Obligations : un refuge à éviter

Publié le 01/06/2013 à 00:00, mis à jour le 30/05/2013 à 09:41

Obligations : un refuge à éviter

Publié le 01/06/2013 à 00:00, mis à jour le 30/05/2013 à 09:41

Au moment où les principaux indices boursiers atteignent des sommets après des hausses significatives cette année (le Dow Jones s'est apprécié de 17 % jusqu'à maintenant et le S&P 500, de 16,8 %), plusieurs investisseurs craignent une correction ou pire.

Or, le plus grave danger financier n'est pas à la Bourse, mais bien dans le marché obligataire. C'est là que risque de survenir le prochain désastre lorsque les taux d'intérêt amorceront leur remontée. C'est donc une grave erreur de vendre ses actions pour se réfugier dans les obligations.

Ainsi, après 30 années de baisse, les taux d'intérêt des obligations ne peuvent plus reculer, ce qui diminue leur potentiel et augmente leur risque. Les obligations du gouvernement américain venant à échéance dans 10 ans procurent un rendement de moins de 2 % ; celles de deux ans, de 0,25 %.

Si vous achetez des titres de dette du gouvernement américain de cinq ans, votre récompense sera un rendement annuel de 0,83 %. C'est inférieur au taux d'inflation, ce qui signifie qu'avant même de considérer les impôts, vous êtes assuré de perdre votre pouvoir d'achat.

Ce n'est pas beaucoup mieux au Canada. Les obligations gouvernementales de cinq ans procurent un rendement de 1,36 % et celles de 10 ans, de moins de 2 %.

Malgré ces rendements anémiques, épargnants, investisseurs et institutions ont déplacé des centaines de milliards de dollars vers les obligations depuis 2010. Jusqu'à tout récemment, l'argent provenait de la vente d'actions. Une grande partie de ce capital s'est dirigée vers les obligations pour les mauvaises raisons.

En effet, ces titres ont souvent été achetés parce que les investisseurs craignaient le contexte financier en général et le marché boursier en particulier. Le rendement était le cadet des soucis.

Ce comportement irrationnel explique la popularité des obligations, alors qu'elles se vendent à un prix exorbitant. Une obligation procurant un rendement de moins de 2 % est l'équivalent d'un titre boursier à plus de 50 fois les bénéfices.

Vers les obligations de pacotille

Depuis quelques trimestres, les investisseurs ont déplacé leurs achats, des obligations gouvernementales vers les obligations de société de moindre qualité, à la recherche d'un rendement un peu plus élevé. Cela pourrait réserver de mauvaises surprises.

En effet, les obligations de pacotille offrent actuellement le rendement le plus faible de tous les temps. Ainsi, l'indice Barclays des obligations de sociétés américaines à rendement élevé a atteint un creux historique le 7 mai, à 4,97 %. Le rendement de cet indice a reculé de plus de 1 % cette année.

Et vous savez quoi ? Plus le rendement baisse, plus la demande augmente ! Les émissions d'obligations de société ont atteint des records en 2012, et il y a eu plus de 150 milliards de dollars américains en émissions jusqu'à maintenant en 2013, selon Dealogic.

Je ne crois toujours pas que la hausse des taux d'intérêt soit pour demain, mais l'heure fatidique approche.

La reprise économique aux États-Unis est plus solide, plus profonde et diversifiée grâce à la contribution du secteur de la construction résidentielle. Résultat : l'économie américaine crée 175 000 emplois par mois.

Il n'est donc pas surprenant que la confiance reprenne, autant dans les foyers que dans les marchés financiers.

Voilà toutes des conditions qui présagent une hausse des taux.

La Réserve fédérale, la banque centrale américaine, s'est donné le mandat clair de maintenir sa politique d'accommodation monétaire jusqu'à ce que le taux de chômage soit de 6,5 %. Avec un taux de chômage à 7,5 % en avril, on n'est pas encore arrivé à ce point. Toutefois, à mesure que l'emploi s'améliore, on approche du moment où la Fed n'aura plus besoin de stimuler autant l'économie.

Lorsque ce sera le cas, tout le monde risque de vouloir vendre en même temps. Ce qui provoquerait un choc majeur.

Si vous voulez avoir une idée du risque de la baisse du prix des obligations, tenez compte du fait que, historiquement, les obligations américaines de 10 ans ont offert un rendement de 2 % à 4 % supérieur au taux d'inflation fondamental (en excluant l'énergie et les aliments). Ce qui signifie des rendements de 3,7 à 5,7 % avec l'inflation actuelle, par rapport au rendement de 1,93 %. Un rendement de 5 %, par exemple, signifierait un écroulement majeur des prix. Le rendement d'une obligation est inversement proportionnel à son prix.

Une telle hausse des taux serait une grave menace pour le marché boursier. Toutefois, les secousses boursières ne devraient pas être majeures, parce que les titres sont déjà évalués comme si les taux à long terme étaient à 5 % ou 6 %. De plus, il est certain qu'une grande partie du capital qui a trouvé refuge dans les obligations ces dernières années se retrouvera en Bourse, aidant le marché haussier à se poursuivre.

Une chose est certaine : les obligations ne sont pas un refuge.

DE MON BLOGUE

Bourse

Que le doute soit avec vous

L'assemblée annuelle de Berkshire Hathaway, la société de Warren Buffett, s'est très bien passée. Il y avait toutefois du nouveau cette année, car M. Buffett avait invité Doug Kass à poser les questions qu'il voulait. M. Kass est un gestionnaire qui a ouvertement déclaré qu'il vendait à découvert le titre de Berkshire Hathaway.

Le comportement de Warren Buffett jure avec celui du monde financier. Connaissez-vous beaucoup de présidents d'entreprise qui invitent des gestionnaires qui sont ouvertement négatifs et qui vendent leurs actions à découvert ?

D'ailleurs, en tant qu'investisseur, il est important d'imiter l'attitude de M. Buffet en cherchant des avis différents de nos croyances et de nos convictions. C'est surtout vrai lorsque tout semble aller à merveille. C'est le moment de s'ouvrir à quelqu'un qui croit que vous avez tort !

Vos réactions

«Un de mes oncles disait : "La crainte est le début de la sagesse". Craindre rationnellement de perdre ce qui nous est cher nous force à en prendre grand soin.»

- Poiriers

«Si toutes les assemblées de société étaient comme celle de Berkshire, ça vaudrait le déplacement.»

- jpthoma1

bernard.mooney@tc.tc

blogue > www.lesaffaires.com/bernard-mooney

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