Le propriétaire de la Maison Orphée ne l'avait pas vu venir...

Publié le 19/05/2012 à 00:00

Le propriétaire de la Maison Orphée ne l'avait pas vu venir...

Publié le 19/05/2012 à 00:00

Quand Florent Bélanger a pris sa retraite d'une carrière de fonctionnaire, en 2005, il espérait pouvoir enfin travailler à temps plein dans l'entreprise qu'il avait acquise en 1992. Cependant, il s'est vite rendu compte que ses filles étaient déjà bien en selle.

Élisabeth, l'aînée, travaillait depuis 1993 et Élaine, la cadette, est entrée en 1997 dans cette entreprise de Québec qui importe et fabrique des huiles, des moutardes et de vinaigres haut de gamme. Pendant ce temps, le père propriétaire supervisait, à raison d'une journée par semaine, le travail de ses deux filles.

D'importatrice, la PME s'était lancée dans la fabrication en 1989.

«Au départ, c'était une toute petite entreprise de quatre personnes, se souvient Élisabeth Bélanger, aujourd'hui pdg de Maison Orphée. Notre père nous a donc laissé de la corde, il nous disait : organisez-vous pour combler le vide !»

Et ce fut fait très rapidement. Durant ces années d'apprentissage, les soeurs Bélanger ont fait leur place en occupant différents postes, de la comptabilité à la gestion en passant par la représentation. Graduellement, elles ont acheté des actions de la société. En 2002, elles devenaient copropriétaires avec leur père.

Passionnées de terroir, les deux soeurs ont sillonné l'Amérique et l'Europe pour trouver les meilleures matières premières. Rapidement, la petite entreprise s'est taillé une place de choix dans l'industrie des huiles de première pression à froid du pays.

Le père, qui travaillait comme commissaire industriel à la Ville de Québec, gardait l'oeil sur les opérations. «Il nous interrogeait régulièrement et portait un regard critique sur nos décisions stratégiques», se rappelle Élisabeth Bélanger.

Le choc...

Mais lorsqu'il décide de mettre son plan de retraite à exécution, c'est le choc.

«Il s'attendait à être plus engagé, mais il se rendait compte qu'il en savait moins que nous et qu'il ne savait pas quel poste occuper», explique Élaine Bélanger, vice-présidente et directrice des approvisionnements.

En verbalisant ces inquiétudes, le trio arrive à se partager les tâches.

«Notre père a pris les dossiers qui nous intéressaient le moins, jusqu'à ce qu'on se demande quels seraient les scénarios de sortie, raconte Élisabeth Bélanger. On approchait de la quarantaine, et on avait un patrimoine à bâtir.»

En 2010, les soeurs ont procédé au rachat complet de l'entreprise familiale. Le père tire alors sa révérence pour laisser ses deux filles mener la barque.

Facteurs de succès

Selon les deux têtes dirigeantes de Maison Orphée, trois facteurs sont à l'origine du succès de cette transition. Tout d'abord, la confiance dont leur père a toujours fait preuve envers elles.

«Même s'il n'était pas toujours d'accord, il nous faisait confiance. Il savait qu'on n'était pas écervelées, raconte Élisabeth Bélanger. En 2009, quand nous avons changé d'image de marque, il n'était pas d'accord, même s'il reconnaît aujourd'hui que c'était une bonne décision.»

Ensuite, la complémentarité des compétences entre les deux soeurs. «Dans toutes les grandes décisions qu'on prend, on n'hésite pas à se remettre en question, à remettre en cause l'idée de l'autre», explique Élaine Bélanger. Il y a bien eu quelques frictions, au fil des ans, mais les discussions ont toujours été menées dans le respect mutuel.

Puis, enfin, le temps. «C'est important de ne pas brusquer les choses et de s'assurer que les besoins de tous sont bien compris», poursuit Élisabeth Bélanger.

Un autre facteur semble avoir joué en faveur des deux dirigeantes, soit l'«attachement». «Le transfert doit être plus difficile quand il s'agit du fondateur de la compagnie, reconnaît Élaine Bélanger. Dans notre cas, l'attachement à l'entreprise était peut-être plus fort pour nous qu'il ne l'était pour notre père. Est-ce qu'on sera aussi bonne que lui quand viendra notre tour de passer le flambeau ? Ça reste à voir !» dit-elle.

Fait rassurant pour l'avenir, les deux soeurs partagent la même vision pour leur entreprise. Toutes deux veulent sa croissance, sans toutefois sacrifier leur qualité de vie.

PROFIL

Activité de l'entreprise : Transformation alimentaire

Année de fondation : 1983

Siège social : Québec

Effectif : 25

Marché : Canada

Chiffre d'affaires : 10 M$

Actionnariat : Élaine et Élisabeth Bélanger

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