Quand David gagne contre Goliath

Publié le 30/01/2010 à 00:00

Quand David gagne contre Goliath

Publié le 30/01/2010 à 00:00

En matière de protection des marques de commerce, la loi du plus fort ne l'emporte pas toujours. La récente victoire de Groovle.com, qui appartient à une petite société ontarienne, contre Google le démontre bien.

Le géant californien alléguait que le site de la société 207 Media avait une trop grande similitude avec le sien, ce qui pouvait semer la confusion chez les internautes. Google réclamait que le nom du domaine lui soit transféré. La veille de Noël, le National Arbitration Forum, l'organisme responsable d'arbitrer les litiges en matière d'identification des noms de domaines sur Internet, a conclu que l'utilisation du nom Groovle.com ne comportait pas un risque de confusion. Les arbitres ont décrété que Groovle.com était un dérivé du mot groovy (sensationnel, super), et non une adaptation du mot Google; deux lettres ont suffi à le démontrer, même si les deux noms ont des parentés phonétiques.

" Les grands de ce monde peuvent bien montrer leurs dents, mais encore faut-il qu'ils s'appuient sur de solides assises juridiques ", dit Johanne Auger, agent de marques de commerce chez BCF, à Montréal.

La situation au Canada

La victoire de Groovle.com est d'autant plus remarquable que le géant a la réputation de défendre sa marque bec et ongles. Des 65 plaintes qu'elle a adressées à l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle ou au National Arbitration Forum, Google n'en a perdu que deux, dont celle concernant Groovle.com.

La jurisprudence canadienne récente comporte elle aussi quelques cas de victoire de David contre Goliath.

Mme Auger cite l'affaire du Petit Moulinsart & dessins, un restaurant du Vieux- Montréal qui a dû se défendre contre la société belge Moulinsart S.A. détentrice des droits sur l'oeuvre de Hergé, auteur des aventures du célèbre Tintin. Moulinsart a porté plainte en 2004, 12 ans après l'ouverture du restaurant.

" Justement, c'est Tintin qui est connu, bien plus que Moulinsart, un nom peu usité dans le commerce au Canada ", dit Johanne Auger.

Dans une décision rendue en décembre 2008, la Commission des oppositions du Bureau des marques de commerce du Canada a conclu que Moulinsart n'a pas démontré que le consommateur canadien faisait une association immédiate entre la notoriété de Tintin et le nom de Moulinsart, ce qui aurait pu constituer un motif valable de s'opposer à l'emploi de ce nom.

Du whisky d'ici

Glenora Distillers, un distilleur de Glenville, au Cap Breton, a dû défendre jusqu'en Cour d'appel fédérale sa marque de whisky Glen Breton contre les prétentions de la Scotch Whisky Association, un organisme d'Edinbourg chargé de défendre l'appellation Scotch Whisky. Ne peuvent prétendre être un authentique whisky écossais que les boissons fabriquées en Écosse.

Glenora, l'unique distilleur de whisky de premier malt au Canada, fabrique quelques dizaines de milliers de bouteilles de son alcool qui affiche en toutes lettres ses origines canadiennes. Les distilleurs écossais, qui exportent plus de 10 millions de bouteilles au Canada, s'opposaient à l'emploi du mot glen, qui apparaît comme préfixe dans plusieurs grandes marques de whisky telles Glenfiddich ou Glenlivet. Le mot glen dans la langue écossaise désigne une vallée.

En janvier 2009, le tribunal fédéral a jugé que le seul mot glen ne constituait pas une marque de commerce. La marque Glen Breton devait être prise dans son ensemble et ne pas être découpée en syllabes pour s'y opposer.

" Résister contre une association aussi puissante que celle-là, c'est une belle victoire ", dit Johanne Auger. La route a été longue puisque la bataille avait commencé en 2000.

dossiers@transcontinental.ca

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