Philip Thomas pdg, Lions de Cannes

Publié le 16/11/2013 à 00:00, mis à jour le 18/11/2013 à 16:42

Philip Thomas pdg, Lions de Cannes

Publié le 16/11/2013 à 00:00, mis à jour le 18/11/2013 à 16:42

Le Britannique Philip Thomas dirige le plus prestigieux festival de publicité du monde, les Lions de Cannes, qui se tient chaque année en juin. Récemment rebaptisé Festival international de la créativité, cet événement constitue à la fois un concours international et un rassemblement de milliers de créatifs de divers horizons. Le 19 novembre, Philip Thomas était à Montréal, invité par l’Association des professionnels de la communication et du marketing (APCM), pour l'événement "Les Lions de Cannes débarquent à Montréal".

 

Diane Bérard - En 2011, vous avez rebaptisé votre événement Festival de la créativité alors qu'il est connu depuis des décennies comme celui de la publicité. Pourquoi ?

Philip Thomas - En regardant les 15 oeuvres récipiendaires des Lions d'Or 2010, nous avons constaté que trois d'entre elles constituaient de la publicité pure. Il s'agissait davantage de communication au sens large. Et puis, les participants inscrits à notre événement appartiennent à des univers de plus en plus variés : médias, relations publiques, communications et entreprises.

D.B. - Outre le nom, qu'est-ce qui a changé ?

P.T. - La nationalité des gagnants. Même si l'Amérique et l'Europe récoltent encore la majorité des prix, on voit se glisser des récipiendaires du Vietnam, de l'Inde, du Salvador et de la République dominicaine, entre autres.

D.B. - Plus de 35 765 productions ont été soumises l'an dernier. Comment établir que l'une est plus créative que l'autre ?

P.T. - Notre jury se compose des 300 personnes les plus créatives du monde, c'est un bon début. Ces juges cherchent la différence, la fraîcheur, un regard neuf. Leurs choix s'arrêtent sur ce qui est attirant et divertissant. Sur ce qui sait capter, mais aussi retenir leur attention.

D.B. - Quel poids le jury accorde-t-il à l'efficacité ? Est-elle une composante de la créativité ?

p.T. - Certaines catégories ont une composante efficacité parmi les critères. Un créateur peut, par exemple, présenter une production lancée l'année précédente. Il doit démontrer au jury que cette campagne a permis d'améliorer la position concurrentielle d'une marque, sa notoriété, ses ventes... L'an dernier, Heineken s'est démarquée dans cette catégorie. Mais les entreprises ne mesurent pas toute l'efficacité de leur créativité publicitaire. Certaines n'y tiennent tout simplement pas. Ces organisations avaient besoin de projeter une image créative et elles concluent que ce qui est créatif est automatiquement efficace. D'autres ne mesurent pas l'efficacité de leurs campagnes parce qu'elles jugent l'exercice trop onéreux et complexe.

D.B. - Les oeuvres primées tiennent plus des minifilms que des campagnes publicitaires. Le contenu artistique prime-t-il sur les visées commerciales ?

P.T. - Nous sommes à l'ère du storytelling, les deux se confondent. C'est en associant des histoires à leur produit que les entreprises créent des marques fortes et entretiennent leur notoriété. Les consommateurs n'écoutent plus les messages associés à la vente. Mais ils retiennent les histoires qu'on leur raconte. Il faut avouer que les publicitaires ont appris à peaufiner cette technique. Allez voir la merveilleuse campagne d'Intel et Toshiba «The beauty inside», qui a permis à une centaine d'internautes d'être le héros d'une histoire téléchargée six millions de fois.

D.B. - Dans votre ancienne vie, vous dirigiez le magazine pour hommes FHM. Un produit qui n'a pas besoin d'être créatif pour trouver preneur, non ?

P.T. - Vous vous trompez. Pour combler ses lecteurs, le produit FHM doit être à la fois sexy, drôle et utile. Pas besoin de créativité pour être sexy, je vous l'accorde. Mais l'humour, lui, exige de la créativité. Tout comme la pertinence. Prenez cette manchette que nous avons réalisée sur les enfants. Comment parlez-vous d'enfants à des gars de 25 ans ? Nous avons joué la carte de l'humour en titrant : «Les enfants, ce qu'ils sont et d'où ils viennent». Ça a attiré l'attention de nos lecteurs, croyez-moi !

D.B. - Parlez-nous de votre plus récente expérience créative.

P.T. - J'ai passé deux jours à la Fondation Bill et Melinda Gates, à Seattle, en compagnie des gagnants du prix Cannes Chimera. Ce prix est décerné à une dizaine de concepts pour des campagnes de sensibilisation aux grands enjeux planétaires. Chaque année, la Fondation Gates choisit un thème qu'elle résume en quelques lignes. Puis, elle lance un appel à tous. Le concept doit tenir sur une double page. Les gagnants reçoivent jusqu'à 100 000 $ chacun. Cette année, il fallait imaginer une campagne autour du thème «L'aide, ça fonctionne. Dites-le», pour valoriser l'impact de l'aide internationale. Neuf projets ont été retenus. Les gagnants se sont rendus à Seattle pour un camp de créativité de deux jours. Ils ont été jumelés à des récipiendaires des Lions d'Or de l'an dernier. Ceux-ci avaient pour mission de les aider à développer leur concept.

D.B. - Quelle différence entre la créativité en art et la créativité en affaires ?

P.T. - La créativité en art ne vise aucun but, elle est complète en elle-même. En affaires, il y a toujours une intention : vendre plus, accroître la notoriété. Cette forme de créativité doit susciter une action chez celui qu'elle vise.

D.B. - La définition de la créativité a-t-elle évolué depuis l'époque de Mad Men ?

P.T. - Les principes de la communication créative n'ont pas changé. Mais les outils qui permettent d'attirer l'attention et d'influencer les comportements des consommateurs, eux, ont changé. Même si la télé est encore puissante, le spot 30 secondes cède tranquillement sa place aux applications mobiles.

D.B. - Les Lions de Cannes, c'est aussi une mégaconférence qui attire 9 000 participants. Cette année, votre colloque a présenté un atelier sur la créativité dans les entreprises sociales. Pourquoi ?

P.T. - Il était question d'entreprises socialement responsables. La créativité publicitaire doit susciter une action chez le consommateur. Or, celui-ci s'interroge de plus en plus sur son impact sur la société. Il voudrait contribuer à un monde meilleur. Alors il retourne la question aux entreprises : «Que faites-vous pour assurer l'avenir de la planète ?» Les pdg doivent trouver des réponses, et les publicitaires transmettre celles-ci aux consommateurs.

D.B. - Il est facile d'avoir un petit service créatif composé d'employés «différents». Mais comment devient-on une entreprise créative ?

P.T. - C'est une question de courage. Si la direction a le courage de laisser ses employés expérimenter, et échouer, l'organisation deviendra naturellement créative.

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