Air Canada largue Aeroplan: que faut-il en conclure?

Publié le 11/05/2017 à 14:38

Air Canada largue Aeroplan: que faut-il en conclure?

Publié le 11/05/2017 à 14:38

Cela s’appelle des programmes de fidélité, ce qui ne les empêche pas de connaître de douloureuses ruptures. Ce matin, Air Canada(Tor., AC) a annoncé qu’elle tournait le dos à Aimia(Tor., AIM) et son programme de fidélité Aeroplan. Le transporteur aérien lancera son propre programme en 2020.

D’ici là, les clients d’Air Canada continueront d’accumuler des points Aeroplan. Et ils pourront les utiliser au-delà de 2020. Pour l’heure, l’annonce semble moins douloureuse pour les membres du programme de fidélisation que pour Aimia, la société cotée en Bourse qui exploite le programme, et ses actionnaires.

L’action de l’entreprise a amorcé une chute libre dès la publication du communiqué de presse d’Air Canada. Au moment d’écrire ces lignes, le titre d’Aimia perdait plus de 50 %. Il faut dire que Aeroplan compte pour 85 % des bénéfices d’Aimia et qu’Air Canada en est le principal partenaire.

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Comme l’indiquait notre collègue Martin Jolicoeur dans cet article publié en février sur le site de Les Affaires, la relation entre Aimia et Air Canada battait de l’aile depuis de nombreux mois déjà. Liés par une entente conclue en 2005 pour une durée de 15 ans, les deux partenaires avaient entamé des pourparlers en vue d’un nouvel accord au-delà de 2020. Le rapport de force favorisait grandement Air Canada. Il faut comprendre maintenant qu’Aimia n’a pas jeté suffisamment de leste, ou encore que son partenaire avait déjà choisi de lancer son programme, peut-être même avant d’entamer les négociations.

Qu’est-ce que cela veut dire pour les membres Aeroplan? Ayant sans doute appris des leçons du fiasco d’Air Miles, Air Canada semble vouloir s’assurer que la transition se fasse en douceur. Ses clients continueront d’accumuler des points jusqu’à 2020, conformément à l’entente qui lie les deux sociétés. Les membres Aeroplan pourront échanger leurs points contre des primes chez le transporteur aérien (et ceux de Star Alliance, un regroupement de 28 compagnies aériennes) au-delà de 2020. Mais à compter de cette année-là, les points accumulés sur les vols d’Air Canada et des transporteurs de Star Alliance seront portés au programme de fidélisation d’Air Canada, dont ne sait rien pour l'instant.

La société aérienne affirme vouloir maintenir des liens avec Aimia en proposant des places sur ses appareils aux membres Aeroplan. Il faudra s’attendre à ce qu’Air Canada, tout de même, offre des primes plus avantageuses à ceux qui adhèrent à son propre programme. Pour préserver ce lien d’affaire, il faudra qu’Aimia se remettre de cette rupture. Car soudainement, l’avenir ne semble pas des plus prometteurs pour cette entreprise basée à Montréal.  Cette conclusion est assez ironique sachant qu’Aeroplan et Aimia sont le fruit d’un essaimage (spin off) d’Air Canada.

L’onde de choc risque de se faire sentir en aval, auprès des cartes de crédit partenaires. Les banques TD et CIBC tirent des revenus non négligeables de leur carte de crédit Aeroplan.  Déjà, les analystes financiers sont à se demander quel sera l’impact de ce divorce annoncé sur les résultats des deux banques.

Chose certaine, il faut s’attendre à ce que ces les cartes de crédit frappées du logo Aeroplan perdent leur attrait auprès des consommateurs. Et il ne faudra pas s’étonner non plus que institutions financières cognent rapidement à la porte d’Air Canada pour former de nouvelles d’alliances.

Cette séparation est un véritable coup de tonnerre dans le ciel des programmes de fidélité. Et il se produit tout juste six mois après le retentissant bide d’Air Miles, qui a réduit la valeur de ses points de fidélité, une amère consolation pour ses membres qui avaient protesté contre la péremption annoncée de leur petite cagnotte virtuelle. 

Ce serait exagéré de dire que le système est ébranlé, même si l’annonce d’aujourd’hui signale une cuisante défaite de la société Aimia, un poids lourd du secteur. Car après tout, Air Canada ne fait qu’imiter ses principaux concurrents en instaurant son propre programme de fidélité, des concurrents qui étaient pour la plupart courtisés par Aimia.

Les programmes de fidélité ont pris avec le temps des proportions excessives, au point où ils peuvent prétendre au statut de système monétaire parallèle. Dans le contexte, il est utile de rappeler les qualités d’une monnaie résident dans sa stabilité et dans la confiance qu’on lui accorde. Ce qui nous fait penser que lorsqu'on transige avec des points de fidélité, on a parfois l’impression de voyager dans une république de bananes. 

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À propos de ce blogue

Les finances personnelles, ça consiste à gérer son argent au jour le jour en fonction d’objectifs plus ou moins éloignés. En regardant du bon angle, on constate qu’il s’agit d’un instrument pour réaliser ses ambitions et ses rêves. C’est avec humanité et une pointe d’humour que Daniel Germain compte aborder les finances personnelles dans ce blogue, dont l’objectif est de vous informer et de vous faire réagir. Daniel Germain assume la direction du magazine de finances personnelles Les Affaires Plus depuis 2002 et a développé de vastes connaissances sur le sujet.