Le véritable coût de la bête poilue

Publié le 28/07/2015 à 11:48

Le véritable coût de la bête poilue

Publié le 28/07/2015 à 11:48

La mauvaise réponse: 50 000 dollars US. Ce billet n’a pas de lien avec la nouvelle rapportée lundi selon laquelle des chasseurs ont versé cette somme à deux guides pour attirer un célèbre lion hors d’une zone protégée du Zimbabwe afin de l’abattre et de le dépecer. Enfin, peut-être un peu, car il est question ici de nos relations avec les animaux.

C’est toujours délicat de s’émouvoir du sort d’une bête, a fortiori un félin de 200 kg de la savane dont on n’avait pas entendu parler la veille. Il y a un risque de se faire reprocher de ne pas se préoccuper autant des humains. Mais une fois consommé le récit de cette traque odieuse, on peut difficilement être du côté du primate.

Surtout que j’aime les chats. Le gros lion Cecil, l’icône à la crinière foncée abattue non loin du parc africain Hyamge, et Gustave Picard, le chat himalayen de 2,5 kg qui règne sur mon appartement, se ressemblent après tout. Comment ne pas avoir de sympathie pour le roi des animaux? Les deux félins se déplacent avec le même déhanchement. Ils se laissent choir paresseusement sur le flanc, tel un sac de sable inerte, après une journée de chasse. Leur butin les distingue, par contre, celui de mon chat étant le plus souvent constitué de pelures d’oignon et de samares.

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Nous sommes nombreux à nous amouracher des autres espèces. Le magazine Québec Science consacre son dernier numéro à ces relations que nous entretenons avec nos petits compagnons à poils. Ce dossier confirme que nous en sommes littéralement gagas, et ce malgré qu’on puisse se montrer parfois cruels.

Pourquoi parler des animaux domestiques dans une chronique de finances personnelles? Il me semble y avoir un devoir moral rattaché à l’adoption d’un animal, et ce devoir est accompagné de coûts qu’ignore souvent la famille qui se laisse séduire par la mine enjouée d’un petit chiot.

D’ailleurs, ce devoir sera bientôt inscrit dans la législation québécoise, en partie du moins, puisqu’un projet de loi provincial confèrera bientôt un nouveau statut juridique aux animaux domestiques, celui de «biens sensibles» dotés «d’impératifs biologiques». On ne pourra plus abandonner un chien ou un chat lors d’un déménagement sans risquer de se voir imposer une amende. Il était temps. D’ici là, ils sont encore considérés comme des «biens meubles», au même titre qu’un grille-pain.

Mais combien ça coûte, posséder un animal? Outre le coût d’acquisition, il faut comptabiliser la nourriture, la stérilisation, la vaccination, le nettoyage des dents, le toilettage, les jouets,… Mine de rien, un gros chien peut facilement ponctionner le compte de banque de 1500 dollars chaque année. Et à mesure que le temps passe, comme chez les humains, des bobos commencent à apparaître. Puis à empirer. Il faut acheter des médicaments, des traitements contre l’arthrite et parfois recourir à la chirurgie. Sur toute la durée de vie d’un tel animal, son maître paiera plus de 20 000 dollars. Avant d’aller magasiner un nouveau membre de la famille, il est important de considérer son poids sur le budget du ménage.

Mon ancien chat a vécu jusqu’à 20 ans, dans une forme étonnante, et ce jusqu’à son avant-dernier jour. Un matin, sans avertir, il a été victime de convulsions. Ce n’était pas beau à voir. J’ai n’ai pas hésité à payer 900 dollars pour une batterie de tests, pour finalement recourir, non sans quelques remords et beaucoup de chagrin, à l’euthanasie. Mes derniers efforts m'ont permis d’avoir la conscience tranquille, mais je me demande encore si ce n’était pas de l’acharnement de ma part, et de celle du vétérinaire qui doit amortir ses coûteux équipements. Mon animal avait atteint un âge vénérable qui ferait l’envie de n’importe quel amoureux des matous.

L’industrie entourant les animaux domestiques ne connait pas la récession. Les Canadiens dépensent 2 milliards en nourriture pour leurs animaux de compagnie. Les jouets, les laisses, les cages, la litière, les vêtements et autres accessoires ont coûté 1,3 milliard de dollars aux propriétaires d’animaux. Dans les grandes villes, on voit apparaître des cafés et des restaurants qui accueillent les humains et leurs compagnons. L’industrie des soins vétérinaires fait aussi de belles affaires: 2,25 milliards de dollars en 2013.

Et ça n’arrête pas de grimper. J’ai entre les mains le dépliant d’une clinique multidisciplinaire qui a pignon sur rue à Laval et sur la Rive-Sud. On y prodigue des services en dermatologie, en oncologie, en ophtalmologie, en physiothérapie et même en acupuncture!

Le maître a désormais l’occasion d’hypothéquer sa maison pour faire soigner son animal sans garantie de résultat.

Je ne vous le cacherai pas, cela me semble excessif et le devoir du maître s'arrête bien avant cela. Mais contrairement à d’autres personnes qui affirment que cet argent serait mieux investi à la Fondation du Dr Julien, cela ne me scandalise pas. Bien au contraire de ces machos pour qui le comble de l’exotisme est de décapiter le roi lion.

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À propos de ce blogue

Les finances personnelles, ça consiste à gérer son argent au jour le jour en fonction d’objectifs plus ou moins éloignés. En regardant du bon angle, on constate qu’il s’agit d’un instrument pour réaliser ses ambitions et ses rêves. C’est avec humanité et une pointe d’humour que Daniel Germain compte aborder les finances personnelles dans ce blogue, dont l’objectif est de vous informer et de vous faire réagir. Daniel Germain assume la direction du magazine de finances personnelles Les Affaires Plus depuis 2002 et a développé de vastes connaissances sur le sujet.