Comment faire son nid aux États-Unis

Publié le 14/02/2009 à 00:00

Comment faire son nid aux États-Unis

Publié le 14/02/2009 à 00:00

Par François Normand

[Photomontage : Josée Noiseux/ Les Affaires]

Tout comme l'ombre de la marmotte présage le printemps, la récession indique invariablement le grand retour du protectionnisme aux États-Unis. Et l'amendement adoucissant les clauses protectionnistes du plan de relance économique du président Barack Obama ne changera pas grand-chose pour les entreprises canadiennes.

"Les Américains ne nous font jamais de cadeaux !" rappelle Raymond Chrétien, ambassadeur du Canada aux États-Unis de 1994 à 2000, aujourd'hui conseiller stratégique et associé chez Fasken Martineau.

Pour favoriser la création d'emplois aux États-Unis, le Congrès, à majorité démocrate, a inclus une clause s'inspirant de la Buy American Act - une loi datant de 1933 qui encourage l'achat de produits américains - dans la section du plan concernant les infrastructures.

Ainsi, l'acier, le fer et les équipements manufacturiers utilisés pour construire des ponts et des routes devront être fabriqués aux États-Unis. "Cette mesure s'inspire toutefois de règles existantes, souligne Susan Ariel Aaronson, une spécialiste en commerce international de l'Université George Washington. Cela n'accroît pas vraiment le protectionnisme, mais cela envoie un mauvais signal."

Mais devant la levée de boucliers d'entreprises américaines et de ses partenaires commerciaux, dont le Canada, Barack Obama a demandé au Congrès de mettre de l'eau dans son vin.

Ce qu'il a fait, avec un amendement stipulant que les États-Unis s'engagent à respecter les accords internationaux qu'ils ont signés, y compris ceux de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA). Politiciens et gens d'affaires au Canada ont crié victoire : les Américains ne tourneront pas le dos aux produits d'ici.

Cependant, les entreprises qui exportent aux États-Unis risquent tout de même d'avoir plus de difficulté sur le marché américain dans les mois à venir, estiment plusieurs analystes.

Il existe heureusement des solutions éprouvées pour limiter les dégâts.

Diversifier ses marchés

Certes, on ne réinvente pas la roue. Mais il est toujours très risqué de mettre tous ses oeufs dans le même panier. Or, 79 % des exportations canadiennes étaient acheminées aux États-Unis, en 2007.

"C'est le temps de trouver d'autres clients", dit Jean-Michel Laurin, vice-président, politiques d'affaires mondiales, des Manufacturiers et exportateurs du Canada (MEC). Bien que la crise économique touche toute la planète, dit-il, certains pays d'Amérique latine, d'Europe ou d'Asie s'en tirent mieux que d'autres.

C'est quand même un choix déchirant. Car lorsque les États-Unis roulent sur l'or, c'est le paradis des exportateurs canadiens : le marché le plus riche du monde à la porte d'à côté, dans des fuseaux horaires proches et qui a sensiblement la même culture d'affaires. Que demander de plus ?

Mais lorsque ce marché est plongé dans une tempête, notre dépendance aux États-Unis devient un sérieux handicap. Non seulement la demande diminue, mais le protectionnisme refait surface.

Utiliser ses contacts pour faire du lobbying

Si vous n'avez pas encore d'amis aux États-Unis, faites-vous-en vite, et pas seulement sur Facebook ! "Si on veut influencer la politique américaine, il faut aller aux États-Unis", recommande David Stewart-Patterson, vice- président du Conseil canadien des chefs d'entreprise (CCCE).

Une des stratégies pour combattre le protectionnisme consiste à faire appel à tous les gens qui peuvent vous aider (partenaires commerciaux, associations d'affaires, ambassade du Canada, délégations du Québec) pour sensibiliser les élus américains à l'importance du Canada pour la prospérité des États-Unis.

Ainsi, plus les membres du Congrès recevront de courriels, de lettres, et même de délégations à leur bureau, plus ils seront sensibilisés à cet enjeu. Peut-être seront-ils alors moins enclins à adopter des mesures protectionnistes. Aux États-Unis, dans le monde des affaires, vos meilleurs alliés sont la Business Roundtable, la U.S. Chamber of Commerce et la National Association of Manufacturers. La plupart des grandes associations patronales canadiennes ont des contacts réguliers avec ces trois groupes de pression.

Voir venir les coups en restant très branché

"Si tu veux la paix, prépare la guerre." Les exportateurs canadiens peuvent s'inspirer de cet adage pour limiter les effets du protectionnisme américain.

Comment ? En s'informant le plus possible sur l'économie et la politique américaine pour voir venir les menaces (par exemple, une nouvelle norme taillée sur mesure pour favoriser une poignée de fournisseurs américains) et s'adapter en conséquence (par exemple, en développant l'expertise recherchée).

L'ambassade du Canada tient elle aussi une vigie constante afin de pouvoir faire des pressions en vue de contrer les effets de projets de loi jugés hostiles aux intérêts canadiens.

"L'idée, c'est de tuer dans l'oeuf tout projet avant qu'il ne pose un problème", dit Raymond Chrétien.

S'installer aux États-Unis

Pour avoir un meilleur accès à long terme au marché américain, une entreprise peut aussi ouvrir un bureau ou une usine aux États-Unis. Cela permet de répondre aux critères de certaines lois américaines, comme la Buy American Act.

"Cette loi a d'ailleurs été adoptée en partie pour inciter les entreprises étrangères à s'implanter aux États-Unis et à créer des emplois locaux", dit Carl Grenier, professeur au Département de science politique de l'Université Laval et membre de l'Observatoire des États-Unis à la Chaire Raoul-Dandurand de l'UQAM.

francois.normand@transcontinental.ca

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