La prescription de Pierre Fitzgibbon pour faire croître Atrium

Publié le 28/09/2013 à 00:00, mis à jour le 26/09/2013 à 09:37

La prescription de Pierre Fitzgibbon pour faire croître Atrium

Publié le 28/09/2013 à 00:00, mis à jour le 26/09/2013 à 09:37

Ce n'est pas parce qu'elle a pris une pause d'acquisitions qu'Atrium Innovations a chômé. Son président et chef de la direction, Pierre Fitzgibbon, explique comment le spécialiste des produits de santé naturels a retrouvé la forme à la suite d'un ménage salutaire.

Mêmi si l'action d'Atrium Innovations (Tor., ATB, 17,59 $) a rebondi de 78 % depuis novembre, Pierre Fitzgibbon sait qu'il doit encore convaincre les investisseurs qu'il a trouvé la bonne dose entre croissance et rentabilité afin d'enrichir ses actionnaires.

Une douzaine d'acquisitions majeures en 10 ans, qui totalisent 500 millions de dollars, ont donné à la société la masse critique nécessaire pour se tailler une place dans l'industrie américaine des produits de santé naturels, un marché de 30 G$. Des pertes inattendues de revenus en 2009 et en 2010 chez des entreprises acquises et une dette importante à digérer ont malmené son titre en Bourse.

Le cours de l'action est toujours de 42 % sous le sommet de juillet 2007, même après sa récente remontée.

«Il est naturel qu'après les événements de 2009-2010, les actionnaires veuillent l'assurance qu'il n'y aura pas d'autres squelettes dans le placard. C'est à nous de prouver, avec nos résultats, que nous avons la plateforme pour leur procurer à l'avenir une croissance rentable et plus constante», a confié M. Fitzgibbon, qui nous a reçu dans la salle de conférence blanche immaculée du siège social de Montréal.

À cet égard, la hausse de 10,9 % des revenus et de 21,6 % du bénéfice par action au deuxième trimestre est plus représentative de la nouvelle Atrium, dit-il, bien qu'elle reflète un rebond plutôt que la vitesse de croisière à laquelle aspire la société.

«Si nous pouvions faire croître nos revenus à un rythme annuel de 5 % à 7 %, notre bénéfice d'exploitation de 8 % et notre bénéfice par action de plus de 10 %, je crois que notre multiple d'évaluation pourrait doubler», explique l'ex-responsable du financement des entreprises à la Banque Nationale.

Le virage d'Atrium commence à redonner confiance à certains financiers. Martin Landry, de Valeurs mobilières GMP, vient de porter son cours cible de 19 $ à 21 $. Il juge que la croissance rapide des produits nutritionnels Garden of Life aux États-Unis nourrira la croissance d'Atrium. Dopée par ses probiotiques, ses poudres de protéines et ses graines de chia et de lin, Garden of Life est passée du 13e au 1er rang du marché américain des produits naturels, depuis son acquisition en 2009.

Un ménage salutaire

Autre volte-face qui commence à plaire aux analystes et aux gestionnaires : la récente croissance des revenus de la société provient entièrement de l'interne, sans l'aide d'acquisitions. Auparavant, les deux tiers provenaient de ses acquisitions.

Sa dernière bouchée majeure, Minami Nutrition, remonte à décembre 2010. Atrium s'applique depuis à intégrer toutes ses acquisitions, à améliorer l'efficacité des usines, à harmoniser ses pratiques d'affaires et à renforcer son équipe de ventes.

Ce changement de cap coïncide avec la modification de la rémunération à long terme des dirigeants en 2011. Dorénavant, le régime d'intéressement à long terme récompense le rendement du capital investi au lieu des gains de parts de marché, la croissance du bénéfice par action et celle du prix de l'action.

L'harmonisation des pratiques d'affaires des 12 unités d'exploitation est terminée aux deux tiers, par l'intermédiaire des services partagés implantés depuis 18 mois.

L'intégration des unités manufacturières et des centres de distribution, à l'aide d'un nouveau progiciel de gestion intégrée, sera achevée à la fin de 2014.

Le retour des acquisitions

D'ici 2016, Atrium aimerait bien atteindre le seuil d'un milliard de revenus.

Avec cette taille, la société pourra mieux amortir le coût de ses services partagés qui dispensent les fonctions administratives, scientifiques, juridiques, des ressources humaines et de comptabilité à toutes les unités d'affaires et à leurs 16 marques de commerce, explique le PDG, avec le débit rapide qu'on lui connaît.

Pour atteindre cette cible, l'ex-banquier qui se qualifie d'intrapreneur reviendra bientôt aux acquisitions, mais elles devront être au service de la stratégie de croissance interne.

Atrium est notamment à l'affût de produits de spécialité qu'elle pourra ajouter aux gammes qu'elle offre déjà aux professionnels de la santé. «Ce seront de petites acquisitions ciblées de produits complémentaires», assure le dealmaker.

