Tuer une société avant de l'acheter

Publié le 03/11/2012 à 00:00, mis à jour le 01/11/2012 à 09:49

Tuer une société avant de l'acheter

Publié le 03/11/2012 à 00:00, mis à jour le 01/11/2012 à 09:49

Dans mon plus récent livre, Maîtrisez les démons de la Bourse, j'explique de nombreuses techniques pour améliorer sa sélection de titres, réduire ses erreurs et améliorer ses rendements. Je viens d'en découvrir une autre, le pré-mortem.

Tout le monde connaît le concept du post-mortem : appliqué à la Bourse, il signifie qu'après avoir fait un mauvais placement, vous vous assoyez et vous tentez de cerner les causes de votre erreur. L'objectif est de tirer des leçons et d'améliorer votre processus de sélection.

Cette réflexion peut montrer que vous n'avez pas tout à fait respecté votre méthode. Ou que, même si vous avez bien fait vos devoirs, en respectant fidèlement votre processus de placement, vous avez tout de même commis une erreur. Si c'est le cas, vous n'avez rien à y changer. Vous pouvez aussi découvrir des failles dans votre façon de choisir vos titres, ce qui peut servir à vous améliorer.

Se transporter dans le futur

Le post-mortem est une technique très populaire, utilisée dans de nombreuses disciplines, notamment en journalisme.

Le pré-mortem vous permet de faire le même genre d'exercice, mais avant d'avoir investi le moindre dollar. «Transportons-nous dans le futur, disons dans trois ans, et ce placement aura mal tourné. Écrivons alors un court texte pour en décrire les raisons.» C'est en ces termes que Michael Mauboussin, stratège chez Legg Mason, expliquait cette technique qu'il a empruntée du psychologue social Gary Klein, qui a beaucoup travaillé sur la prise de décision. Vous pouvez même écrire un petit texte décrivant les motifs pour lesquels la société visée a mal performé.

L'idée est d'utiliser son imagination pour se transporter dans le futur et d'imaginer le pire.

Par exemple, supposons que vous envisagez Bombardier comme placement. Vous avez analysé ses activités, sa performance passée, ses perspectives et son évaluation. Vous êtes pratiquement prêt à acheter, le titre répondant à vos plus importants critères de sélection.

Avant de passer à l'action, vous décidez de faire un pré-mortem. Vous vous imaginez en octobre 2015 : votre placement a été un désastre, le titre ayant perdu 60 % de sa valeur. Que s'est-il passé ?

Et là, vous faites la liste de tout ce qui pourrait provoquer une telle dégringolade - les premiers essais de son nouvel avion, après de nombreux retards, ont montré plusieurs faiblesses, la société a vu son carnet de commandes fondre, ses ventes d'avions d'affaires ont baissé, elle a dû renflouer ses caisses de retraite, etc.

L'idée, en faisant ce genre de remue-méninges, est de cerner des risques dont vous n'avez peut-être pas tenu compte dans votre analyse ou que vous avez sous-estimés.

Investir en étant conscient des risques

Selon Gary Klein, les recherches montrent que cette projection dans l'avenir génère jusqu'à 30 % plus de facteurs ou variables pouvant influencer la décision.

Une fois que vous avez défini ces éléments, c'est à vous de les évaluer, en commençant par la probabilité qu'ils surviennent vraiment, leur impact, etc.

L'idée n'est pas de tenter de trouver une société qui ne présente aucun risque, mais justement d'investir les yeux ouverts, en étant conscient des risques comme du potentiel. Un important problème des investisseurs est précisément qu'ils laissent l'enthousiasme embrouiller leur jugement. Le pré-mortem est une bonne technique pour contrecarrer cette tendance.

Cette technique me rappelle l'approche de Bruce Berkowitz, gestionnaire des fonds Fairholme. Ce dernier mentionne qu'avant d'acheter des actions d'une entreprise, il tente toujours de la détruire. Il se demande : puis-je tuer cette société ?

M. Berkowitz tente ainsi d'imaginer tous les scénarios pouvant mener à la disparition de la société, comme l'arrivée d'un nouveau concurrent puissant, une guerre de prix, une récession grave, etc.

Si sa société est capable de résister aux pires scénarios, bingo ! il a probablement un titre intéressant à acheter. À l'opposé, s'il est capable de la détruire, cette entreprise a peu d'avantages concurrentiels durables.

Par exemple, selon M. Berkowitz, McDonald's ne mourra pas si une autre fait de meilleurs hamburgers. Par contre, une société qui serait capable d'inventer un meilleur algorithme de recherche pourrait mettre en péril Google.

La différence entre le pré-mortem et l'approche de M. Berkowitz, c'est que ce dernier veut savoir ce qui pourrait faire disparaître la société visée. Tandis qu'en ayant recours au pré-mortem, vous vous situez dans le futur avec un placement qui n'a pas été une réussite, et vous tentez d'imaginer à l'avance ce qui n'a pas fonctionné. Cette dernière approche est moins extrême.

DE MON BLOGUE

Bourse

Oups ! Les profits baissent, que faire ?

La saison des bénéfices déçoit les investisseurs. Ils semblent surpris par la faible croissance des bénéfices et des revenus. Je suis étonné de leur stupéfaction.

Un peu moins de la moitié des sociétés du S&P 500 ont jusqu'ici publié leurs résultats pour le trimestre clos le 30 septembre. Dans l'ensemble, il y a un peu plus d'entreprises qui ont déçu qu'à l'habitude. Un plus grand nombre ont publié des revenus décevants, confirmant ce que tous les investisseurs savaient déjà : avec une économie qui croît à peine à un rythme annuel de 2 %, accroître son chiffre d'affaires est tout un défi.

Si je suis surpris de la réaction des investisseurs, c'est parce que toute la planète financière a été avertie que les résultats du trimestre seraient décevants. Ce trimestre sera vite oublié.

Vos réactions

«Je ne suis pas surpris. Ça fait au moins depuis 2007 que les "grandes" entreprises compriment leurs dépenses, surtout en congédiant leurs travailleurs et en ne procédant pratiquement à aucune nouvelle embauche.»

- dencour

«Cette croissance par la négative a créé de la complaisance dans le marché. Les entreprises assez grandes pour réduire leurs frais ont tiré le marché à la hausse et bien du bois mort qui ne le méritait pas.»

- berixyz

blogue > www.lesaffaires.com/bernard-mooney

bernard.mooney@tc.tc

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