Des algorithmes pour mieux recruter, faut-il s'en méfier?

Publié le 24/07/2017 à 14:52

Des algorithmes pour mieux recruter, faut-il s'en méfier?

Publié le 24/07/2017 à 14:52

Par AFP

Des algorithmes pour mieux recruter, gérer les carrières et même prédire les accidents du travail: des outils numériques de plus en plus sophistiqués fleurissent, bousculant la gestion des ressources humaines et parfois l'éthique.

L'offre «data RH» est devenue pléthorique: plus de 600 projets numériques «innovants» ont été recensés début 2017 par le Lab RH, association de 400 start-up.

Leur ambition: révolutionner les ressources humaines, qu'il s'agisse de délester les responsables RH de tâches chronophages, ou aider les salariés à évoluer, voire leur faciliter la vie avec des services sur mesure ou des plateformes d'échange.

Ils ont en commun d'utiliser des algorithmes capables de calculs à une vitesse inégalée afin d'établir des corrélations entre des milliers de données.

Le big data ouvre «des champs de possibles que les entreprises commencent à explorer», observe Olivier Parent du Châtelet, du cabinet de conseil en management BearingPoint. 

Le recrutement d'abord, qui devient «prédictif», pour «identifier les bons profils», performants et susceptibles de bien «s'intégrer».

Détection d'affinités

Exemple: une société d'assurances a diversifié son recrutement quand elle s'est aperçue, en croisant les performances et parcours de ses commerciaux, que les «anciens vendeurs de cuisine étaient les meilleurs vendeurs de produits d'assurance», raconte le consultant.

Certains outils vont jusqu'à évaluer «l'affinité professionnelle» d'un candidat avec son futur manager.

Aider Xerox à dénicher les profils «les plus pertinents» a fait chuter son turn-over de 20%, rapporte l'éditeur de solutions Cornerstone.

Mais de plus en plus, l'intelligence artificielle explore d'autres domaines: formation, évaluation, mobilité interne, absentéisme, accidents ou bien-être des collaborateurs.

Lorsqu'elles ont un «projet de transformation», les entreprises veulent «associer de plus en plus leurs salariés», observe Sacha Gajcanin, fondateur d'Eminove, start-up spécialisée dans l'analyse de réponses, anonymisées, à des questions ouvertes.

D'autres prennent le pouls des salariés via des systèmes de «feedback» (commentaires reçus ou sollicités).

L'analyse des «compétences» pour trouver en interne les personnes les plus qualifiées est également très en vogue. «On récupère une trentaine de compétences en moyenne par collaborateur«, ainsi le «RH élargit son vivier», raconte Antoine Balourdet, de la société Shairlock, dont l'outil est nourri en partie de données rentrées par les salariés.

Les algorithmes pourraient-ils remplacer les RH? Le risque est «potentiellement important», considère Olivier Parent du Châtelet.

Les équipes RH «automatisent» car «comme les autres, elles font l'objet de plans de réduction des coûts», relève le Lab RH. Des «chatbots RH», «robots conversationnels», existent déjà pour répondre aux questions récurrentes des salariés.

«Si c'est pour avoir le temps de traiter des sujets plus complexes qui ne peuvent être standardisés, les RH sont très preneurs» mais ils savent qu'«aucun chiffre n'est neutre», tempère Bénédicte Ravache, de l'association de DRH, ANDRH.

L'universitaire Laurence Devillers, experte en intelligence artificielle, est intervenue lors d'une table ronde organisée par la CFE-CGC sur le sujet le 14 juin. Elle alerte sur de nombreux risques, notamment avec le «deep learning», où la machine apprend seule: cela «peut créer un système discriminatoire« et dont «les prédictions ne sont pas fiables à 100%«.

Bêtise artificielle

Corrélation ne signifiant pas forcément causalité, «on va trouver de la bêtise artificielle«, estime-t-elle en pointant aussi un risque de «normalisation» à «trop profiler les gens».

«Si c'est pour recruter des clones, on aura perdu de la valeur», renchérit Jean-Christophe Sciberras, directeur RH France de la multinationale Solvay.

Le cofondateur du Lab RH lui-même, Jérémy Lamri, invite à la «prudence« avec les outils qui «utilisent le passé pour anticiper l'avenir« et montrent leurs limites dans un «environnement changeant».

Autre risque: qu'ils deviennent «trop invasifs dans la vie des salariés», souligne Laurence Devillers. Des outils connectés offrent déjà aux États-Unis de mesurer les temps de sommeil et d'activité physique des salariés.

En outre, des applications sortent parfois des clous posés par la loi pour protéger les droits des personnes, constate la Commission nationale de l'informatique et des libertés, qui travaille avec des éditeurs sur les «règles et bonnes pratiques en matière de big data RH».

Prendre une décision à l'égard d'une personne «sur le seul fondement d'un traitement automatisé des données à caractère personnel est interdit», ces outils ne peuvent être qu'une «aide», rappelle la Cnil.

 

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