Pour le marché en forte croissance des magasins d'aliments naturels, le patron d'Atrium compte acheter d'autres marques qui seront offertes aux détaillants qui vendent déjà ses produits à succès Garden of Life.

«On bénéficiera ainsi du levier de tout le capital investi dans cette plateforme.»

Exploiter ses avantages concurrentiels

Atrium est bel et bien le chef de file américain des produits en magasin d'alimentation naturelle, mais ne s'approprie que 3 % de ce marché et 11 % du créneau des produits pour les professionnels de la santé. «Avec des ventes de 300 millions de dollars aux États-Unis, on est encore bien petit», indique M. Fitzgibbon.

L'entreprise de Québec doit donc exploiter ses avantages concurrentiels au maximum. D'où la décision d'Atrium d'implanter et de faire accréditer ses sept usines, conformément aux bonnes pratiques de fabrication de son secteur.

Le fait qu'Atrium fabrique 80 % de ses produits est en soi un avantage concurrentiel.

L'entreprise investit aussi 5 M$ dans des études cliniques afin d'appuyer les revendications pour ses produits, ce qui lui permet de se différencier des autres fournisseurs.

«Les investissements requis pour respecter les normes de réglementation ont grugé environ 2 % de notre marge, mais cet effort nous distinguera de nos concurrents plus artisanaux qui seront incapables de suivre le mouvement», assure M. Fitzgibbon.

Quand l'industrie s'épurera de ses acteurs artisanaux, Atrium pourra mieux imposer ses prix et ainsi refiler aux consommateurs ses coûts de réglementation plus élevés. «Nous pensions y être déjà arrivés, mais il reste encore un peu trop de fournisseurs marginaux», explique le patron.

Atrium investit aussi 28 M$ dans un nouveau progiciel de gestion d'Oracle pour atténuer les pressions de ces coûts.

«C'est notre projet le plus exigeant. Nous récupérerons la moitié de l'investissement en réduisant nos stocks. L'autre moitié viendra de la veille stratégique que nous procurera le progiciel concernant les tendances d'achat de nos clients», explique M. Fitzgibbon.

Pour hausser davantage la barre, Atrium vient aussi de recruter un expert de la chaîne d'approvisionnement et de la fabrication dans un nouveau rôle au comité de direction, celui de responsable mondial de l'approvisionnement et des opérations techniques.

Arrivé en poste le 3 septembre, Don Allen travaille à l'usine de Pittsburgh, le centre névralgique de toutes les usines. «M. Allen vient de Pfizer, dont les pratiques représentent ce vers quoi nous voulons tendre», évoque le quinquagénaire.

Pour gagner en efficacité, le dirigeant veut aussi dissocier les usines des marques pour que les centres de fabrication soient associés à une formulation, tels que les capsules, les comprimés ou les liquides. «On pourra fabriquer juste-à-temps. La chaîne américaine Whole Foods Market n'aura pas à attendre 12 semaines pour des probiotiques qu'elle veut offrir en promotion.»

Après la Chine, la Russie et le Brésil

À l'international, la réputation des marques d'Atrium constitue un avantage concurrentiel que la société entend bien exploiter. Notamment en Chine.

«Je connais assez bien la Chine pour en avoir peur. On mise sur nos marques Garden of Life et Pure et on s'allie à un partenaire», explique le globe-trotteur.

En février, Atrium a investi un million de dollars dans une coentreprise avec le géant pharmaceutique chinois Fosun Pharma pour y distribuer ses produits, de façon à partager le risque, explique le PDG.

«Les premières expéditions de Boston vers la Chine auront lieu au troisième trimestre actuel. On commence de façon modeste.»

La Russie et le Brésil pourraient suivre bientôt. À Moscou, Atrium vise aussi un partenariat pour mieux naviguer dans les lois et les marchés locaux.

Au Brésil, Atrium pourrait faire cavalier seul, mais la décision définitive n'est pas encore arrêtée. «Ce pays est plus naturel pour nous, car il est dans le même fuseau horaire et sa classe moyenne consomme des produits naturels comme en Amérique du Nord», explique M. Fitzgibbon.

Pour croître, Atrium offre ses marques internationales dans de nouveaux marchés, tel que le supplément d'oméga-3 PLUSEPA de la marque Minami Nutrition en Allemagne, où elle vend déjà l'anti-inflammatoire Wobenzym Plus, profitant ainsi de son réseau de distribution.

La société met aussi au point de nouveaux produits. En 2012, Atrium en a lancé 150, dont 16 provenaient de son programme de R-D.

M. Fitzgibbon est particulièrement fier de Klean Athlete, une gamme de produits qui comprend des probiotiques, des vitamines et des électrolytes à l'intention des athlètes et des sportifs. Cette gamme répond aux exigences de la certification NSF Certified for Sport. Ce premier lancement d'une nouvelle marque, dans une nouvelle catégorie, s'inscrit bien dans la prescription de croissance de Pierre Fitzgibbon.

dominique.beauchamp@tc.tc

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