoile pas ses intentions à long terme, mais elle estime le phénomène assez important pour y placer ses pions. D’autres devraient suivre.

(Mise à jour: Le gestionnaire de portefeuille Assante a annoncé qu'il se lançait sur ce marché également)

Les 30 millions permettront notamment à WealthSimple, dont la plateforme a été lancée en septembre, d’offrir le service en français au Québec et d’investir dans les efforts de marketing. Alors préparez-vous à voir de la publicité dans les prochains mois.

Les robots-conseillers se limitent à la gestion de portefeuille. Ils sont incapables pour l’instant de faire de la planification financière ou de proposer des produits d’assurance, mais cela viendra sans doute un jour. Après tout, l’ordinateur nous a humiliés aux échecs.

Les conditions sont particulièrement favorables à l’émergence des robots en placement. Ils s’inscrivent bien dans l’air du temps, le «fais-le-toi-même» assisté par des technologies en ligne. Des liquidités dorment dans les comptes des Y, pas très portés par le placement boursier, mais qui pourraient se laisser convaincre de le faire grâce à ce genre de service. Et les marchés boursiers poursuivent une ascension comme on n’en a jamais vu.

Cela soulève néanmoins une petite question : à qui se plaindront ces clients lorsque les marchés vont planter?

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À propos de ce blogue

Les finances personnelles, ça consiste à gérer son argent au jour le jour en fonction d’objectifs plus ou moins éloignés. En regardant du bon angle, on constate qu’il s’agit d’un instrument pour réaliser ses ambitions et ses rêves. C’est avec humanité et une pointe d’humour que Daniel Germain compte aborder les finances personnelles dans ce blogue, dont l’objectif est de vous informer et de vous faire réagir. Daniel Germain assume la direction du magazine de finances personnelles Les Affaires Plus depuis 2002 et a développé de vastes connaissances sur le sujet.