Cette succession délicate

Offert par Les affaires plus


Édition de Juin 2019

Cette succession délicate

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Édition de Juin 2019

Quand elle implique une personne ayant une déficience intellectuelle, la planification successorale gagne en complexité.

Avoir la responsabilité d'une personne ayant une déficience intellectuelle n'est pas de tout repos. Lorsque vient le moment de préparer sa planification successorale, l'angoisse s'installe. Il faut alors nommer quelqu'un qui prendra notre relève, autant pour les décisions personnelles que financières concernant cette personne à charge.

De plus, il y a l'héritage. Comment laisser de l'argent à quelqu'un qui est inapte à l'administrer ? Il faut prévoir la création d'une fiducie dans son testament. Une fiducie testamentaire est une entité juridique qui sera créée au moment du décès de la personne responsable. Une fois dans la fiducie, l'argent laissé en héritage sera géré et administré par un fiduciaire. Une société de fiducie ou une personne en qui vous avez confiance peut jouer ce rôle. L'important est de lui laisser des instructions précises relativement à l'utilisation de l'argent au bénéfice de la personne à protéger.

Sous un angle fiscal, les revenus gagnés dans une fiducie testamentaire sont normalement imposés au taux maximal, ce qui n'est pas très avantageux. Quand le bénéficiaire est une personne handicapée qui reçoit le crédit d'impôt pour personnes handicapées (CIPH), les revenus générés dans la fiducie profiteront des taux d'imposition progressifs, comme ceux d'un contribuable.

Il n'est donc pas nécessaire, dans ce cas, de prévoir une obligation de verser tous les revenus de la fiducie à son bénéficiaire. Si la personne handicapée reçoit de l'aide financière en vertu du programme de solidarité sociale, il sera important que le texte créant la fiducie soit rédigé de façon à laisser le choix et la discrétion au fiduciaire de distribuer le capital et les revenus de la fiducie quand bon lui semblera. Cela lui laissera la latitude nécessaire pour éviter que le bénéficiaire devienne inadmissible au programme d'aide financière et perde les autres privilèges réservés aux prestataires.

Il est aussi possible que le legs soit versé directement dans le régime enregistré d'épargne-invalidité (REEI) ouvert pour la personne handicapée. Semblable au régime enregistré d'épargne-études (REEE), le REEI est accessible aux personnes handicapées qui reçoivent le CIPH. Contrairement à un REEE, les cotisations faites à un REEI appartiennent au bénéficiaire, et non au souscripteur. Le régime permet des cotisations maximales à vie de 200 000 dollars et peut recevoir des subventions gouvernementales fédérales totalisant 70 000 dollars (voir encadré pour plus de détails sur ce régime).

L'utilisation du REEI en planification successorale peut donner droit à un autre avantage fiscal. En effet, si l'héritier était financièrement à la charge du particulier décédé au moment du décès, il est possible de «rouler» une somme provenant du REER du défunt, sans impact fiscal, vers le REEI. Un tel transfert peut représenter une économie d'impôt pour la succession du défunt d'environ 50 % de la valeur du REER.

Ce transfert ne donne cependant pas droit à la subvention canadienne pour l'épargne-invalidité ni au bon canadien pour l'épargne-invalidité. Par contre, l'argent transféré pourra continuer de croître à l'abri de l'impôt à l'intérieur du REEI.

Une cotisation faite à un REEI se retire sans impact fiscal. Seuls les bons, les subventions et les revenus de placement sont imposables au moment du retrait. À cela s'ajoutent les sommes qui auraient été transférées dans le REEI.

La planification d'une succession impliquant une personne ayant une déficience intellectuelle peut être complexe. Il est toutefois possible de trouver une solution avantageuse sur les plans fiscal et financier pour protéger cette personne.

Le régime enregistré d’épargne-invalidité en bref

• Il est permis de cotiser jusqu’à 200 000 dollars à vie dans un ­REEI.

• Les cotisations à un ­REEI ne sont pas déductibles d’impôt et peuvent être versées dans le régime jusqu’à la fin de l’année où le bénéficiaire atteint l’âge de 59 ans.

­• Les cotisations appartiennent au bénéficiaire (donc à la personne handicapée).

­• Les cotisations donnent droit à des subventions pouvant atteindre 70 000 dollars.

­• La subvention canadienne pour l’­épargne-invalidité et le bon canadien pour l’­épargne-invalidité sont payables annuellement selon les cotisations faites au régime et l’admissibilité, et peuvent atteindre 300 % de la cotisation annuelle faite au régime.

­• La subvention annuelle maximale est limitée à 3 500 dollars (atteinte avec une cotisation de 1 500 dollars).

­• Afin d’optimiser les subventions, il est préférable de bien répartir ses cotisations sur plusieurs années.

­• Le revenu sur les subventions et les bons croît à l’abri de l’impôt.

• Dans certains cas, il peut être possible de transférer, sans impact fiscal, le ­REER d’un proche parent dans le ­REEI lors du décès du parent.

À propos de ce blogue

Annie Boivin, fiscaliste et planificatrice financière de formation, compte plus de 25 années d’expérience dans le domaine des services financiers. Elle est directrice générale de la planification fiscale et successorale chez Samara bureau multifamilial. Coauteure du livre «Tomber à la retraite», elle est experte invitée régulière dans le magazine «Les Affaires Plus».

Annie Boivin

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