Pénurie de main-d'oeuvre: quel impact pour les chasseurs de têtes?

Offert par Les Affaires


Édition du 01 Juin 2019

Pénurie de main-d'oeuvre: quel impact pour les chasseurs de têtes?

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Édition du 01 Juin 2019

« Je pensais que les entreprises se lasseraient des agences, mais c’est tout l’inverse qui se produit : elles sont tellement découragées qu’elles externalisent leur recrutement et le confient à des spécialistes. » – Didier ­Dubois, cofondateur et stratège en solutions ­RH numériques chez ­HRM ­Groupe

CHASSEURS DE TÊTE. Selon Statistique Canada, le taux de chômage enregistré au Québec au mois d'avril, 4,9%, est le taux le plus bas depuis... 1976 ! Une bonne nouvelle sur le plan économique, mais un vrai défi pour les professionnels du recrutement, notamment les chasseurs de têtes. Cette situation de plein emploi se traduit en effet par un manque de disponibilité de la main-d'oeuvre. «Cela a des répercussions sur nos propres capacités à embaucher du personnel à l'interne», explique Stéphane Dignard, président de Recrutement Intégral. Un comble ! Cette pénurie sur le marché de l'emploi semble, malgré tout, avoir des conséquences positives pour les chasseurs de têtes. Un paradoxe ? Pas vraiment, selon Didier Dubois, cofondateur et stratège en solutions RH numériques chez HRM Groupe. «Je pensais que les entreprises se lasseraient des agences, mais c'est tout l'inverse qui se produit : elles sont tellement découragées qu'elles externalisent leur recrutement et le confient à des spécialistes.»

De nouveaux partenaires stratégiques

Un constat partagé par Éric Mallette, président de La Tête Chercheuse, qui confie effectivement avoir de plus en plus de mandats. «En général, avant de faire appel à un cabinet de recrutement, le client a déjà essayé par lui-même, sans succès. C'est vraiment rare d'avoir des mandats sans que rien n'ait été fait avant.» «Il y a encore une vingtaine d'années, on était accessoires. Aujourd'hui, on est des partenaires stratégiques, précise François Lefebvre, président du cabinet Lefebvre & Fortier. Quand une entreprise cherche depuis plusieurs mois un directeur d'usine et que cela commence à se répercuter sur sa production ou à l'interne, elle nous mandate sur cette mission qui devient stratégique.»

Pour ce dernier aussi, le volume d'affaires ne fait qu'augmenter. Au point même de devoir refuser parfois des mandats. «On a plus à gérer des "non" que des "oui" présentement, assure-t-il. Pour avoir recours à des chasseurs de têtes, les conditions gagnantes sont en effet nécessaires, ce qui n'est pas à la portée de tout le monde». Autrement dit, les entreprises doivent désormais offrir un défi, de la nouveauté, des bonnes conditions, une vision sur son développement futur... «Je ne peux pas demander à une personne de changer d'emploi juste parce qu'elle est malheureuse là où elle est. Il faut que ce que je lui offre soit plus intéressant que ce qu'elle a déjà», illustre M. Lefebvre.

La rétention et l'attraction deviennent clés

«Les entreprises qui ne prennent pas soin de leur marque employeur pour retenir leurs employés ou pour en attirer de nouveaux vont avoir de grands problèmes. Au point, parfois, de devoir délaisser une partie de leurs activités, faute de main-d'oeuvre qualifiée», avance M. Dignard, qui vient d'ailleurs d'ajouter un volet d'accompagnement en marketing RH à son offre. «Le rapport de force s'est complètement inversé : ce sont les candidats qui magasinent leur job et les entreprises qui cherchent à les séduire», confirme Sébastien Savard, président cofondateur de Sourcinc.

Ce dernier affirme même que la croissance de son entreprise de repérage de candidats (sourcing) est en partie liée à cette pénurie de main-d'oeuvre. «Afficher une offre et attendre les CV n'est plus une option pour une entreprise. Désormais, il faut bâtir une stratégie de recrutement avant même d'ouvrir un poste.»

Autre répercussion de la tension actuelle sur le marché du travail : la rapidité de décision des talents. «Les candidats n'attendent plus. Si une entreprise n'a pas bien discuté avec son chasseur en amont et qu'elle met du temps à réfléchir à son offre, elle va les perdre», déclare Jean-Baptiste Audrerie, chef de pratique, Transformation et Technologies RH chez Horizon RH. Confirmation de la part de Louise Martel, associée chez Raymond Chabot Grant Thornton : «Depuis un an, pour des postes plus séniors, sur la poignée de candidats finaux que l'on envoie à nos clients, près d'une fois sur deux, il y en a un ou plusieurs qui se désistent, car ils ont eu une offre ailleurs.»

Conséquence : les chasseurs de têtes doivent aller de plus en plus rapidement dans leur processus... et sensibiliser leurs clients. «Ils ne sont pas toujours habitués à ça. Mais, au final, il faut que cette pression les amène à devenir de meilleurs employeurs encore», ajoute-t-elle.

En résumé, la pénurie de main-d'oeuvre a plus d'effet sur les mandats que sur le bassin de talents pour les chasseurs de têtes. «Je vais chercher des gens qui travaillent déjà, donc mon potentiel est en soi quasiment illimité, témoigne M. Lefebvre. Je dois juste m'assurer que le client pour qui je prends le mandat est concurrentiel».

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