Réponse aux commentaires sur un blogue de Vézina

Publié le 03/02/2010 à 22:29

Réponse aux commentaires sur un blogue de Vézina

Publié le 03/02/2010 à 22:29

Par Paul Dontigny Jr

Je réponds à une suite de commentaires "m'incriminant" sur un blogue de Monsieur René Vézina.

Certains le voient comme un éternel optimiste et moi comme un éternel pessimiste.  Dans les deux cas c'est faux ... et la seule chose qui compte réellement ici est que tous apprennent quelque chose de nos discussions. 

Je vous suggère de lire son article (cliquez ci-dessus) et les divers commentaires avant de lire ma réponse, qui peut toutefois être lue aussi sans intro :

Monsieur Vézina,

j'ai dit depuis octobre 2008 qu'il y aurait de violents rebonds de l'ordre de 10%, 20% et même 50%  et possiblement plus.  J'ai aussi dit que je n'y participerais que si je voyais qu'on réglait les sources de la crise et de la faiblesse économique et que l'on effectuait de réels changements structuraux qui règleraient les véritables problèmes. 

Ceci n'a été fait d'aucune manière, mis à part peut-être GM-Chrysler et les récentes propositions d'Obama au sujet des institutions financières. 

Je fais rarement des "prédictions court terme" car je connais bien mon incapacité à prédire le futur.  mais je fais parfois des commentaires avec une plus grande confiance en catégorisant le risque : comme je l'ai fait récemment en disant que le Bull Market était terminé (j'ai aussi parlé du grain de sel avec lequel prendre la précision et la synchronisation de cet énoncé - voir mes chroniques Vidéo). 

Mais là où je suis catégorique : nous avons des problèmes d'endettement pratiquement jamais égalés dans l'histoire; les pertes immobilières ne sont pas terminées; les pertes non réalisées de produits dérivés sur les bilans des institutions financières (cachées de notre vue) et de d'autres corporations sont énormes (probablement plus de 1 500$ milliards); le taux de chômage est plus élevé que ce qui est annoncé car seulement en décembre, 600 000 travailleurs sont "sortis du système et des statistiques" car ils ont excédé la période de bénéfices du chômage; le marché boursier est très cher selon les normes historiques et aussi très cher selon une évaluation économique (valeur présente des cash flow futures ajustés pour le risqué); il y a un risque systémique dans les marchés financiers et i lest probablement pire qu’il y a 2 ans …

Ils vont annoncer probablement vendredi matin que 800 000 pertes d’emplois doivent être ajoutés aux pertes annoncées en 2009 – cet estimé a été annoncé depuis un mois dans plusieurs lettres financières.

Dans ce contexte d’endettement et de surconsommation excessive généralisée, je peux affirmer avec confiance que le risqué est énorme et qu’il ne vaut pas la peine de spéculer dans les actions.

Je peux aussi affirmer que l’année de calendrier ne devrait pas être un critère de référence pour évaluer le succès des Investissements qui se font sur 5 ans (la stratégie doit être base sur une logique qui tient compte des scenarios possibles sur 5 ans, et des probabilités subjectives analysées par le gestionnaire que chaque scenario se produise.

J’affirme aussi que la volatilité mensuelle réalisée de la dernière année n’est jamais un estimateur statistiquement spécifié du risqué que l’on a pris un an auparavant.

Et j’affirme, je le crie, que si les investisseurs acceptaient plus de manquer le bateau plus souvent (ne pas tenter de “jouer” les rebonds ou les spéculations trop chères” ils obtiendraient à long terme de meilleurs rendements, auraient payé moins de frais et de commissions, et auraient été moins nerveux, tout en ayant réellement pris moins de risqué.

