Un fiasco dont on parle peu

Publié le 30/09/2014 à 09:51

Un fiasco dont on parle peu

Publié le 30/09/2014 à 09:51

(Photo: Bloomberg)

J’ai parlé la semaine dernière du déclin du grand secteur des ressources naturelles depuis quelques années, plus particulièrement depuis 2011. De nombreux investisseurs, autant des pros que des individus, ont avalé comme du bonbon l’idée d’un supercycle des ressources, appuyé sur la demande incessante de la Chine.

Or, il y a un autre fiasco dont on parle peu, et lié également à la Chine et aux ressources et c’est la déconfiture du secteur des terres rares.

En novembre 2011, j’ai assisté à une conférence à New York qui m’a donné l’occasion de rencontrer plusieurs dirigeants d’entreprises. Un de ceux dont la présentation m’a le plus impressionné est le président de Molycorp, société du Colorado active dans l’extraction de métaux rares. Elle se dit la seule société au monde à fabriquer des métaux rares de très grande pureté tout en contrôlant sa ressource.

En passant, pour les ignorants comme moi qui se demandent ‹ C’est quoi des terres rares?›, ce sont des métaux comme l’yttrium, le gallium, l’indium et le rhénium qui servent à la fabrication de lasers, d’aimants et d’autres produits technologiques (le U.S Geological Survey dénote 15 éléments de terre rare qu’on peut retrouver dans la nature). Par exemple, l’europium est utilisé pour fabriquer votre écran d’ordinateur.

Outre ses éléments spécifiques et personnels, le président de Molycorp a bien mis en évidence la situation favorable de sa compagnie. Les États-Unis importent 90% de leurs métaux rares et la plupart de la Chine. Et en 2010, les Chinois ont tenté de prendre le contrôle de ce marché, misant sur leur domination. Ce qui a poussé le prix de plusieurs de ces matières à des niveaux jamais vus, certains explosant de plus de 600% en un seul trimestre.

Or, le président de Molycorp a bien mis en évidence la position stratégique de sa société, qui possédait des gisements dormant en raison des prix déprimés. Et l’intérêt stratégique d’avoir un producteur fiable et non chinois.

C’était une belle histoire, comme on dit souvent.

Je n’ai plus regardé ce titre jusqu’à la semaine dernière alors que je suis tombé sur une nouvelle à l’effet que Molycorp ait réalisé un financement de 400M$US avec Oaktree Capital Management. Cela a stimulé ma curiosité et je suis allé voir ce qu’avait fait la société depuis trois ans.

En novembre 2011, le titre se vendait dans les 40$, après un sommet à plus de 70$ en avril 2011. Au sommet, Molycorp avait une valeur boursière de plus de six milliards de dollars (G$) US pour une société qui n’avait pas vraiment de profits et seulement des projets.

Vendredi dernier, le titre se vendait 1,25$US pour une valeur boursière de 300M$US. La société a perdu plus de 90% de sa valeur en trois ans!

L’enthousiasme pour le secteur et ce titre en particulier a explosé en mille miettes. Le premier facteur est la baisse significative des prix de plusieurs de ces métaux. Par exemple, le prix du lanthanum a fondu de près de 90% entre 2011 et la fin de 2013. Celui du terbium plus de 60%. De plus, mettre en production un gros gisement de nos jours est long et coûteux. Assez long pour faire en sorte que les investisseurs finissent par perdre intérêt. Et la situation de Molycorp devient épeurante, la société ayant perdu 800M$US lors deux derniers exercices, après des investissements de plus de 1G$US. Le nombre d’actions a doublé et la société a maintenant un endettement élevé.

De l’euphorie à la déprime….l’histoire boursière se répète, se répète, se répète….

Bernard

Mooney

 

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