Blogue. On aurait pu croire que l'avènement des paiements en ligne signale un nouvel âge d'or pour les cartes de crédit, et les services comme Paypal. Et d'une certaine façon, c'est le cas. Mais la popularité de la monnaie virtuelle auprès d'une clientèle trop jeune pour une carte de crédit est en train de donner naissance à un nouveau mode de paiement qui pourrait menacer le modèle établi.
Il y a quelques années, eBay et Paypal ont cristallisé une formule qui a été reprise par plusieurs grands joueurs du monde virtuel : donnez-moi votre numéro de carte de crédit et je vous donnerai les clés du royaume Internet.
Un modèle qui a d'ailleurs été repris par Apple, pour ses boutiques virtuelles (toutes dérivées d'iTunes, en fait). Et qui a été imité par Microsoft et Sony, pour le réseau propre à leur console de jeux vidéo respective (Xbox Live et PlayStation Store).
Mais il y a un hic.
L'autre jour, Bloomberg a publié les projections d'un analyste au sujet de la monnaie virtuelle, celle qui permet, dans des environnements comme celui de Second Life, FarmVille ou autres, où les principaux utilisateurs sont des adolescents, de jeunes qui n'ont pas l'âge légal pour posséder une carte de crédit.
Ses projections : il circule en ce moment pour 800 millions de dollars US de monnaie virtuelle sur ces sites. Sa valeur va doubler cette année, pour passer à 1,6 milliard $US. Et elle va encore un peu plus que doubler d'ici 2012, pour atteindre 3,6 G$.
Économie parallèle
Dans un billet écrit sous le mode « j'ai une idée tellement brillante que même moi j'ai de la misère à la comprendre », le blogueur américain Dave McClure va un peu plus loin : selon lui, c'est l'avenir même du commerce en ligne qui dépend de ce nouveau modèle d'abonnement à des services de paiement virtuels.
Son expérience chez Paypal lui a appris une chose : les mots de passe, les internautes détestent. À terme, des solutions comme Facebook Connect, GMail et iTunes (j'aurais ajouté une version plus évoluée d'OpenID) seront des incontournables pour les startups désirant adopter un modèle d'affaires par abonnement. Un seul compte, un seul mot de passe à retenir pour tout le reste.
Déjà, les développeurs d'applications mobiles suivent intuitivement ce modèle : ils laissent un autre s'occuper de la facturation. Sur un iPhone, pas besoin d'un mot de passe pour chaque application: un seul compte iTunes suffit pour toutes les transactions qu'on fait dans les applications créées par des tiers.
Pour le moment, la monnaie virtuelle est un marché émergent. 3,6 milliards, c'est une goutte dans la mer des transactions qui se font par crédit dans le monde.
Mais la monnaie virtuelle, plus les transactions sur des réseaux comme Xbox Live, plus des transactions de tout genre sur des sites ou des applications mobiles fonctionnant par abonnement, et ainsi de suite? Pour un marché émergent, ça commence à faire pas mal de débouchés...
Un filon pour les Couche-Tard et Vidéotron de ce monde?
Bref, à l'ombre de Paypal et de Visa, est en train de se créer ce qu'on pourrait appeler une économie parallèle, basée sur l'achat de biens et de services virtuels (par exemple, un faux-vrai cellulaire sur Second Life), avec une monnaie tout aussi virtuelle. Mais une monnaie que plusieurs sont prêts à acheter avec de l'argent sonnant.
Et cet argent, au lieu de provenir des canaux établis par MasterCard, Visa et autres, provient d'autres sources : Bloomberg, dans l'article cité plus haut, donne en exemple une startup qui prend la somme due à même le compte de téléphonie mobile de ses clients. Une autre invite les internautes à se procurer de la monnaie virtuelle au comptoir d'un dépanneur Seven-Eleven.
Ici, on pourrait imaginer la chaîne Couche-Tard créant sa propre monnaie virtuelle, et la vendant à ses nombreux clients adolescents (indice : ceux qui trouvent que les pubs de sa Sloche ne sont pas de mauvais goût), afin qu'ils achètent des crédits sur Xbox Live, sur iTunes ou ailleurs. À la manière des cartes de minutes qu'ils vendent déjà pour les téléphones cellulaires à la carte... ou des cartes-cadeaux iTunes qu'on peut aussi se procurer dans les dépanneurs.
Je dis Couche-Tard, mais ça pourrait aussi être Bell, ou Rogers, ou Telus, ou Vidéotron, ajoutant l'achat de monnaie virtuelle à leurs services.
Un seul compte unifié, avec un seul mot de passe, sans avoir à passer par sa carte de crédit? Je connais pas juste des ados qui seraient probablement fortement intéressés...
