La croissance d'Uber à Montréal, vue par son DG

Publié le 17/09/2014 à 07:00

La croissance d'Uber à Montréal, vue par son DG

Publié le 17/09/2014 à 07:00

Avec ses 1 500 employés, ses 300M$1 de revenus annualisés, ses 207 villes d'implantées sur tous les continents et sa valorisation de 18,2G$, Uber n’est plus la petite start-up qui dérange l’industrie du taxi : elle est devenue un véritable Goliath. Pour mieux comprendre l’ascension de l’enterprise à Montréal, j’ai eu une discussion avec Jean-Nicolas Guillemette, le Directeur-général d’UBER. Portrait d’un entrepreneur et de la croissance d’une entreprise typique de la région du “Bay Area” à San Francisco.

De l’entrepreneurship à l’intra-preneurship
Jean-Nicolas Guillemette a démarré sa carrière en affaires chez SECOR comme consultant, après quoi il a complété son MBA à la prestigieuse école de l’INSEAD à Paris. À son retour en 2010, il a eu la piqûre pour l’entrepreneurship et a décidé de fonder TransacXion avec deux partenaires américains, une startup qui met en marché une plateforme technologique destinée au secteur du financement commercial (trade financing).

Après 3 ans de développement, Jean-Nicolas a décidé de quitter son entreprise après avoir réalisé qu’il n’avait plus autant de plaisir qu’au démarrage : la croissance n’était pas encore au rendez-vous et, dans les derniers temps, les déplacements devenus trop fréquents l’éloignaient de sa famille nouvellement fondée.

Les leçons principales tirées de son expérience comme entrepreneur :
1. Trouver le ou les bons partenaires de départ (forces complémentaires, alignement sur les mêmes valeurs et objectifs)

2. Préserver les valeurs de départ :

1. avoir du plaisir

2. faire une différence

3. faire de l’argent

4. garder les valeurs dans cet ordre-là

Jean-Nicolas a ensuite exploré une opportunité d’affaires dans le secteur manufacturier, jusqu’à ce qu’il soit approché par Uber à l’automne 2013. “À l’époque, je n’étais pas prêt à prendre un boulot de DG pour quelqu’un d’autre; si ce n’était pas ma business, ça ne m’intéressait pas. En parlant à d’autres DG embauchés par Uber ailleurs, j’ai tout de suite compris que ce n’était pas un job. Tu es comme un entrepreneur dans une start-up.” La majorité des DG ont un profil similaire à celui de Jean-Nicolas, avec une formation en affaires et une expérience d’entrepreneurship.

Jean-Nicolas a commencé à travailler chez Uber, 3 jours avant le lancement du 13 novembre 2013. "Nous étions seulement 2 au début pour le lancement à Montréal, accompagné d’un collègue de Toronto qui avait de l’expérience en lancement de villes."

La culture entrepreneuriale d'Uber
Uber a une culture d’affaires typique de la côte ouest américaine : on favorise l’initiative, la prise de décision et l’action rapides, l’agressivité dans la commercialisation, la pression d’être toujours le “first-mover” et le développement centré sur les usagers et les données.

Jusqu’en 2013, Uber était véritablement structurée comme une start-up avec des employés qui assumaient toutes sortes de fonctions : le COO de l’entreprise (Ryan Graves) s’occupait des RH, des opérations, de la gestion de la croissance et du lancement dans les villes.

Or, avec la croissance rapide depuis le début de l'année et l'embauche de plusieurs vice-présidents seniors (Ex: David Plouffe, ancien directeur de campagne de Barak Obama), Uber devra faire attention de ne pas perdre sa fibre entrepreneuriale : “Si vous souhaitez qu’Uber continue de réussir, il faut laisser les entrepreneurs que vous avez embauchés faire leur métier. Si tu me dis comment diriger ma business, ça ne marche plus.” Le sentiment d’appartenance des DG de chaque ville est très fort : “Je ne fais aucune distinction entre ce que je fais en ce moment pour Uber et ce que je faisais avant dans ma business. Pour moi, Uber c’est ma business."

Sans doute qu’avec ses 500 employés au siège social (les autres étant répartis dans les 207 villes), la taille commence à poser un défi dans le maintien de la culture initiale de la start-up.

