D'artisan à détaillant, pour éviter les contrats «plates»

Publié le 12/01/2013 à 00:00

D'artisan à détaillant, pour éviter les contrats «plates»

Publié le 12/01/2013 à 00:00

Même s'il était officiellement en congé de paternité pour la naissance de son 3e enfant, l'ébéniste Mathieu Pellerin s'en allait livrer un lit quand il a pris le temps de nous parler de son autre bébé : son entreprise baptisée Meub.

Ouf ! L'heureux mais essoufflé papa n'a pas une minute pour reprendre son souffle. Aux commandes de Matpel depuis 2008, il vient de lancer Meub. L'artisan devient ainsi détaillant. Car, tandis que Matpel offrait un service de création de pièces uniques, sa seconde entreprise est un magasin en ligne de meubles.

«L'idée, c'est de rentabiliser davantage mes opérations, de mettre en place des standards, de faire des gains d'efficacité. Avec Matpel, on recommence toujours à zéro, ce qui fatigue l'atelier. Des socles pour casque de scaphandrier antique, je n'en referai pas d'autres. Toujours être dans l'inconnu, c'est thrillant, mais pas toute l'année !» lance le multiboursier (Sodec, Fondation du maire de Montréal, Jeune entrepreneur, etc.) qui a aussi reçu l'aide d'un mentor et participé à plusieurs formations en faisant le saut dans le monde des affaires.

Il faut savoir qu'à peu près rien ne prédestinait ce diplômé en économie et sciences politiques et en création littéraire à l'ébénisterie et au monde des affaires. Sinon son goût pour les défis. «Je suis allé à l'École nationale du meuble et de l'ébénisterie, parce que c'était un peu trop dur pour moi [et donc un défi intéressant]. Les études intellectuelles, c'était facile [...] J'ai tout appris des affaires à coup de "claques dans la face". Mes études ne m'avaient pas préparé à ça. C'est très dur, et il n'y a pas de repos. Mais c'est très stimulant.»

La première collection de Meub comprend une vingtaine de tables, de lits, de poufs et d'unités de rangement. Tout est fabriqué dans le quartier Rosemont, à Montréal, de façon écologique (sans COV - composés organiques volatils - ni formaldéhyde, entre autres). Le design est épuré, et le bois de qualité est mis en valeur.

Marché peu accaparé

Mathieu Pellerin espère que Meub aura assez de succès pour que les «deux ou trois» employés de Matpel et lui n'aient plus à «accepter de contrats alimentaires».

«On aimerait pouvoir s'en tenir aux projets d'estime, pouvoir être plus sélectifs et accepter seulement les projets qui nous font tripper d'un point de vue esthétique ou créatif. Le but, c'est d'éviter les contrats "plates".»

L'entrepreneur, qui a pris bien soin de consulter des experts en branding, en référencement sur le Web et en communications, a aussi discuté avec ses concurrents et d'autres entreprises de son secteur avant de se lancer dans cette aventure.

Ses démarches l'ont convaincu que la vente en ligne de meubles, «ça peut marcher», étant donné que le créneau n'est pas encore accaparé par ses concurrents et que les achats sur Internet ne cessent d'augmenter, détaille le jeune homme de 35 ans. Il ambitionne tout de même d'avoir une salle d'exposition et de vendre ses créations haut de gamme à d'autres commerces. Tant en 2010 qu'en 2011, environ 20 % des Québécois ont acheté des meubles ou des électroménagers sur le Web, selon le Cefrio, qui n'a pas de statistiques plus anciennes sur le sujet. Du côté d'Ikea, les ventes en ligne ont bondi au Canada de 37 % en 2011, par rapport à l'année précédente.

Les commodes et autres tables pourront être légèrement modifiées par les clients, mais ne seront pas toutes fabriquées à la demande. «C'est certain que je ne me monterai pas un stock de 15 à 20 lits», précise Mathieu Pellerin, qui a financé le lancement de ses deux entreprises tout seul. Pour «respirer mieux», il n'écarte plus l'idée de s'associer à un partenaire financier.

L'un de ses objectifs est de réaliser assez de profits pour acheter des appareils qui lui permettront de créer une mini-chaîne de production et d'embaucher un responsable de l'administration. Des ventes de 50 000 à 100 000 $ (une centaine de meubles) lui feraient dire qu'il a eu «une bonne première année».

Concurrents étrangers

Depuis un an, les nouveaux magasins de meubles sont nombreux dans la région de Montréal. Laval a accueilli l'automne dernier les enseignes Crate & Barrel (américain) et BoConcept (danois), tandis qu'Ethan Allen (américain), spécialisé dans le sur-mesure de qualité, s'est établi au centre-ville de Montréal. C'est sans compter l'ouverture d'un 4e magasin Germain Larivière, au Quartier Dix30 de Brossard.

Dans ce contexte, Meub arrive-t-il dans le marché au mauvais moment ? «Juste avant Noël, ce n'était pas le bon timing, répond l'ébéniste-entrepreneur. Mais en même temps, ce l'est, parce que le commerce électronique va forcément croître. Dans le meuble, tous ceux qui ont essayé ont trouvé ça trop lourd, mais moi, j'ai un petit site. Et puis, on va sortir de la crise à un moment donné !»

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