Stingray réclame la fin des subventions aux sociétés étrangères

Publié le 16/06/2017 à 12:01, mis à jour le 21/06/2017 à 17:00

Stingray réclame la fin des subventions aux sociétés étrangères

Publié le 16/06/2017 à 12:01, mis à jour le 21/06/2017 à 17:00

Ça suffit les subventions aux entreprises étrangères, s'insurge le président de Stingray, Eric Boyko.

Le président et chef de la direction de Stingray (To., RAY.A), Eric Boyko, a réclamé haut et fort ce matin que Québec mette fin rapidement à toute forme de subvention ou crédits d’impôt aux entreprises étrangères, en particulier du secteur des technologies de l’information (TI).

L’homme d’affaires montréalais a profité de la conférence de presse annonçant l’agrandissement de ses locaux dans le Vieux-Montréal pour faire une critique en règle du système d’aide mis en place par le gouvernement du Québec au tournant des années 2000 pour inciter les entreprises étrangères du secteur des TI à venir s’établir dans la province.

«Je comprends qu’on ait voulu prendre les moyens pour bâtir un pôle industriel dans ce secteur. Mais vingt ans plus tard, il est temps de changer de stratégie et de réaliser que ces subventions n’ont plus leurs raisons d’être et nuisent aux entreprises d’ici.»

On estime que près de 500M$ sont annuellement versés à des entreprises étrangères du secteur des TI en échange d’emplois créés aux Québec. En outre, les entreprises de développement de jeux vidéo sont admissibles à un crédit remboursable qui couvre jusqu'à 37,5% des salaires des employés admissibles.

L’une des principales bénéficiaires de ce programme est la multinationale française de jeux vidéo Ubisoft, installée à Montréal, et qui emploie aujourd’hui quelque 3 000 personnes dans le quartier Mile End. «Ne vous inquiétez pas, a déclaré M. Boyko. Si Ubisoft venait à fermer demain matin, les 3 000 employés montréalais de l’entreprise française seraient immédiatement absorbés par les besoins de main-d’œuvre des entreprises du même secteur à Montréal.»

La course aux embauches

Actuellement, en plus de ses quelque 300 employés à Montréal, l’entreprise cherche à combler 70 nouveaux postes. D’ici la fin de l’année, M. Boyko parle de besoins d’une centaine d’autres travailleurs à embaucher d’urgence, sans quoi Stingray Digital Group (To., RAY.A) n’aura d’autre choix que de reporter la livraison d’une application en développement. Puis d'ici cinq ans, c'est de 400 nouveaux employés que l'entreprise prévoit avoir besoin.

Et ce ne serait là que la pointe de l'iceberg. Plusieurs entreprises du même secteur vivraient le même problème. Voisin de Stingray, rue Queen, la société Rodeo FX, spécialisée dans la conception d'effets visuels destinés à l'industrie du cinéma et de la télévision (Game of ThronesFear the Walking DeadArrival, etc.), ferait face aux mêmes difficultés de recrutement.

Son pdg, Sébastien Moreau confirme prévoir l'embauche prochaine d'une cinquantaine de nouveaux employés. Cet objectif de croissance de personnel de quelque 10% en un an, pour un total de 450 employés, est cependant compliqué par la présence à Montréal de vis-à-vis étrangers, comme la britannique Framestore CFC, ou l'américaine Moving Picture Company (MPC), également bénéficiaires de crédits d'impôt de Québec.

Le pdg de Stingray dit disposer de 25 à 50M$ pour procéder rapidement à des acquisitions d'entreprises de son secteur. À tel point que d'ici trois ans, il projette que 75% de ses revenus proviendront de l'extérieur du pays. Et résultat de cette croissance par acquisitions, l’entreprise prévoit devoir embaucher 400 nouveaux travailleurs d’ici cinq ans.

Le défi de telles embauches est déjà important, dit-il, en cette période où le taux de chômage au Québec n'est que de 6% et où la population active ne cesse de décliner. «Il l'est encore d'avantage lorsque des entreprises étrangères subventionnées par Québec se battent contre nous pour l'embauche des mêmes travailleurs», explique Eric Boyko.

Une odeur qui parle

Confiant de parvenir malgré tout à faire face à ces défis de croissance, Stingray annonçait ce matin l'expansion de son siège social dans une nouvelle tour de huit étages, attenante à ses bureaux actuels, situés à l'angle des rues Queen et Wellington. L'entreprise occupera six de ces étages, pour un total de 30 000pi2, tandis que Rodeo FX prévoit avant longtemps occuper les deux autres.

«Il était temps, nous a confié M. Boyko en marge de l'événement. Parce qu'à certains moments, avec l'intensité du travail qu'on retrouve ici, je ne vous cacherai pas qu'il finissait par se dégager une vague odeur de chambre de joueurs d'hockey dans nos bureaux. Sans blague!»

Le maire de Montréal, Denis Coderre, et la ministre du Patrimoine canadien, Mélanie Joly, participaient à l'annonce de Stingray. Le maire a vanté le dynamisme économique de Montréal, avec ses «76 grands chantiers» en cours pour des investissements de «21 milliards (G$)», tandis que la ministre Joly a parlé de l'industrie de la création  comme d'un produit d'exportation phare du pays. À elle seule, cette industrie engrangerait annuellement des revenus de 55 G$ et plus de 130 000 emplois au Canada.

De tous les paliers de gouvernements, seul celui du Québec brillait par son absence. Nos demandes visant à obtenir la réaction de la ministre québéoise de l'Économie, de la Science et de l'Innovation, Dominique Anglade, sur les propos d'Erik Boyco, étaient demeurées lettre morte au moment d'écrire ces lignes.

À une heure de la clôture des marchés, ce 16 juin, l'action de Stingray se négociait à 7,60$ à la Bourse de Toronto, en légère hausse de 0,10$ ou de 1,33%. Depuis le début de 2017, la valeur de son titre a reculé de 1,21$, ou de 13,89%.

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