La reprise boursière se poursuivra

Publié le 10/10/2009 à 11:24

La reprise boursière se poursuivra

Publié le 10/10/2009 à 11:24

Les six derniers mois du TSX. Graphique : LesAffaires.com

Notre chroniqueur Bernard Mooney voit de nombreux facteurs favorables à la poursuite du marché haussier.

"Je vous prédis que le prochain marché haussier vous surprendra." C'est ainsi que je terminais ma chronique intitulée "Mes conseils pour traverser la crise boursière" publiée au début de la tempête, il y a un an. Les Bourses nord-américaines ont rebondi de façon spectaculaire depuis leur creux de mars. À Toronto, l'indice S&P/TSX a gagné 52 %, et à New York, le S&P 500 a progressé de 59 %. Et la bonne nouvelle, c'est que les Bourses conservent un potentiel haussier intéressant à court et à long termes.

Les indices sont encore loin de leurs anciens sommets

De nombreux investisseurs sont convaincus que la Bourse a grimpé trop rapidement au cours des derniers mois et qu'une rechute est inévitable à court terme. Il ne faut pas sauter trop vite aux conclusions.

Le dernier mouvement baissier avait poussé les actions à des niveaux tellement bas que le rebond n'est en partie qu'un rattrapage normal.

De nombreux experts parlent d'un retour de la spéculation. J'ai moi-même réagi ainsi lorsque j'ai reçu une publicité d'une lettre financière américaine présentant la lancée de la Bourse de croissance de Toronto comme une belle occasion de s'enrichir rapidement.

Il est vrai que le TSX Croissance a regagné 87,6 % depuis son creux du 5 décembre 2008, pour s'établir à 1272 points le 29 septembre. Il n'en demeure pas moins que cet indice est encore de 57 % inférieur à son sommet de novembre 2007 !

Le même constat s'applique lorsqu'on compare le rendement des principaux indices par rapport à leurs niveaux des dernières années. Les Bourses ont encore une longue côte à remonter avant de retrouver leurs sommets. Par exemple, le S&P 500 doit encore gagner 50 % pour atteindre celui de 1576 points de la semaine du 8 octobre 2007. Et à 1060 points, le S&P 500 se retrouve au même niveau qu'en mars 1998, il y a plus de 11 ans de cela !

D'autres mouvements haussiers vigoureux

L'histoire enseigne que les nouveaux mouvements haussiers ont tendance à surprendre par leur vigueur et leur durée.

Selon les experts de Bank of America Merrill Lynch, il y a eu 13 épisodes durant lesquels le S&P 500 a explosé d'au moins 60 % - sans subir de correction - depuis les années 1930.

En moyenne, ces mouvements ont duré 817 jours sans subir une baisse d'au moins 10 %. Et la hausse moyenne du S&P 500 s'est établie à 97 % durant ces épisodes.

La reprise amorcée en mars dure depuis environ 200 jours. Si l'histoire se répète, la correction tant attendue pourrait ne pas se produire avant longtemps.

Il ne faut pas sous-estimer l'effet des efforts titanesques déployés par les banques centrales et les gouvernements. Il n'y a pas de carburant boursier plus puissant que les milliers de milliards de dollars injectés par les banques centrales et les plans de relance gouvernementaux, et des taux d'intérêt près de zéro.

De nombreux signes positifs

Les marchés financiers sont toujours les premiers à réagir. Et il y a de nombreux signes précurseurs d'une poursuite de la reprise boursière.

Premièrement, nous assistons à une nouvelle vague de premiers appels publics à l'épargne et d'émissions d'actions. Aux États-Unis, la semaine du 21 septembre a vu le plus grand nombre d'appels publics à l'épargne depuis décembre 2007.

Les mariages d'entreprises sont également revenus à la mode. En septembre, seulement dans le secteur de la technologie, il y a eu pour 28,3 milliards de dollars américains (G$ US) de fusions et acquisitions dans le monde, ce qui est deux fois plus qu'en septembre 2008.

C'est signe que les dirigeants d'entreprise jugent que le contexte s'améliore. Les sociétés ne misent pas des milliards de dollars lorsque l'économie se détériore.

Une fois la confiance revenue, ce n'est qu'une question de temps avant que les entreprises recommencent à investir et à embaucher, les deux conditions essentielles à la croissance économique. Le marché boursier voit poindre cette croissance à l'horizon.

