Ce que vous ne savez pas sur Buffett et Graham

Publié le 05/10/2013 à 00:00, mis à jour le 03/10/2013 à 11:12

Ce que vous ne savez pas sur Buffett et Graham

Publié le 05/10/2013 à 00:00, mis à jour le 03/10/2013 à 11:12

Le value investing, qu'on pourrait traduire par la recherche d'aubaines, est la marque de commerce de grands du placement comme Benjamin Graham et Warren Buffett.

L'idée derrière cette approche est d'acheter des dollars à 0,50 $ ou moins. En langage financier, cela signifie de chercher à déterminer la valeur intrinsèque d'une société et ensuite de payer moins que cette valeur.

En d'autres termes, si vous déterminez que la société vaut 100 $ par action, vous voudrez payer 75 $ et moins de façon à vous donner une marge de sécurité.

D'ailleurs, ce concept de la marge de sécurité a été élaboré par Benjamin Graham, même si c'est surtout Warren Buffett qui l'a popularisé. Et loin de moi l'intention de le critiquer, car il est très sensé.

Ironiquement, une grande partie du succès de M. Graham en Bourse, et en moindre partie de M. Buffett, s'explique par un seul titre dont la performance exceptionnelle au fil des décennies les a enrichis de façon extraordinaire. Et le plus révélateur est que, peu importe le prix payé, aubaine ou pas, cela permet de faire fortune.

Ce titre est la société d'assurance automobile Geico, devenue en 1995 une filiale de Berkshire Hathaway, la société de Warren Buffett. Si vous lisez L'investisseur intelligent ou Security Analysis, les deux grands classiques de Benjamin Graham, vous verrez le thème de l'importance de la diversification revenir souvent.

Or, en 1948, M. Graham a brisé sa propre règle lorsque Graham-Newman, sa société de placement, a acheté 50 % de Geico pour 712 000 $ US, ce qui représentait 25 % de son capital dans un seul titre. Bref, en 1972, une action achetée 27 $ US, 24 ans plus tôt, valait 16 349 $ US ! On est loin de la transaction typique de Benjamin Graham du titre sous-évalué se vendant sous sa valeur de liquidation.

Et voici ce que M. Graham écrivait à ce sujet dans l'édition de 1971-1972 de L'investisseur intelligent :

«Les profits totaux de cette seule décision de placement ont de loin surpassé la somme de tous les autres profits réalisés pendant 20 années d'opération.»

Warren Buffett achète

De son côté, l'histoire de Warren Buffett avec Geico commence en 1950 et est liée à celle de M. Graham. Ce dernier était président du conseil de la société d'assurance ; cela a aiguisé la curiosité de M. Buffett, qui a donc tenté de tout savoir sur Geico.

En 1951, convaincu que c'était un bon placement, il a acheté 350 actions pour un total de 10 282 $ US. À la fin de l'année, M. Buffett avait plus de 65 % de sa valeur nette dans Geico.

L'année suivante, il a vendu ses actions pour 15 259 $ US afin d'acheter des titres d'une autre société d'assurance qui se vendaient à moins de deux fois les bénéfices. Or, dans les 20 années qui ont suivi, les actions de Geico que M. Buffett avaient vendues auraient pu valoir jusqu'à 1,3 M$ US. C'est ainsi qu'il a appris que vendre les actions d'une merveilleuse entreprise constituait une grave erreur.

Entre-temps, Geico a connu de graves difficultés, le titre passant de 61 $ US en 1972 à 2 $ US en 1976. L'assureur avait connu une longue période de croissance, mais s'était éloigné de son modèle d'entreprise qui repose sur la vente directe d'assurance auto à des conducteurs fiables. Ne payant pas d'agents, Geico avait une structure de coûts moins élevés lui permettant d'offrir des primes plus basses.

En 1976, le conseil d'administration de Geico a congédié le président pour embaucher John Byrne, devenu par la suite une légende dans l'industrie. Lorsque M. Buffett rencontre ce président, il est si impressionné que, dès le lendemain, il achète des actions. Et là aussi, le reste est de l'histoire.

Son premier achat : 500 000 actions à 2,13 $ US. En 1980, Berkshire avait accumulé 45 M$ US d'actions de Geico, soit 31 % de tout son portefeuille d'actions.

Croissance exponentielle

Pour vous donner une idée de l'appréciation du titre et de la croissance de la société, en 1994, Berkshire recevait 180 M$ en dividendes de Geico, ce qui représentait quatre fois le capital investi dans ce titre !

En 1995, Berkshire Hathaway a décidé d'acheter le reste des actions qu'elle ne détenait pas dans Geico, payant 2,3 G$ pour 49 % de Geico. Le prix payé était 136 fois celui du premier achat de M. Buffett en 1976.

Depuis sa privatisation, la performance de Geico a continué d'être exceptionnelle sous la direction de Tony Nicely. La société a maintenant 9,6 % du marché américain par rapport à 2 % avant l'arrivée de M. Nicely. Les primes annuelles ont quintuplé à 17 G$ US.

Il est si fascinant de voir comment un seul titre de croissance améliore un portefeuille à long terme. L'évaluation a son importance. Toutefois, comme l'exemple de Geico l'illustre avec grande éloquence, lorsque vous avez la bonne société, le prix n'est pas si important.

Warren Buffett et surtout Benjamin Graham sont devenus synonymes de recherche d'aubaines, mais il est faux de dire simplement que cela résume leur succès. Ce n'est pas vraiment ce qui les a rendus ultra riches.

bernard.mooney@tc.tc

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