Une croissance forte à Montréal
À son lancement à Montréal, Uber a connu un des taux d’adoption les plus élevés parmi les 49 autres villes où l’entreprise avait lancé précédemment. Ceci s’explique par la présence d’une base de technophiles très forte qui avait déjà utilisé l’application dans d’autres villes, avant qu’elle ne soit lancée à Montréal.

Uber ne fait aucun achat média à Montréal pour promouvoir son service. Le seul moyen de publicité est le référencement par le biais de ses usagers. Or, c’est un mix de relations avec les médias et de références qui a fait lever la demande à Montréal. “On a quand même du chemin à faire du côté de la notoriété au Canada par rapport aux États-Unis. Dans le marché américain, il y a 1 000 articles par semaine sur Uber dans les médias alors qu’au Canada c’est plutôt 3 articles par semaine.”

Jusqu’à date, l’entreprise a su bénéficier de la controverse survenue dans la plupart des villes où elle s’est implantée. En juin dernier, il y a une eu grève des chauffeurs de taxis dans certaines grandes villes européennes dont Londres, où l’événement a généré une augmentation de 850% des téléchargements de l'application en une seule journée!

"Notre approche du marketing ne va pas du tout dans le sens du marketing traditionnel. C’est l’expérience du produit qui prime. Une fois que tu l’as essayé, tu l’adoptes. On donne aux gens ce qu’ils souhaitent avoir depuis des décennies. Le taxi est une industrie très mal desservie depuis trop longtemps. À voir le nombre de plaintes sur les chauffeurs de taxis qui a été publiées dans les médias en septembre, on vient confirmer ce fait."

La croissance rapide s’explique également par le fait que, contrairement aux villes précédentes, Uber a décidé d’entrer dans le marché montréalais uniquement avec son service de taxi, versus la voiture de luxe (“Black car”). Le taxi étant plus grand public que la limousine, il est donc normal que la demande ait été plus forte dès le départ.

La raison de ce choix a été motivée principalement par le fait que le nombre de limousines disponibles à Montréal est faible comparativement aux autres grandes villes nord-américaines. Et la majorité de ces voitures est concentrée sur l’aéroport de Montréal. "Nous recevons chaque semaine plusieurs courriels d'usagers qui veulent ce type de service, mais actuellement nous ne pouvons pas desservir les montréalais."

Enfin, Jean-Nicolas ajoute quelques facteurs clés derrière la croissance d’Uber à Montréal :
- le paiement mobile par le biais de l’application, qui n’existait pas encore à Montréal

- le délai d'attente d’une voiture (en moyenne 3 min), qui a été réduit dû à la facilité d’usage de l’application mobile

- le délai de réponse aux problèmes vécus par les usagers qui est à l’intérieur de 6 heures (uniquement par courriel)

Avec son offre dans le segment du taxi, Jean-Nicolas souhaite faire croître le marché d’utilisateurs mensuels de taxi. Uber a d’ailleurs déjà contribué à la croissance de l’usage du taxi par :
- la fréquence d’usage mensuel au sein du segment qui utilise déjà le taxi et qui possède un téléphone intelligent

- l’acquisition de nouveaux usagers du taxi, c’est à dire ceux qui ont des téléphones intelligents et qui n’utilisaient pas le taxi auparavant

Un sentiment d’accomplissement
Avec près d’un an passé à développer des parts dans le marché montréalais, Jean-Nicolas reconnait qu'il y a encore beaucoup de chemin à faire, mais estime avoir déjà entamé la révolution: “Je n’ai jamais eu autant d’énergie! J’ai la certitude qu'Uber révolutionne l’industrie du transport. C’est cool de participer à ça.”

"Notre objectifs dans 5 à 10 ans c'est de créer, avec les autres mode de transports, une offre de mobilité durable unique pour les montréalais. Tu peux prendre le métro et Bixi pour aller au travail, mais si tu prends Car2Go pour aller prendre un verre, tu reviendras fort probablement en taxi.”

1 Ce chiffre est un estimé produit par les observateurs de l'industrie. Uber ne divulgue pas ses résultats.

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