J’ajouterai que si les institution, les médias et les gouvernements acceptaient de laisser l’économie faire ses ménages de temps à autre au lieu de pousser l’illusion que nous pouvons croître indéfiniment à chaque trimestre, et que l’investisseur peut sans effort (avec un simple portefeuille 75% en actions et 25% en obligations) obtenir des rendements tels qu’il pourra remplacer 30 ans de salaire avec ses revenus de placement, si nous acceptions de modérer le pas, de prendre du recul, de bâtir des bases un peu plus solides … si on acceptait d’investir en prenant des risques d’affaires sur 5 ans au lieu de tenter de spéculer sur marge à chaque 3 ou 12 mois, alors les développements technologique et le progrès seraient aussi grands mais nous ne créerions pas de crise.

N’oublions pas une chose :  la crise actuelle est avant tout financière, causée par un gang de banquiers et de courtiers à qui on a donné la permission de créer un effet de levier pour spéculer si énorme qu’il dépasse la taille même des gouvernements et des autres institutions qui nous sortent habituellement des crises.  Les investisseurs institutionnels n’y ont vu que du feu, aveuglés par l’illusion de richesse et subjugués par la possibilité de bonis extravagants et sans risques pour eux. 

On parle ici de quelques centaines de personnes à la base de la folie, et de quelques milliers contaminés par cette orgie spéculative sans risque pour les « skimmers », ces dirigeants de corporations publiques qui s’émettaient à eux-mêmes (et encore) des options gratuitement, qui se donnaient littéralement de 1% à 10% d’énormes compagnies publiques, sans mise de fonds et sans risque.

Monsieur Vézina, je crois fermement que l’histoire se répète et que de tels excès, de tels déséquilibres dans l’économie, les marchés et la polarisation des richesses et des revenus est insoutenable.  Seul un retour aux moyennes, aux normes, seule une crise financière et économique peut nous ramener à l’ordre, à l’équilibre, aux investissements à risque raisonnable qui peuvent procurer un rendement potentiel de 9% annuel à long terme.

Encore faudrait-il que les illusionnistes cessent de tenter cacher la réalité, cessent de tenter de convaincre la population que tout va bien, que la crise est finie et que la récession est enterrée … et que s’ils n’investissent pas tout de suite, il sera trop tard.  Ces illusionnistes sont nombreux par contre, et je suspecte fortement qu’ils détiennent des actions… ou attendent des votes, ou ont peur de perdre leur emploi, ou sont endettés, ou encore, qu’ils croient vraiment que de prendre une pause pour recharger les batteries est une mauvaise chose.

Alors, for the record, je recommande encore la PRUDENCE EXTRÊME et cela plus que jamais.  Arrêtez d’avoir peur de manquer le bateau.  Et arrêtez donc de focaliser sur les fluctuations des prix en bourse … focalisez plutôt sur l’évaluation économique et achetez ce qui a un risque d’affaires raisonnable, à prix raisonnable.

C’est très simple.  Et très difficile à faire.  Je vous garanti une chose, c’est que ça prend de la discipline et du jugement, de la patience, une grande tolérance à la douleur, et une grande confiance justifiée en votre méthode d’évaluation et votre approche à l’investissement. 

Finalement n’oubliez pas cet ordre des choses :

1-      Principes d’investissement

2-      Opinions

3-      Création d’un portefeuille en fonction de 1 et 2, et en fonction du risque de se tromper dans ses opinions.

Si vous avez des principes d’investissements simples et éprouvés et de bonnes opinions, encore faut-il trouver les véhicules d’investissement qui permettent d’en profiter.  Il est crucial d’être conscient que nous ne pouvons pas prédire le futur.  Ceci nous permet d’avoir le courage de manquer des hausses sans que ça ne nous dérangent car nous savons que nous gérons avant tout le risque.

Gérez le risque en premier et le rendement potentiel en second, et vous maximiserez ainsi le rendement.

Nous sommes dans la plus grande crise financière mondiale de l’histoire. 

Et elle est loin d’être terminée. 

Ne l’oubliez pas.

Paul Dontigny Jr, M.Sc., CFA

 

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