Les visages de l'Eldorado minier

Publié le 30/04/2011 à 00:00

Les visages de l'Eldorado minier

Publié le 30/04/2011 à 00:00

Les explorateurs miniers d'aujourd'hui, qui fouillent le sous-sol québécois à la recherche d'or, de diamant, de zinc et de toute substance minérale digne d'intérêt, ont de l'expérience à revendre. La quarantaine bien sonnée, ils ont fourbi leurs armes dans des entreprises établies. " Les financiers cherchent l'expérience. Avant d'investir, ils veulent savoir comment les explorateurs comptent s'y prendre pour trouver les mines de demain ", signale Michel Champagne, directeur général de SIDEX, une société en commandite du gouvernement du Québec et du Fonds de solidarité FTQ.

L'AVOCAT QUI PARLE AVEC LES CRIS

C'est en 2008, alors au début de la cinquantaine, que Guy Bourassa est passé de l'autre côté du miroir en créant Exploration Nemaska.Jusqu'alors, il avait été conseiller juridique pour différentes minières, avocat indépendant spécialisé dans la rédaction de prospectus pour sociétés minières et dirigeant d'une société d'exploration.

" Au milieu des années 2000, j'ai constaté un immense engouement pour le nickel. Le territoire de la Baie-James étant peu exploré et potentiellement riche de ce minéral précieux, j'ai cru pouvoir me faire une place au soleil ", dit-il. Toutefois, le prix du nickel a rapidement chuté et les efforts d'exploration ont suivi cette courbe.

Exploration Nemaska a cependant trouvé autre chose à se mettre sous la dent : un minerai de lithium appelé " spodumène ". Situé près du village cri de Nemaska, à la Baie-James, ce gisement serait si riche que Guy Bourassa le qualifie de troisième plus important de la planète. Ce minerai pourrait servir à fabriquer des piles pour voitures électriques et hybrides. Si les résultats de l'étude de faisabilité, attendus d'ici décembre, sont positifs, la mine démarrerait ses activités en 2013. Une usine de transformation de carbonate de lithium pourrait ensuite être érigée à Rouyn-Noranda.

Si cela se déroule comme prévu, la formation juridique et l'expérience de négociateur de Guy Bourassa n'auront pas été inutiles. Car en 2009, la communauté crie de Nemaska a injecté 600 000 $ dans la société, acquérant 8,4 % des actions. " Il est très rare que des communautés autochtones investissent directement dans des minières ", affirme-t-il.

Ce partenariat prend tout son sens à une époque où l'acceptabilité sociale est devenue une condition sine qua non du développement minier. " Entre l'exploration et l'exploitation, il faut intégrer les enjeux locaux. Sinon, c'est le cul-de-sac ", résume l'avocat.

UN PARRAIN QUI MONTRE LA VOIE

Le mentor de Philippe Cloutier a montré qu'il pouvait toucher l'or. Avec le gisement Éléonore de la Baie-James, André Gaumond et sa société d'exploration Mines d'Or Virginia ont en effet effectué la plus importante découverte d'or au pays des 25 dernières années.

Une réussite dont le président de Ressources Cartier entend s'inspirer. " André Gaumond a parrainé l'entrée en Bourse de Ressources Cartier et il a facilité mes premières approches auprès des analystes, des courtiers et des investisseurs ", dit Philippe Cloutier.

Car, dans cette industrie où les revenus sont rares, pour ne pas dire inexistants, l'argent est le nerf de la guerre. " Notre succès dépend de notre capacité à trouver des sites prometteurs. Mais il faut, au préalable, avoir convaincu les investisseurs de notre sérieux et de notre potentiel ", explique M. Cloutier.

C'est pourquoi les conseils d'un as de l'exploration minière sont si importants. " Une des grandes forces d'André Gaumond réside dans sa capacité à faire passer un message très crédible auprès des décideurs du monde financier ", souligne M. Cloutier.

Géologue de formation et âgé de 47 ans, M. Cloutier connaît le métier d'explorateur, ayant déjà été vice-président à l'exploration chez Alexis Minerals. Cependant, à la barre de sa propre entreprise, la dimension financière se présentait sous un jour différent. " J'avais besoin de la formation sur le terrain que m'a prodiguée André Gaumond ", dit-il.

Bâtir la relève

Philippe Cloutier raconte avoir été accompagné lors de présentations spécialisées par son mentor. " Il m'a aidé à briser la glace, à formuler mon message et à éviter certains pièges. Et, aujourd'hui encore, il n'est pas avare de conseils, parfois d'ordre technique. C'est ainsi que se bâtit la relève du Québec minier de demain ", affirme le patron de Ressources Cartier.

Depuis sa création en 2007, Ressources Cartier a amassé plus de 12 millions de dollars (M$) en financement et a investi environ 10 M$ en projets d'exploration sur le territoire abitibien. La compagnie dispose d'une encaisse de quelque 5 M$.

M. Cloutier compte devenir producteur, éventuellement d'or, d'ici les 10 prochaines années. Un modèle d'entreprise totalement différent de celui de son mentor, qui a choisi de vendre Éléonore à Goldcorp. " Il faut boucler la boucle et garder, au Québec, la totalité des richesses minières de la province. C'est ce que favorise la prospection en Abitibi, mais qui est presque impossible à réaliser dans le Grand Nord, en raison du manque de main-d'oeuvre et des réseaux de communication insuffisants ", de dire M. Cloutier.