Des masses de liquidités pour aider la Bourse

L'histoire nous montre aussi qu'il y a encore du potentiel à court terme. Ce potentiel repose sur plusieurs facteurs. Les politiques monétaires restent accommodantes, et la situation économique continue de s'améliorer. Mais surtout, d'abondantes liquidités sont toujours stationnées dans des comptes qui rapportent des intérêts dérisoires.

Les placements dans les fonds monétaires américains totalisaient 3 310 G$ US au 14 septembre. Ils ont diminué depuis le record de 3 575 G$ US atteint le 4 mai dernier, mais ils restent très élevés.

Les investisseurs institutionnels ont réduit leur encaisse de seulement 5 % par rapport au sommet de 2 562 G$ US du 1er juin. C'est un océan de liquidités qui ne fait que commencer à se déployer en Bourse. Les gestionnaires de caisses de retraite, comme la Caisse de dépôt et placement, qui ont réduit considérablement leur pondération en actions l'automne dernier et au début de 2009, doivent en racheter pour atteindre leurs objectifs de rendement à long terme. Chaque mini-repli boursier devient donc une occasion de revenir à la Bourse.

À long terme, le rendement de la Bourse repose sur les bénéfices et le prix que les investisseurs sont prêts à payer pour ces bénéfices. Les analystes prévoient des bénéfices par action totaux de 73 $ US pour le S&P 500 l'an prochain. Si les bénéfices progressent de 7 % par année - la moyenne historique -, ils atteindront 143,52 $ US dans 10 ans.

À un ratio de 15 fois le bénéfice, le S&P 500 pourrait s'établir à 2152 points dans 10 ans, soit un rendement annuel de 7,5 %, sans compter les dividendes. Un rendement attrayant si on le compare aux obligations.

Attention aux risques

Cela dit, il faut rester à l'affût des événements qui pourraient faire dérailler la reprise.

Un des plus grands dangers est que les stimulants gouvernementaux se révèlent inefficaces. Par contre, si nous assistons plutôt à une reprise économique vigoureuse, les taux d'intérêt remonteront, ce qui me semble le scénario le plus probable. La fin d'une politique monétaire accommodante au cours de l'année 2010 sera le signal, pour bien des investisseurs, que la première vague du marché haussier est terminée. Il y aurait alors une correction, mais le mouvement haussier se poursuivra par la suite.

Enfin, les économies industrialisées ont besoin d'une forte croissance en Asie. Des perturbations politiques et économiques en Chine pourraient être fort nuisibles aux Bourses occidentales.

 

Trois clés pour prospérer à long terme

La chute boursière et le rebond des derniers mois vous ont probablement fait perdre vos repères d'investisseur. Voici trois clés pour prospérer dans le contexte actuel.

1 Souvenez-vous de la crise Les réactions que vous avez eues au coeur de la crise financière devraient vous amener à réfléchir sur votre stratégie de placement. Vous avez vécu un test déterminant pour savoir si vous avez le tempérament d'un investisseur. Si la chute des indices vous a empêché de dormir, profitez du rebond pour réduire le poids des actions dans votre portefeuille, quitte à vous en départir complètement s'il le faut. Il n'y a pas de mal à réaliser qu'on n'est pas fait pour la Bourse.

2 Ayez des objectifs réalistes Ce que n'est pas parce que la Bourse a explosé de 15 % au troisième trimestre qu'il faut s'attendre à une telle progression dans l'avenir. Au contraire. Plus les Bourses progressent, moins il y a de potentiel haussier et plus vous devez être prudent. Viser des rendements boursiers de 8 à 10 % par année me semble réaliste. Si vous visez un rendement supérieur à 10 %, vous prendrez des risques démesurés.

3 Soyez discipliné Méfiez-vous des réactions émotives qui poussent à vendre trop tôt des titres en forte progression, de peur qu'ils rebaissent. Par ailleurs, il ne faut pas croire que le passé récent soit garant de l'avenir. De nombreux experts ont prédit la mort de l'approche de placement axée sur la conservation des titres à long terme - le buy-and-hold. Cette approche est discréditée en raison du rendement désastreux des indices boursiers depuis 10 ans. On lui préfère le market timing, qui consiste à vendre ses actions après avoir réalisé un certain gain pour les racheter plus tard. Selon moi, c'est précisément parce qu'elle est dénigrée actuellement que l'approche du buy-and-hold a de bonnes chances d'être celle qui offrira les meilleurs gains au cours des 10 prochaines années.

