Essentiels, ces entrepreneurs venus d'ailleurs

Publié le 19/03/2011 à 00:00

Essentiels, ces entrepreneurs venus d'ailleurs

Publié le 19/03/2011 à 00:00

Le Québec manque d'entrepreneurs. On commence à reconnaître cette vérité dérangeante. Heureusement, il y a les immigrants.

Le portrait exact est difficile à obtenir, mais on admet généralement que la proportion d'entrepreneurs au sein de la population immigrante est plus forte que chez l'ensemble des Québécois. La raison est simple : lorsqu'on débarque en sol étranger, on n'a souvent pas le choix que de créer son propre emploi, d'autant plus qu'on arrive avec des idées et des connaissances nouvelles et qu'on peut mettre à profit des contacts dans son pays d'origine.

C'est ce qui nous a notamment valu une révolution dans le domaine alimentaire : grâce aux restaurants, évidemment, mais également à toutes sortes de produits importés, jadis qualifiés d'exotiques. C'est le " syndrome couscous ", si vous voulez ! Peu de Québécois de souche s'en plaindront. Cette savoureuse diversité de l'alimentation est maintenant bien ancrée dans nos vies.

Les immigrants font sentir leur présence et leur dynamisme dans un autre domaine : celui des technologies de l'information.

Un relevé effectué par l'Association québécoise des technologies (AQT) pour Les Affaires le montre bien. Chaque année, l'AQT organise à Tremblant l'événement Vision PDG. Cette année, 120 pdg de technos y ont participé, dont une bonne douzaine sont des immigrants de première ou de deuxième génération. Des entrepreneurs comme Éric Le Goff, par exemple.

Son nom ne laisse aucun doute sur son origine bretonne. En 1996, fraîchement arrivé de France, il fondait sa propre firme, CMT, devenue aujourd'hui Solutions Abilis. L'entreprise, installée au centre-ville de Montréal, se spécialise dans le développement d'applications sur mesure pour de grandes organisations. Des mandats lui sont attribués, par exemple de Bell Canada, de l'État de New York ou de celui de la Virginie, aux États-Unis. Et M. Le Goff est bien fier de dire que sa firme garantit les résultats de ses interventions : " Nous prenons le pari de la réussite. "

Pour y parvenir, il mise sur ses 160 employés, dont 80 % sont nés à l'extérieur du Canada. Ils proviennent aussi bien d'Europe que d'Afrique du Nord ou d'Amérique du Sud : en tout, des personnes de 22 nationalités différentes se côtoient chez Solutions Abilis. " Nous cherchons du personnel de haute compétence, alors que le marché souffre déjà d'une pénurie d'informaticiens ", dit-il.

Il lui faut donc ratisser large et les néo-Québécois forment un intéressant bassin de main-d'oeuvre. " Nous avons ciblé des immigrants qui n'avaient pas trouvé de travail répondant à leurs qualifications ", ajoute-t-il, en rappelant qu'un immigrant sur deux possède un diplôme universitaire en arrivant au Québec. Toujours cette fichue question de la reconnaissance des compétences... Ce sont cependant des candidats hautement motivés. Et, pour abaisser la barrière de la langue, l'entreprise a obtenu la collaboration de la Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys. Des enseignants donnent des cours de français sur place, en dehors des heures de travail, ce qui facilite naturellement l'intégration au milieu. Globalement, 75 % du chiffre d'affaires de Solutions Abilis vient de l'extérieur du Québec, en forte majorité des États-Unis. Mais le travail est effectué aux trois quarts à Montréal. " De la création de richesse pure ", dit M. Le Goff.

Québec doit encourager l'immigration

Sans sa détermination d'immigrant entrepreneur, cette richesse n'existerait pas. Sans le travail de ses employés venus d'ailleurs, il serait dépourvu. Ce n'est qu'un cas parmi des milliers d'autres au Québec. Et on voudrait prétendre que l'immigration ne contribue pas à dynamiser l'économie québécoise ? Qu'elle n'est qu'un " remède imaginaire ", pour reprendre le titre de cet ouvrage de Benoît Dubreuil et Guillaume Marois, récemment publié aux Éditions du Boréal ?

Personne n'a jamais soutenu que l'immigration allait à elle seule sauver l'économie québécoise. Toutefois, malgré des politiques profamilles uniques en Amérique du Nord, le taux québécois de natalité n'atteint même pas le seuil de renouvellement des générations, soit 2,05 enfants par femme. Déjà, pour ne pas reculer, il nous faut du renfort. Si on y ajoute notre apathie entrepreneuriale, ce renfort devient encore plus urgent. Le Québec peut et doit encourager l'immigration.

DE MON BLOGUE

Emploi et chômage

Ils ont un goût amer, ces nouveaux emplois

Statistique Canada vient de signaler un gain de 15 000 emplois en février au Canada. Encourageant ? Non. Plutôt très décevant. Dans les faits, le pays a perdu beaucoup d'emplois à temps plein, 24 000, alors qu'il en a " gagné " 39 000 à temps partiel. Cette proportion se retrouve quasi intégralement au Québec (suite sur le blogue).

Vos réactions

" Emplois temporaires et dans les services en plus; effectivement le pire est à venir pour les jeunes qui nous suivent. À moins qu'on prenne conscience qu'il faut générer de la richesse par des emplois dans le domaine manufacturier (il faudra augmenter notre productivité) et revoir le modèle. Ou à moins que notre bon gouvernement s'occupe de tout. "

- Dancorb

" Félicitations ! Commentaire empreint de réalisme et non de jovialisme, comme on l'entend et le lit chez trop de " istes " [...] Oui, ce serait bien de créer des emplois dans le domaine manufacturier. Mais le hic, c'est qu'on ferme trop d'usines dans nos économies occidentales. "

- Dencour

" Aucune augmentation des emplois dans le secteur privé depuis 2008. Le seul secteur en croissance est celui des fonctionnaires. "

- Incubus

rene.vezina@transcontinental.ca

blogue > www.lesaffaires.com/rene-vezina

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