Ces néo-Québécois qui font rayonner le Québec

Publié le 22/06/2013 à 00:00, mis à jour le 20/06/2013 à 10:38

Ces néo-Québécois qui font rayonner le Québec

Publié le 22/06/2013 à 00:00, mis à jour le 20/06/2013 à 10:38

À la fin des années 1990, un employé d'origine indienne du groupe Canam aux États-Unis a dû retourner s'établir en Inde pour prendre soin de sa mère malade. Comme le fabricant québécois de composantes métalliques voulait garder ce bon employé, celui-ci est devenu la voix et le visage de Canam en Inde. Ainsi est née la filière indienne de l'entreprise, qui emploie maintenant 65 personnes.

Voilà un bel exemple du rôle que les immigrants jouent dans les activités de plusieurs entreprises québécoises à l'international. Et pour cause. Leur expertise, leurs connaissances et leurs réseaux de connaissances font d'eux des maillons vitaux de la chaîne logistique internationale de nos multinationales.

Un atout, disent des analystes qui s'intéressent aux enjeux d'immigration et de commerce international. «Les néo-Québécois sont souvent en contact avec leur pays d'origine. Ils connaissent les besoins et les occasions dans ces marchés», dit Claude Ananou, maître d'enseignement à HEC Montréal en entrepreneuriat et en création d'entreprises.

Claude Tardif, vice-président de l'Association des maisons de commerce extérieur du Québec (AMCEQ), abonde dans le même sens. «Sans eux, le commerce international du Québec serait moins important. Les immigrants connaissent bien le marché de leur pays d'origine, un avantage pour ceux qui les emploient», dit cet ancien distributeur qui a commercialisé des aliments canadiens dans une quarantaine de pays durant 30 ans.

Forte présence dans les PME

Impossible d'avoir une idée précise du poids des néo-Québécois dans les entreprises d'ici actives à l'international, car ni Statistique Canada ni l'Institut de la statistique du Québec ne colligent cette donnée.

Par contre, certaines estimations circulent dans le milieu. «Si on considère toutes les entreprises, incluant les Bombardier et les Saputo, je dirais qu'une personne sur deux occupant un poste lié à l'international est née à l'étranger», estime Diran Avedian, fondateur de Lactopur, de Montréal, qui vend du lait dans les pays émergents.

Cette proportion serait encore plus élevée si l'on tient seulement compte des PME. «Dans ce cas, ce serait de 85 à 90 %», dit le patron de Lactopur.

Dans l'entreprise de ce Québécois d'origine arménienne né au Liban, les sept employés sont des néo-Québécois. «Ça nous aide, mais ce n'est pas le seul facteur», dit ce patron capable de négocier dans six langues.

Cet ordre de grandeur est crédible, indique Christian Martin, président de l'AMCEQ et du Carrefour des communautés culturelles, un organisme mettant en valeur la contribution des immigrants à la vie économique du Québec.

«L'AMCEQ offre régulièrement des formations en commerce international. Chaque année, environ 80 % de nos étudiants sont issus des communautés culturelles», dit cet ancien banquier de la Banque Royale né en Guadeloupe, spécialisé dans le financement des transactions internationales.

Pas de barrières à l'entrée

À HEC Montréal, les néo-Québécois représentent aussi souvent la majorité des étudiants dans les cours de commerce international, mais surtout dans les cours en entrepreneuriat et ce, dans tous les programmes.

Au Canada, les immigrants qui se lancent en affaires sont surtout actifs dans le commerce et le transport, selon Statistique Canada. Bien qu'il n'y ait pas de statistiques précises à ce sujet, Claude Ananou souligne qu'il est reconnu que certaines communautés d'immigrants sont bien représentées dans des secteurs précis. Par exemple, ceux d'origine grecque sont actifs dans la restauration ; les Paskistanais exploitent beaucoup d'épiceries.

Ce qui les attire tant vers le commerce international ? Mesbah F. Sharaf, professeur au Département de sciences économiques de l'Université Concordia, émet des hypothèses. «Par exemple, contrairement à des professions réglementées comme la médecine, il n'y a pas de barrières à l'entrée dans ce secteur», dit-il.

Autrement dit, un acheteur, un négociant ou un distributeur compétent ne se fera jamais claquer la porte au nez d'un exportateur ou d'un importateur parce qu'il n'a pas étudié au Québec. Le corporatisme est pratiquement absent de ce secteur de l'économie québécoise.

Luc Savard, professeur au Département d'économique de l'Université de Sherbrooke, croit que les néo-Québécois sont très présents dans le commerce international parce qu'ils sont généralement plus ouverts à la mondialisation des marchés que ne le sont les Québécois de souche.

«Il y a récemment eu une levée de boucliers parce que le tiers des contrats d'Hydro-Québec sera ouvert à la concurrence étrangère dans l'éventuel accord de libre-échange entre le Canada et l'Union européenne. Or, si on ouvre cette porte aux Européens, elle le sera aussi pour les Canadiens en Europe, ce qui est un avantage pour nos entreprises», rappelle-t-il.

Des occasions d'affaires à l'étranger que beaucoup de néo-Québécois n'hésitent pas à saisir, souvent sans que leurs faits d'armes ne soient connus du grand public.

Qui sait, par exemple, qu'Almassa International, une maison de commerce dirigée par Fares Fares, un Québécois d'origine libanaise, est devenue l'un des plus grands exportateurs du Québec de produits forestiers, de papier journal et d'impression et de denrées agroalimentaires ? L'entreprise, fondée en 1997, exporte surtout en Afrique du Nord et au Moyen-Orient.

Les néo-Canadiens sont plus susceptibles de devenir travailleurs indépendants que les Canadiens nés au pays (17% comparativement à 12%). | Source : Statistique Canada

La Chine en tête

(Provenance des immigrants économiques du Québec, en 2012)

Chine 5 539

France 5 143

Haïti 4 742

Algérie 3 572

Maroc 3 474

Colombie 2 217

Cameroun 2 139

Égypte 1 740

Tunisie 1 362

Moldavie 1 139

Source : MICCQ

Des immigrants qualifiés

(Répartition des catégories professionnelles des immigrants économiques, en 2012)

36,9 % Nouveaux travailleurs

15,8 % Sciences naturelles et appliquées

12,2 % Affaires, finance et administration

9,5 % Sciences soc., enseign., adm. publique, religion

5,2 % Santé

5,4 % Vente et services

3,7 % Gestion

3,6 % Entrepreneurs et investisseurs

3,0 % Arts, culture, sports et loisirs

2,5 % Métiers, transport et machinerie

0,6 % Transform., fabrication, services d'utilité publique

0,3 % Secteur primaire

1,3 % Travailleurs non classés ailleurs

Source : MICCQ

françois.normand@tc.tc

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