Qui est le vrai "boss"?

Publié le 17/10/2011 à 15:37, mis à jour le 21/10/2011 à 13:30

Qui est le vrai "boss"?

Publié le 17/10/2011 à 15:37, mis à jour le 21/10/2011 à 13:30

BLOGUE – Lorsque les mêmes personnes sont à la fois actionnaires, administrateurs et dirigeants de leur société, comment savoir quel « chapeau » doit prendre telle décision? Qui est le vrai "boss" d’une entreprise?

Au sein d’une PME, la plupart du temps se sont les mêmes personnes qui sont à la fois actionnaires, administrateurs et dirigeants de leur société. Pourtant la Loi sur les sociétés par actions du Québec (LSAQ), et avant elle la Loi sur les compagnies du Québec, distingue clairement le rôle que joue chacun de ces trois statuts.

Au moment de la création d’une société, il y a un jeu d’œuf et de poule : ce sont les premiers administrateurs qui émettent les premières actions en faveur des actionnaires, constatant ainsi leur droit de propriété sur la société (article 52 de la LSAQ), mais ce sont les actionnaires qui élisent le conseil d’administration (article 110 de la LSAQ).

Le Code civil du Québec (CcQ) précise qu’une personne morale a une personnalité juridique distincte de celles de ses membres (actionnaires) et que les actes qu’elle pose n’engagent qu’elle-même (article 298 et 309 du CcQ).

À l’article 311 du CcQ, il est indiqué qu’une personne morale agit par le biais de son conseil d’administration et de l’assemblée de ses membres et l’article 335 Ccq ajoute que « le conseil d'administration gère les affaires de la personne morale et exerce tous les pouvoirs nécessaires à cette fin ».

À moins que les actionnaires n’aient établi une convention unanime entre eux, c’est le conseil d’administration qui « exerce tous les pouvoirs nécessaires pour gérer les activités et les affaires internes de la société ou en surveiller la gestion » (article 112 de la LSAQ).

Ce même article ajoute : « Sauf dans la mesure prévue par la loi, l’exercice de ces pouvoirs ne nécessite pas l’approbation des actionnaires et ceux-ci peuvent être délégués à un administrateur, à un dirigeant ou à un ou plusieurs comités du conseil. »

Voici quelques exemples des gestes qui sont normalement posés par un conseil d’administration (article 115 de la LSAQ) : contracter des emprunts; émettre, réémettre, vendre ou hypothéquer ses titres de créance; la rendre caution de l’exécution d’une obligation d’une autre personne; hypothéquer tout ou partie de ses biens, présents ou futurs, afin de garantir l’exécution de toute obligation.

Le conseil d’administration peut également nommer les dirigeants de la société (article 116 de la LSAQ) et fixer leur rémunération (article 117 de la LSAQ).

Vous commencez à comprendre? Le conseil d’administration a un très grand rôle à jouer dans la gestion d’une entreprise.

Bien que les pouvoirs du conseil d’administration puisse être importants, la responsabilité qui leur incombe suit (et oui, comme dans Spiderman : With great power comes great responsability).

La section VI de la Loi sur les sociétés par actions du Québec s’intitule : La responsabilité des administrateurs. On y retrouve une liste de cas où la responsabilité personnelle des administrateurs peut être engagée.

Heureusement, l’article 158 de la LSAQ précise que la responsabilité d’un administrateur n’est pas engagée « s’il a agi avec un degré de prudence et de diligence raisonnable dans les circonstances ».

Cependant, l’administrateur, en tant que mandataire de l’entreprise (article 321 du CcQ), peut également engager sa responsabilité civile pour les gestes posés dans le cadre de ses fonctions. Par contre, pour être tenu personnellement responsable, il doit avoir soit outrepassé son mandat (article 2157 et 2158 CcQ) ou soit ne pas avoir respecté son devoir de prudence, de diligence, d’honnêteté et de loyauté (article 322 CcQ).

En résumé, puisque les administrateurs sont élus par les actionnaires, ils se doivent de gérer l’entreprise selon les désirs des propriétaires, sinon leur mandat sera révoqué. Mais les pouvoirs qu’ils peuvent et doivent exercés sont étendus.

La question demeure donc toujours : Qui est le vrai "boss"?

Les actionnaires ont tout intérêt à s’élire eux-mêmes administrateurs. Mais ce faisant, ils peuvent engager leur responsabilité personnelle.

Une façon d’alléger la gestion de l’entreprise serait de retirer un ou plusieurs pouvoirs au conseil d’administration pour les mettre entre les mains de l’assemblée des actionnaires (par le biais d’une convention unanime des actionnaires, dont je parlerai dans un autre billet).

Mais dans tous les cas, je recommande toujours à mes clients de souscrire à une assurance dite « erreur et omission », afin de protéger les membres du conseil d’administration, au cas où.

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Le droit est partout et se mêle de tout. Il régule nos vies et nos entreprises. S’il est mal compris ou négligé, il peut même aller jusqu’à nous nuire. Cette chronique, tenue par Me Catherine Morissette, avocate en droit des affaires chez Lévesque Lavoie, avocats, démystifie les différents aspects juridiques et d’actualité qui touchent le monde des affaires, afin de vous les rendre accessibles.

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