L'activisme dérange, mais est rentable pour les actionnaires

Publié le 04/02/2012 à 00:00

L'activisme dérange, mais est rentable pour les actionnaires

Publié le 04/02/2012 à 00:00

Par Dominique Beauchamp

Bill Ackman demande la tête du président du Canadien Pacifique pour y installer l'ex-pdg de sa grande rivale, le Canadien National. Un investisseur réclame des changements au conseil de Technologies Miranda pour fouetter sa stratégie. Les activistes sont de retour, pour le meilleur et pour le pire. Controversées, leurs interventions donnent souvent des résultats.

Les investisseurs activistes n'ont pas tous autant de culot que Bill Ackman, de Pershing Square Capital Management, à l'égard du Canadien Pacifique (CP), mais ils sont plus nombreux à réclamer des changements dans les entreprises dans lesquelles ils ont investi.

«Le phénomène est en partie conjoncturel. Il existe un lien direct entre la mauvaise performance boursière et l'appétit de changement des investisseurs dans les sociétés», dit Brad Allen, de Laurel Hill Advisory, une firme spécialisée dans la sollicitation de procurations.

Les cas d'activisme ne sont pas aussi nombreux qu'en 2010, avec 40 campagnes de sollicitation de procurations, mais 2012 devrait connaître 25 de ces campagnes, le même nombre que l'an dernier, dit-il.

Viser des gains à court terme ?

L'activisme pourrait croître davantage si les interventions les plus spectaculaires, comme celle qui concerne le CP, donnent des résultats, avance M. Hall.

Des réussites procureront aux investisseurs le sentiment qu'ils peuvent influencer le conseil d'administration des entreprises, estiment les deux experts.

L'activisme a toutefois mauvaise réputation, car il met l'accent sur les gains à court terme.

«L'activisme du type hedge fund [fonds de couverture] n'est pas une bonne chose pour le fonctionnement des entreprises. Ma principale crainte est qu'il impose des vues à très court terme aux entreprises. Il ne faut pas oublier que ces actionnaires n'ont aucune obligation fiduciaire d'agir dans l'intérêt de la société ni des autres actionnaires ; le conseil d'administration, oui», souligne Stéphane Rousseau, titulaire de la Chaire en droit des affaires et du commerce international, à la Faculté de droit de l'Université de Montréal.

Steve Boland, analyste chez Odlum Brown, est plus partagé. «Parfois, des investisseurs interviennent pour empocher des gains rapides, sans se préoccuper des ramifications de leurs gestes.» C'est le cas, par exemple, quand un activiste fait pression pour qu'une société s'endette, afin de racheter ses actions. Cela affaiblit l'entreprise lorsque la conjoncture économique se détériore, dit M. Boland.

L'activisme peut être parfois dommageable, croit aussi Peter Pucetti, président de Goodwood, un investisseur activiste occasionnel. Aux États-Unis, Edward Lampert a siphonné le capital de Sears, au point où le détaillant se trouve fragilisé, après des années de négligence des magasins, donne-t-il en exemple.

Des interventions payantes

Qu'on aime les activistes ou non, leurs interventions donnent des résultats, dit Brav Alon, professeur de finance à la Duke University. Celui-ci a participé à la plus importante étude sur l'activisme des fonds de couverture (mai 2008), en étudiant 1 059 cas aux États-Unis, de 2001 à 2006.

«Bien que la majorité des gains surviennent au cours des 20 jours qui précèdent et des 20 jours qui suivent l'intervention d'un activiste, ces gains sont durables pendant au moins 12 mois», a-t-il dit en entrevue.

«Les activistes créent de la valeur en améliorant la rentabilité et la productivité des entreprises qu'ils ciblent», affirme M. Alon. Les activistes sont souvent perçus comme des prédateurs par les dirigeants des entreprises ciblées, car leur intervention mène souvent à l'éjection du président, ajoute-t-il.

Maintenant que M. Pucetti gère une entreprise en exploitation, Westaim (propriétaire de l'assureur québécois Jevco), il dit voir l'envers de la médaille. «Je comprends mieux les cadres maintenant. Ils se démènent pour faire croître leur entreprise et dépister des acquisitions rentables.»

Même lorsque les activistes ne réussissent pas à faire élire leurs administrateurs aux conseils d'administration, les entreprises ciblées mettent souvent en oeuvre des mesures pour relever leur rendement.

Ainsi, dans le cas du CP, le président du transporteur ferroviaire, Fred Green, accélère déjà le plan d'amélioration de l'efficacité et de la fluidité de son réseau de chemin de fer, avant même que M. Ackman n'ait pu proposer aux actionnaires ses propres candidats au conseil du CP.

«Règle générale, c'est une bonne chose qu'ils existent. En fait, ils ne sont pas assez nombreux dans un marché où les dirigeants ont l'emprise de leur conseil d'administration», indique Alain Chung, portefeuilliste chez Claret.

«Les activistes jouent un peu le rôle de chien de garde. Parfois, ils sont en conflit d'intérêts. Il faut analyser au cas par cas.»

«L'activisme n'a pas qu'un effet à court terme, la rentabilité et la productivité des entreprises ciblées s'améliorent.» - Alon Brav, professeur de finance, Duke University

«Chaque entreprise doit déjà soupeser ses objectifs de rendement à court et à long terme. L'activisme joue un rôle important en permettant aux actionnaires d'instituer des changements constructifs pour améliorer le rendement des entreprises en Bourse.» - Eric Rosenfeld, un financier new-yorkais à la tête de Crescendo Partners, une firme qui pratique l'activisme au Canada depuis presque 20 ans.

PARCOURS BOURSIER DU TITRE DU CP

30 août 2011 56,72 $

27 septembre 2011

50,00 $

Date à laquelle Pershing aurait accumulé 12,2 % des actions du Canadien Pacifique.

27 Janvier 2012

71,49 $

Le titre s'est apprécié de 43 % depuis l'offensive de Pershing.

dominique.beauchamp@tc.tc

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