Blogue. Ce matin, les principaux indices américains étaient en baisse (au Canada, c’était congé) en raison du fait que le dollar américain s’appréciait par rapport aux autres devises. Pourquoi cette relation incestueuse entre la Bourse et la devise de nos voisins du Sud ?
Je suis convaincu que plusieurs se posent cette question. Et la réponse n’est pas simple. Il y a des raisons économiques et des raisons plus financières.
Depuis quelques années maintenant, la Federal Reserve, la banque centrale américaine, a une politique monétaire très accommodante, ce qui signifie entre autres des taux d’intérêt très bas. Ces taux déprimés encouragent les investisseurs à se départir du dollar américain. C’est en partie ce que désirent les autorités de la Federal Reserve.
En fait, un dollar qui baisse ajoute à la stimulation monétaire car cela favorise les exportations américaines. En plus des interventions directes de la Fed, des taux déprimés, on a donc une politique monétaire qui ne peut vraiment pas être plus accommodante.
Alors, lorsque le dollar américain s’apprécie, certains investisseurs interprètent cela comme un frein à la croissance économique, les exportations pouvant en souffrir. La politique monétaire du coup devient moins accommodante.
Mais ce n’est pas le principal facteur. Ce qui explique surtout cette relation est le mouvement des capitaux. Comme les taux d’intérêt sont très bas aux États-Unis, il est rentable d’emprunter en dollars américains pour investir ailleurs, selon des stratégies relativement spéculatives.
Par exemple, si je paie 1% ou 2% dans un emprunt à court terme et que j’investis dans un actif qui peut me procurer du 5% et plus, avec l’effet de levier, je peux faire beaucoup d’argent.
Ainsi, je peux par exemple acheter une autre devise (comme le dollar canadien) qui devrait profiter davantage de la reprise économique mondiale. Je peux acheter des actifs comme les ressources ou les marchés émergents qui en profiteront également beaucoup plus que les actifs américains. Etc.
Sauf que ces strategies ont une faiblesse : elles sont doublement frappées lorsque le contexte devient moins bon. En effet, lorsque l’économie montre des signes de faiblesse, les investisseurs sont portés à vendre leurs actifs «risqués» parce qu’ils craignent que leur valeur baisse. De plus, lorsque le dollar américain s’apprécie, ceux qui ont emprunté dans cette devise et ont investi dans une autre devise sont perdants. Il leur en coûtera plus cher pour rembourser leur prêt en dollars américains.
Ce qui magnifie le risque de perte.
C’est pour cela surtout, selon moi, que les investisseurs sont frileux et qu’au moindre signe de reprise du dollar US et/ou de ralentissement économique, ils sont portés à liquider leurs placements plus risqués.
La question devient : quand ce petit jeu financier malsain cessera? Quand les taux d’intérêt aux États-Unis retourneront à des niveaux plus normaux!
Bernard Mooney