ORBITE, OU L'APPRENTI OSISKO GASPÉSIEN

Richard Boudreault a de l'ambition à revendre, et souhaite que sa société d'exploration minière devienne l'Osisko de la Gaspésie, la controverse en moins.

En avril, Exploration Orbite a annoncé la découverte d'importants gisements de terres rares dans le secteur de Grande-Vallée, près de Murdochville, en Gaspésie. Ce qui s'ajoute à un gigantesque gisement d'argile pouvant être utilisé par les producteurs d'aluminium du Québec. Compte tenu de ses 135 millions d'actions en circulation et d'une certaine volatilité, sa valeur boursière oscille de 525 à 600 millions de dollars (M$). C'est presque 10 fois moins qu'Osisko mais il faut se souvenir que le titre du spécialiste de l'or a déjà, lui aussi, été un penny stock (actions cotées en cents).

Et, à l'image d'Osisko, qui a réussi le passage de l'exploration à l'exploitation, Orbite compte devenir un producteur. De l'alumine argileuse pourrait ainsi être produite dans une future usine de traitement. " Cette alumine pourrait se substituer aux 3 à 4 milliards de dollars d'alumine importée chaque année par les alumineries du Québec, ce qui représente entre 3 et 5 % de notre produit intérieur brut. C'est ce qu'on appelle avoir un impact massif sur l'économie ", dit M. Boudreault.

Selon cet ancien professeur d'ingénierie de l'Université de Sherbrooke et ex-conseiller aux investissements à la Caisse de dépôt, le procédé de production d'Orbite, actuellement à l'essai, aurait une " très faible " empreinte environnementale. " Nous ne prévoyons pas de levée de boucliers des milieux écologiques ", dit le pdg de 53 ans.

Le CA a également la tâche de faciliter le passage de l'exploration à l'exploitation.

On y trouve un connaisseur de l'industrie de l'aluminium, Christian Van Houtte, qui a déjà été pdg de l'Association de l'aluminium du Canada et vice-président de l'Aluminerie de Bécancour. S'ajoutent l'ancien directeur de cabinet de Jean Charest, Stéphane Bertrand, et l'ex-bras droit de Lucien Bouchard, Charles Chevrette ; un ex-sous-ministre du ministère de l'Environnement, Pierre Meunier, et un ancien dirigeant de Raytheon Canada et vice-président de Bombardier et d'Oerlikon Aerospace, Lionel Léveillé. " Chacun peut nous ouvrir les bonnes portes et nous éviter de mauvaises surprises ", dit M. Boudreault.

L'ATTRAIT DE LA CHASSE... À L'OR

Qu'est-ce qui motive Roch Lefrançois à franchir chaque matin la porte d'entrée des bureaux NioGold et à s'asseoir à son fauteuil de président ? Découvrir le prochain grand filon et devenir millionnaire avant l'âge de 50 ans ?

" Bien sûr, nous aimerions tous passer à la caisse un jour ou l'autre, bien que ma rémunération ne soit pas à dédaigner. Mais ce n'est pas là ma principale motivation ", dit M. Lefrançois.

En tant que président et chef des opérations de la société d'exploration NioGold, il dispose de 250 000 actions et options d'actions. Dont la valeur peut s'envoler... s'il arrive à trouver l'or !

Toutefois, davantage que la perspective de Liberté 55, c'est l'attrait de la chasse qui le captive. " Au fond de moi, je demeure et je reste un géologue d'exploration. C'est dans notre nature de chasseurs et de joueurs : nous voulons tous "frapper" le prochain grand gisement ", dit le dirigeant de 49 ans.

Il faut dire que M. Lefrançois cumule près d'un quart de siècle d'expérience en exploration minière, notamment auprès de Cambior et d'Aur Resources.

Au jeu de l'exploration, cependant, mieux vaut s'armer de patience, avoir la foi et disposer de bonnes réserves financières.

" La plupart des géologues passent leur carrière à chercher, mais sans jamais ne rien trouver de significatif. Personnellement, je n'ai pas encore trouvé ce que je convoite, soit un gisement d'au moins cinq millions d'onces d'or. C'est là mon objectif des cinq prochaines années ", dit M. Lefrançois.

Et afin d'y arriver, quinze employés et quatre foreuses sont à l'oeuvre, près de Malartic, en plein coeur de l'Abitibi, à un kilomètre de la propriété d'Osisko et de ses 10,7 millions d'onces d'or. " On multiplie ses chances de trouver de bons gisements en s'installant au coeur des zones qui ont eu du succès ", estime-t-il.

Cette recherche exige toutefois d'avoir les reins solides, car les frais d'exploitation se situent, selon M. Lefrançois, autour de 125 $ le mètre foré. Pour NioGold, qui envisage 70 000 mètres de forage en 2011, cela représente un investissement de près de 9 M$.

65 M$ Depuis sa fondation en 2001, SIDEX, une société en commandite du gouvernement du Québec et du Fonds de solidarité FTQ, a investi près de 65 millions de dollars dans 185 projets miniers au Québec.

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