L'assurance baloney

Publié le 31/05/2016 à 10:20

L'assurance baloney

Publié le 31/05/2016 à 10:20

Je suis passé à l’ère où lorsqu’on me téléphone, ça m’irrite. Sauf quand c’est la famille qui appelle. Ou qu’il s’agit d’une urgence. Pour le reste, il y a le texto. Inutile de vous dire que lorsque je vois un numéro 1-800 apparaître sur l’écran de mon cellulaire, je ne réponds plus. Cela augure le sondage, la vente sous pression ou l’arnaque.

Au cours des dernières semaines, un numéro 1-877 a tenté de me contacter avec insistance. À la 6e tentative, je me suis tanné et j’ai décroché. C’était un représentant de ma banque. Alors là, on peut s’attendre à tout, du sondage à l’arnaque en passant par la vente sous pression, ou tout ça à la fois.

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On reconnait le vendeur à sa manière, d’entrée de jeu, d’en mettre une couche de trop:

-«Bonjour M. Germain, comment allez-vous AUJOURD’HUI?»

(Tu ne veux pas connaître mon humeur d’hier, ou qu’on spécule ensemble sur celle de demain… ?)

Sans tarder, il entame son boniment en m’offrant de la «flexibilité». Je doute qu’il veuille me vendre une session de yoga, mais je suis attentif, car déjà je crois humer un sujet de chronique.

Il consulte mon dossier, il remarque que j’ai une marge de crédit (et j’apprends qu’elle a été majorée sans que je l’aie demandé, ça c’est une autre histoire… et un autre sujet). Il me propose de l’assurance. Ce n’est pas la première fois qu’on me suggère de «protéger» ma marge de crédit avec ce type de produit, mais jusque-là, on s’était limité à l’assurance vie. Cette fois, on me conseille en plus des assurances maladie grave et invalidité.

À quoi pourrait-on comparer ces produits? La première chose qui me vient à l’esprit, ce sont les boîtes de Spam (un pain de viande en can immonde) qui décorent le bureau du collègue Denis. Ou du baloney. Sur l'échelle de la qualité, on est au fond de l’abysse.

Qu’est-ce qui peut séduire le consommateur? Vous l’aurez deviné, le sentiment d’avoir une protection à faible coût. Alors voici ce que m’a proposé le représentant de ma banque. L’assurance vie aux prix de 0,60 $ par mois par tranche de 1000 dollars de crédit entamée sur la marge. Par exemple, si j’ai utilisé 500 dollars sur la marge, l’assureur va me facturer 0,60$, qu’il prélèvera sur la marge. À 1001 dollars, la prime monte à 1,20$. Si je n’utilise pas la marge, ça ne coûte rien.

Le même principe s’applique sur l’assurance invalidité et sur l’assurance maladie grave, sauf que la prime s’élève respectivement à 1,68$ et à 1,90$ par tranche de 1000 dollars. Celui qui voudra être protégé contre les trois risques devra payer 4,18$ par 1000 dollars.

Sur les tablettes du supermarché, on peut trouver des aliments sains à faible coût. Des bananes. Ou les légumineuses, par exemple, c’est mieux encore. En assurance, l’équivalent des légumineuses n’existe pas. Quand on ne veut pas payer cher, on se retrouve avec le baloney de l’assurance.

Quelle est la protection fournie? Elle est plus mauvaise que je ne le pensais, et mes attentes n’étaient pas très élevées. L’assurance vie d’abord. En cas de décès du client, l’assurance rembourse le plus petit montant des deux suivants: le solde de la marge ou la moyenne des soldes des douze derniers mois. Le montant pourrait représenter des peanuts et ne même pas suffire à rembourser la marge! Je ne croyais pas ça possible.

Du côté de l’assurance invalidité, la protection est aussi médiocre, si ce n’est pire. En cas d’invalidité, l’assurance paie l’équivalent de 3% de la moyenne des soldes des 12 derniers mois. La prestation va durer… 24 mois! Le plus étonnant, c’est que le représentant m’explique tout ça sans rire… À supposer que la moyenne des soldes est de 2000 dollars, la prestation s’élèvera à 60 dollars par mois, pendant deux ans. Un gros 1440 dollars en tout! Toute une assurance! Elle est si nulle que je n’ai même pas pris la peine de vérifier la définition d’invalidité, un aspect pourtant primordial pour ce type d’assurance.

Et l’assurance maladie grave? Elle rembourse le solde, et ce jusqu’à un maximum de 300 000 dollars. Le problème ici, ce sont les conditions inscrites au contrat. Dans une assurance maladie grave standard, une trentaine de maladies peuvent être inscrites dans la police. Ici, trois: arrêt cardiaque, accident cardio-vasculaire et cancer terminal! Un cancer, ce n’est pas suffisant, il doit être terminal.

Imaginez, si le client a souscrit l’assurance vie en plus, il gagne le «jackpot»!

Le principe derrière les assurances vie et invalidité, les vraies? Pallier une perte de revenu en cas de décès prématuré d’un accident ou d’une maladie qui nous empêcherait de travailler. Pas à rembourser des dettes. L’un des problèmes avec ces produits est qu’il peuvent créer chez le client le sentiment qu’il a comblé ses besoins en assurance et qu’il est protégé, ce qui n’est évidement pas le cas.

Alors si un représentant vous offre du baloney, vous saurez quoi dire.

Lire aussi: L'assurance-solde : une protection efficace?

À propos de ce blogue

Les finances personnelles, ça consiste à gérer son argent au jour le jour en fonction d’objectifs plus ou moins éloignés. En regardant du bon angle, on constate qu’il s’agit d’un instrument pour réaliser ses ambitions et ses rêves. C’est avec humanité et une pointe d’humour que Daniel Germain compte aborder les finances personnelles dans ce blogue, dont l’objectif est de vous informer et de vous faire réagir. Daniel Germain assume la direction du magazine de finances personnelles Les Affaires Plus depuis 2002 et a développé de vastes connaissances sur le sujet.