Investisseurs indiciels : le moment est-il venu de modifier votre approche ?


Édition du 16 Novembre 2013

Investisseurs indiciels : le moment est-il venu de modifier votre approche ?


Édition du 16 Novembre 2013

Par Jean Gagnon

Richard Guay, de l'ESG UQAM

Après le rebond marqué des Bourses depuis cinq ans, devriez-vous craindre que le marché haussier tire à sa fin et modifier votre approche pour favoriser une gestion plus active de votre portefeuille ?

La popularité croissante des fonds négociés en Bourse (FNB) a amené de nombreux investisseurs à se coller aux indices boursiers au cours des dernières années.

L'approche indicielle a été payante : depuis cinq ans, l'indice phare américain S&P 500 a grimpé de plus de 150 %. Seulement cette année, il affiche un gain de 25 % après les 10 premiers mois.

Les investisseurs dits passifs ont donc profité de l'ascension de la Bourse sans avoir à se soucier de cerner les meilleures occasions de placement.

La situation pourrait toutefois être fort différente si un marché baissier devait s'installer, car l'expérience démontre que ceux-ci ont généralement comme résultat de rogner la valeur des indices de 20 % ou 30 %, voire plus.

Changer son fusil d'épaule ?

Le débat à savoir si la gestion active est préférable à la gestion indicielle dans certaines circonstances, comme celle d'un marché baissier, risque de ne jamais être résolu, craint Marc Dubuc, directeur principal, stratégie marketing et gestion de l'offre chez Desjardins.

Lors des périodes de marché haussier, les titres de la plupart des secteurs sont susceptibles de s'apprécier. «Dans ce contexte, cela a beaucoup de sens d'être indiciel», dit-il.

Mais lorsque les marchés baissent, est-ce qu'une gestion active permet de moins perdre et même de réaliser un rendement positif ? «Théoriquement, on peut le croire, mais le problème est que les marchés sont imprévisibles. Ce n'est qu'après coup qu'on saura avec certitude qu'on était dans un bear market», fait valoir Marc Dubuc.

Le meilleur choix

Comme il est impossible de prévoir l'évolution des Bourses, détenir un FNB qui reproduit un indice à peu de frais est la meilleure solution pour l'investisseur individuel, soutient Richard Guay, professeur de finance à l'ESG UQAM et ex-pdg de la Caisse de dépôt et placement du Québec. M. Guay privilégie cette approche car, selon lui, l'efficience des marchés laisse peu de place pour dégager une valeur ajoutée grâce à la gestion active.

Faire une gestion active de son portefeuille, ou le confier à un gestionnaire, comporte des coûts. Le temps qu'il faut y consacrer, le coût de la recherche, celui de l'équipement informatique ou autre.

Et lorsqu'on tient compte de tous ces frais, des études démontrent que 70 % des gestionnaires ne réalisent pas un rendement supérieur à leur indice de référence, affirme M. Guay. Ce qui veut dire, par exemple, qu'en achetant le fonds négocié en Bourse XIU qui reproduit la performance de l'indice des grandes capitalisations de la Bourse de Toronto, le S&P/TSX 60, l'investisseur aura de fortes chances d'obtenir un meilleur rendement que s'il détient l'un des multiples fonds communs d'actions canadiennes.

L'utilité de la gestion active

La gestion indicielle comporte des vices structurels, nuance Vincent Fournier, gestionnaire de portefeuille chez Corporation Gestion de placements Claret. Les indices boursiers sont généralement pondérés par la capitalisation boursière des différents titres. Ainsi, 50 % de la pondération du S&P 500 se retrouve dans seulement 10 à 20 % des entreprises. «Vous êtes donc principalement investis dans les sociétés les plus chères, ou qui se sont le plus appréciées», explique M. Fournier. De plus, en investissant dans un indice boursier, «vous investissez dans toutes les entreprises qui composent l'indice, même les mauvaises !»

Les tenants de la gestion indicielle reconnaissent tout de même certains avantages à confier la gestion de son portefeuille à un spécialiste, indique Richard Guay.

D'abord, parce que le gestionnaire pourra atténuer le regret lors des périodes difficiles. Si les gestionnaires ne réussissent pas à prévoir les Bourses, ils pourront tout de même bien expliquer à l'investisseur pourquoi les marchés reculent, ce qui peut souvent être un facteur réconfortant. Ils peuvent également empêcher l'investisseur de liquider des placements au mauvais moment.

Enfin, parce que les gestionnaires sont tenus à des règles, ils évitent parfois les effets de certains événements dont les conséquences ont été catastrophiques pour les investisseurs, comme l'épisode de Nortel lors de la bulle technologique.

