Pas facile de vendre la cause du gros barbu au coin de la rue...

Publié le 14/04/2012 à 00:00

Pas facile de vendre la cause du gros barbu au coin de la rue...

Publié le 14/04/2012 à 00:00

Il y a des causes plus faciles à vendre que d'autres. L'enfant atteint de leucémie ou le projet d'école dans un village d'Afrique sont des causes qui «pognent». Par contre, pas évident de vendre le fou, le p'tit vieux ou le sans-abri. Les préjugés ont la vie dure en philanthropie aussi.

Les organismes qui viennent en aide aux itinérants n'ont pas la tâche facile. La pauvreté fait peur, et plusieurs souhaiteraient la voir disparaître de leur paysage. «L'itinérance est loin de faire partie du top 10 des causes les plus attrayantes. L'image du barbu qui quête au coin de la rue s'avère beaucoup moins ''sexy'' à vendre que celle d'un enfant malade», concède Serge Lareault, qui dirige l'organisme communautaire L'Itinéraire depuis sa fondation, en 1994.

Pourtant, les besoins sont importants, car le nombre d'itinérants ne cesse de croître à Montréal. «En 20 ans, il est passé de 15 000 à plus de 25 000. Les banques alimentaires ont enregistré des hausses de fréquentation de plus de 30 % depuis deux ans», soutient-il.

Le principal obstacle ? Les préjugés. En particulier, l'idée que les itinérants se sont mis eux-mêmes dans cette situation ou qu'ils ne veulent pas vraiment s'en sortir, signale M. Lareault.

Des mythes qui jouent en défaveur de la générosité envers l'itinérance. «Les budgets philanthropiques des entreprises sont principalement gérés par les départements de marketing. Ce personnel recherche des causes BCBG avec une belle image, qui interpellent leur clientèle. Les jeunes et le cancer ont donc davantage la cote que la pauvreté dans la rue...» dénonce Serge Lareault.

À cette tendance marketing s'ajoutent celles des transformations sociales. Les individus ont l'habitude de suivre le courant des grandes corporations. Il y a 25 ans, dit M. Lareault, les grands donateurs aidaient les plus de 30 ans qui se retrouvaient à la rue. Par la suite, leur générosité est allée à la lutte au décrochage scolaire. Puis, au fil des ans, cette lutte a migré vers des activités de prévention auprès des enfants de 0 à 5 ans. «Bref, malgré quelques rares entreprises qui font acte de courage en nous soutenant, il y a beaucoup moins d'argent pour ceux qui vivent dans la rue», dit le fondateur de L'Itinéraire.

Un journal pour s'en sortir

Pour récolter des fonds, L'Itinéraire n'a pas voulu verser dans la soupe populaire, le comptoir de vêtements ou le refuge. «Notre organisme s'est donné comme mandat de participer à la réinsertion sociale des itinérants, de leur trouver des solutions durables», dit Serge Lareault.

Plus de 30 % des deux millions de dollars de revenus annuels de l'organisme proviennent de la vente du journal L'Itinéraire dans la rue par des camelots itinérants. La rédaction, la vente et la production du journal permettent à 125 personnes de toucher un revenu. «C'est six fois plus d'individus qu'en 1994», souligne Serge Lareault, qui a lancé l'organisme avec 30 000 $ en poche.

Près de 40 % des revenus sont issus de subventions. Le reste provient des donateurs. Leur profil ? «Si on se base sur notre lectorat, composé de plus de 60 000 lecteurs, nos donateurs ont de 40 à 55 ans. Ce sont pour la plupart des gens cultivés, issus de la classe moyenne élevée... Et la majorité d'entre eux n'habitent même pas le centre-ville de Montréal», fait remarquer M. Lareault.

Étonnamment, plusieurs donateurs vivent dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. D'où l'idée de publier éventuellement le journal sur le Web afin d'augmenter la portée provinciale de l'organisme.

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