 

Cinq titres solides pour l'épargnant frileux

Vous êtes échaudé par la Bourse ? Voici une solution que plusieurs experts proposent pour profiter du potentiel haussier des prochaines années tout en réduisant les risques. Tournez-vous vers les grandes entreprises américaines; leurs titres ont peu profité du rebond boursier et demeurent bon marché, tout en étant d'une solidité à toute épreuve. En voici cinq qui sont souvent mentionnées. Le plus difficile sera d'avoir la patience de les conserver plusieurs années.

> Johnson & Johnson (NY, JNJ, 59,82 $ US) Le titre du géant des produits de soins de santé s'échange à 13 fois le bénéfice par action prévu en 2009, comparativement à 17 fois pour l'ensemble des titres de son secteur. C'est peu élevé pour une société qui affiche une rentabilité exceptionnelle, un bilan impeccable et verse un dividende qui procure un rendement annuel de 3,1 %.

> Berkshire Hathaway (NY, BRK. B, 3 260 $ US) Le titre du conglomérat de Warren Buffett s'échangeait à 4 500 $ US il y a un an et a chuté sous les 3 000 $ US au pire de la crise. Même si l'entreprise est dans une situation concurrentielle plus favorable que jamais, le titre n'a que peu progressé depuis mars et s'échange à un cours attrayant.

> Procter & Gamble (NY, PG, 56,40 $ US) Le titre du géant des produits de consommation a progressé de 27 % depuis son creux de mars dernier. Il reste toutefois attrayant en raison de son évaluation raisonnable - 13 fois le bénéfice prévu en 2009 -, de son rendement de dividende de 2,9 % et des liquidités abondantes que ses activités produisent. De plus, Procter & Gamble permet de profiter de l'essor de la classe moyenne dans les pays émergents et ses produits demeurent essentiels, même en période de récession.

> Pfizer (NY, PFE, 16,36 $ US) La société pharmaceutique a dû relever de nombreux défis depuis quelques années et est en train de se réinventer. Elle finalisera l'acquisition de Wyeth d'ici la fin de l'année, ce qui devrait lui donner un nouvel élan. Pfizer affiche un bilan solide. Son titre est peu cher et procure un rendement de dividende de 3,8 %.

> Philip Morris (NY, PM, 48,12 $ US) Philip Morris est un titre intéressant, si vous êtes à l'aise d'investir dans un fabricant de cigarettes. L'entreprise tire tous ses revenus de l'extérieur des États-Unis et figure parmi les sociétés les plus efficaces sur le plan de la gestion de ses capitaux. Son dividende procure un excellent rendement de 4,8 %.

 

Ce que les investisseurs ont appris

Dans le blogue que je tiens sur LesAffaires.com, j'ai demandé aux lecteurs quelles leçons ils retenaient de la crise financière des derniers mois. Voici quelques-unes des réponses.

"Cette crise m'a permis de renforcer des principes de base qu'on a tendance à négliger quand on voit la possibilité de faire de l'argent facilement quand tout est rose ! Des principes comme acheter des titres d'entreprises en bonne santé, peu endettées et versant un dividende raisonnable; surveiller les occasions d'achat quand nos titres baissent de façon injustifiée et toujours garder de l'encaisse pour en profiter." - Yves S.

"Si je peux me permettre une métaphore, la crise m'a tout simplement confirmé ce que je pensais déjà : il vaut mieux bâtir des maisons en brique qu'en paille." - Philippe C.

"Le grand principe de base est d'acheter de bonnes sociétés à bas prix; au printemps, on a eu la meilleure occasion de le faire depuis belle lurette." - Michel

"J'ai appris de ne plus jamais accepter les idées reçues, comme celle voulant que la Réserve fédérale et la Banque du Canada veillent sur l'économie et que leurs interventions vont nous empêcher de sombrer dans les récessions, qu'elles vont nous protéger de l'inflation. Ou encore, qu'investir en Bourse est toujours gagnant sur le long terme. Il faut se faire une opinion par soi-même." - Martin

"Je suis loin d'avoir récupéré toutes mes pertes. Ce que j'ai appris, c'est que ça descend plus vite que ça remonte." - Bernard Seméteys "J'ai appris qu'il fallait diversifier son portefeuille, mais j'avoue avoir un peu joué à la Bourse quand, en fait, il faut y investir. J'ai racheté à la baisse des titres que j'avais et je les ai revendus à leur remontée, mais en gardant une certaine quantité pour maintenir un portefeuille diversifié. L'important est d'avoir une encaisse et ne pas investir de l'argent qu'on n'a pas." - Louis Cadotte

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