À la suite d'une spéculation effrénée, Nortel a atteint une pondération excessive de plus de 30 % de l'indice de la Bourse de Toronto. Lorsque l'effondrement de Nortel s'est amorcé, les détenteurs de fonds qui reproduisent l'indice canadien ont subi de lourdes pertes, compte tenu de la pondération du titre dans l'indice.

Bon nombre de portefeuillistes et de fonds commun tenus à une règle leur interdisant d'investir plus de 10 % de la valeur du portefeuille dans un seul titre ont perdu beaucoup moins que l'indice et que les investisseurs indiciels.

Une décision qui doit venir du client

À l'exception de ce genre de cas plutôt exceptionnels, la feuille de route relative des gestionnaires actifs n'a pas été meilleure pendant les marchés baissiers qu'elle ne l'a été lors des marchés haussiers, affirme Richard Guay.

Peuvent-ils vous protéger contre un retournement de marché ? «C'est peu probable», répond l'ex-pdg de la Caisse. Bien que le marché semble actuellement essoufflé, il serait étonnant que le gestionnaire prenne la décision de vendre une partie des titres du portefeuille parce qu'il croit à une chute imminente des marchés. «Aller à contre-courant, pour les gestionnaires, ce n'est pas un exercice facile», dit-il. Dans la plupart des cas, le rendement se mesure par rapport à l'indice de référence. Par conséquent, les gestionnaires craignent de s'en éloigner. Prendre la décision de vendre une bonne partie du portefeuille doit donc venir du client, croit Richard Guay.

Le meilleur des deux mondes

Débattre de l'avantage d'opter pour une gestion indicielle dans certaines conditions ou de celui de choisir une gestion active dans d'autres constitue un faux débat, selon Alain Desbiens, vice-président, BMO Gestion mondiale d'actifs. «Il faut plutôt débattre de la façon dont on peut combiner les deux», dit-il. Selon lui, une telle approche permettra de construire le portefeuille le plus performant.

La gestion indicielle offre un rendement égal au rendement de la Bourse ou d'un secteur du marché. C'est ce que l'on appelle le coefficient bêta. La gestion active, pour sa part, permet d'obtenir un rendement excédentaire à celui de l'indice grâce à une sélection appropriée de titres individuels, à une rotation sectorielle tactique ainsi qu'au recours à d'autres stratégies actives. C'est le coefficient alpha.

Le portefeuille optimal est celui qui combine les deux composantes dans des proportions adaptées à la tolérance au risque de l'investisseur, soutient Alain Desbiens.

Les experts recommandent d'utiliser les produits indiciels pour investir dans les marchés qui sont les plus efficients, car même les meilleurs gestionnaires peinent à créer une valeur ajoutée sur ces marchés, étant donné que tous ont rapidement accès à la même information. Mais c'est l'inverse pour les marchés moins efficients, tels les marchés émergents. «La réglementation des valeurs mobilières et les obligations d'information ne sont pas aussi rigoureuses, si bien qu'un gestionnaire proactif a de meilleures chances de surpasser le rendement de l'indice. Une analyse approfondie peut lui révéler des informations qui sont connues seulement d'un petit nombre», avance M. Desbiens.

Avantages et inconvénients

Pour trancher entre les deux approches, il faut bien évaluer leurs avantages et leurs inconvénients.

Les avantages de la gestion indicielle, ou passive, sont de réduire les frais de gestion et de permettre un accès facile à des marchés et des catégories d'actifs grâce à des fonds sectoriels et régionaux. Les inconvénients sont l'impossibilité d'obtenir un rendement supérieur aux indices de référence et le risque d'une grande concentration dans des titres en particulier, en raison de la composition de l'indice.

Quant à la gestion active, les avantages sont la possibilité de rendements supérieurs à ceux du marché et une meilleure gestion des risques liée à la compétence du gestionnaire. Les inconvénients sont des frais de gestion nettement plus élevés et le risque d'un rendement inférieur à l'indice, malgré l'habileté du gestionnaire.

Une approche populaire

L'investissement dans les indices boursiers n'est pas nouveau. Il existe, depuis plus de 25 ans, des fonds communs de placement dont l'objectif a été de dupliquer les indices boursiers. Et les adeptes de cette façon d'investir se sont multipliés avec l'arrivée des fonds négociés en Bourse (FNB). Ce sont ces fonds qui copient les indices et qu'on achète à la Bourse, comme une action. Ils ont l'avantage de comporter des frais de gestion très bas.

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