J’ai entendu dire que mon voisin de palier dans cette page, Bernard, vous parle souvent de Warren Buffett. Bien, moi aussi j’ai une petite fixation, et c’est surprenant qu’elle ne se soit pas déjà manifestée ici: Apple, son obsession pour le design et son génie du marketing.
L’entreprise s’apprête à frapper un grand coup, comme elle le fait chaque cinq à sept ans: elle mettra bientôt en marché un tout nouveau produit. Eh oui, nous sommes à plus ou moins un mois de la sortie de l’un des gadgets les plus attendus des dernières années, la montre connectée Apple Watch.
Je vous en parle ici, car l’arrivée d’un nouveau produit d’Apple a souvent pour conséquence une ponction significative dans mon portefeuille, et peut-être le vôtre. Après tout, au dernier trimestre, l’entreprise a généré des revenus de quelque 75 milliards de dollars américains et des profits de 18 milliards. Un trimestre, pour rappel, c’est trois mois. Il y a bien sûr les Chinois pour contribuer à ces résultats ahurissants, mais nous aussi nous participons à cette débauche de profits. Je vois des pommes partout dans les cafés et le métro.
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Un lancement de produit chez Apple est toujours un évènement. Mais l’arrivée de cette montre revêt une signification particulière: elle positionne l’entreprise californienne dans le créneau des produits de luxe.
Je vous entends d’ici, tout ce qu’on achète dans une boutique surmontée d’un fruit défendu coûte deux fois plus cher qu'ailleurs, même un fil. Mais jusque-là, la société était confinée dans le segment haut de gamme de l'électronique grand public. Pas le luxe. Pensons Gucci, Rolex, Porsche.
Un indice de ce repositionnement est l'apparition de cette montre l’automne dernier sur la couverture de la version chinoise du magazine Vogue, bien avant qu'on puisse l'apercevoir dans Wired aux États-Unis. Les prétentions sont claires.
Aussi, l'entreprise a débauché la PDG de Burberry, Angela Arendts, pour développer son réseau de boutiques, ainsi qu'un vice-président de la division montre (Tag Heuer) chez LVMH.
La déclinaison du produit est on ne peut plus éloquente quant aux visées de la société. La montre est déclinée en trois gammes. La version «Édition» de l’Apple Watch sera en or 18 carats (jaune ou rose), avec en option plusieurs bracelets assortis. Le prix devrait être à l’avenant. Des spécialistes en joaillerie estiment que ces bijoux pourraient au bas mot coûter 4000 dollars (jusqu'à 17 000 $US, selon les informations officielles d'Apple), ce qui en ferait le produit le plus cher du catalogue d’Apple, devant les ordinateurs destinés aux professionnels de la vidéo, le Mac Pro.
Une montre en or… Cela m’a fait penser au film Pulp Fiction, de Quentin Tarantino, ou l’on peut entendre un des monologues les plus savoureux du cinéma américain. On y voit un militaire interprété par Christopher Walken transmettre à un jeune garçon une montre en or ayant appartenu à son arrière-grand-père. La montre en question avait traversé trois guerres et dû être cachée pendant des années dans le postérieur du militaire (j'ai mis la vidéo plus bas, on ne s'en lasse pas).
Je me suis demandé si une Apple Watch pourrait fonctionner après avoir servi dans les tranchées et être cachée durant 7 ans dans l’extrémité d’un appareil digestif d'un militaire en service à Hanoï. Bien curieux endroit pour recharger une montre électronique et lui fournir ses mises à jour… Bien sûr, la montre n’aurait pas tenu le coup.
C’est le problème avec les produits d’Apple, comme tous les gadgets électroniques, du reste. Ils ne durent pas. La pile d’un iPhone devient problématique après trois ans d'utilisation, sinon moins. Les mises à jour du système d’exploitation ralentissent immanquablement les appareils des générations précédentes.
Une montre dans les gammes où se positionne Apple est un produit durable. Un bijou à 4000 dollars se transmet d’une génération à une autre. J’ai quelques montres qui ont coûté le huitième de ce prix et qui ne se démodent pas.
Alors je me demande: pourquoi mettre de l’électronique qui sera désuète dans trois ans dans un boîtier en or 18 carats?
On dirait bien que l’obsolescence programmée investit un nouveau marché. À moins qu’Apple ne rachète les métaux précieux à la fin de la vie utile de l’appareil, la version Édition de sa montre intelligente ne pourrait être qu’un fashion statement pour ultra-riches.
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