Internet : un obstacle sur la voie rapide

Publié le 07/09/2013 à 00:00, mis à jour le 05/09/2013 à 09:38

Internet : un obstacle sur la voie rapide

Publié le 07/09/2013 à 00:00, mis à jour le 05/09/2013 à 09:38

L'industrie financière à Montréal pourrait profiter d'un projet de câble à fibres optiques qui devrait relier Londres à Tokyo... à condition que la route entre Radisson et Matagami, dans la Baie-James, soit réparée.

Hydro-Québec, qui paie pour l'entretien de la route, soutient qu'elle n'a pas à assumer la facture des travaux toute seule, tandis que Québec tarde à prendre une décision. Or, cet atermoiement pourrait forcer Douglas Cunningham, pdg d'Arctic Fibre, à revoir le tracé de son projet, qui devrait emprunter le passage du Nord-Ouest.

«Si on voit que les travaux ne seront pas menés dans les temps, on pourrait aller un peu plus loin, jusqu'à Moosonee, en Ontario, afin d'atteindre Toronto, a expliqué M. Cunningham à Les Affaires. Mais je préfère le tracé qui passe par le Québec, car il est plus court.» Advenant un tel changement du tracé, c'est Toronto plutôt que Montréal qui bénéficierait des avantages associés au projet.

Le tracé actuel du câble transatlantique, un projet de 620 millions de dollars, devrait desservir Montréal et New York grâce à une excroissance traversant la baie d'Hudson jusqu'à Chisasibi, au Québec. Ce lien conférerait à Montréal la connexion la plus rapide entre l'Asie et le nord-est de l'Amérique du Nord.

Cet avantage, qui se calcule en millisecondes, pourrait attirer à Montréal des sociétés qui font des échanges boursiers à haute fréquence (high frequency trading) et qui sont toujours à la recherche de moyens de négocier plus rapidement. Elles sont nombreuses au New Jersey, où elles sont plus près des principaux câbles transatlantiques. Le lien pourrait aussi avoir un impact positif sur les centres de données montréalais. Grâce à lui, ils seraient mieux positionnés pour servir le marché asiatique et moins dépendants des câbles passant par le New Jersey, souvent endommagés.

Un tronçon essentiel

Afin de lier son câble aux réseaux à fibres optiques majeurs qui desservent le continent, Arctic Fibre devra installer un câble terrestre entre Radisson et Matagami. Il n'y a pas mille et un moyens de passer de la fibre optique entre ces deux villes. Il faudra placer le câble dans une gaine, puis l'enfouir sous l'accotement de la route de la Baie-James.

Douglas Cunningham devra toutefois attendre que la réfection de la route soit achevée avant d'installer son câble, dont la partie sous-marine devrait être déployée en 2015. Or, même si le gouvernement débloquait les fonds immédiatement, les travaux pourraient difficilement être finalisés avant 2019, selon Raymond Thibault, pdg de la Société de développement de la Baie-James (SDBJ). Douglas Cunningham, qui croyait que les travaux dureraient moins longtemps, attendra d'y voir plus clair avant de prendre une décision.

L'homme d'affaires de Toronto assure que son projet de câble serait viable même s'il devait renoncer à passer un câble dans la baie d'Hudson. En effet, le projet vise avant tout à offrir une voie plus rapide reliant les places financières de l'Europe à celles de l'Asie. Douglas Cunningham fait également valoir que le câble permettra à plusieurs communautés autochtones nordiques d'avoir accès à Internet haute vitesse.

Même s'il était raccordé à l'Amérique du Nord par Chisasibi, le câble ne devrait pas faire ombrage au Project Express de Hibernia Networks, un projet de câble transatlantique reliant Londres et New York, qui devrait être inauguré cette année. «Chez Hibernia, le grand argument, c'est de vendre une connexion plus rapide aux financiers, explique Yves Poppe, consultant pour l'Échange Internet de Montréal. En traversant l'Atlantique plus au nord, ils gagnent quelques fractions de seconde [la circonférence de la planète y étant plus petite].»

Des travaux de 150 à 205 M$

Au printemps dernier, un pan de la route de la Baie-James s'est affaissé, tandis que plusieurs ponceaux qu'elle traverse ont atteint la fin de leur vie utile. «On n'a plus assez d'argent pour remplacer les panneaux de signalisation et même pas assez pour répandre du sel l'hiver prochain», dénonce Raymond Thibault, pdg de la SDBJ, qui dépend de la route.

Hydro-Québec, qui verse 5 M$ par année à la SDBJ pour l'entretien de la route, considère que celle-ci a plusieurs utilisateurs et, par conséquent, qu'elle n'a plus à assumer le coût total de son entretien. «Nous avons toujours maintenu que nous sommes prêts à contribuer au financement en tant qu'utilisateurs, au même titre que les autres», explique Marie-Élaine Deveault, d'Hydro Québec. La SDBJ estime qu'il lui faudrait au moins 8 M$ par année pour entretenir la route et de 150 à 205 M$ pour les travaux de réfection qui s'imposent.

Comme la route n'est pas sous la responsabilité du ministère des Transports, son financement relèverait d'une décision politique. Le ministère des Ressources naturelles, dont relève la SDBJ, a le dossier entre les mains depuis 2012. Interrogée à savoir quand une décision serait prise, Geneviève Héon, attachée de presse de la ministre des Ressources naturelles, Martine Ouellet, s'est limitée à dire que le ministère était en discussions «avec différents partenaires».

julien.brault@tc.tc

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