Service à la clientèle: et si vous misiez sur votre vulnérabilité?


Édition du 13 Juin 2015

Service à la clientèle: et si vous misiez sur votre vulnérabilité?


Édition du 13 Juin 2015

Par Olivier Schmouker

La fragilité est toujours touchante... Photo: DR

Les attentes des consommateurs sont de plus en plus élevées, la concurrence de plus en plus féroce, les défis de plus en plus nombreux... Du coup, la tâche est fort complexe pour les responsables de l'expérience client.

Un signe ne trompe pas : en Amérique du Nord, seulement 12 % des responsables de l'expérience client considèrent que leurs initiatives sont vraiment efficaces, d'après une étude récente du cabinet-conseil Forrester.

«Nous sommes en plein paradoxe de Stockdale», a illustré Marc MacDonald, chef de la direction, ressources humaines, de la chaîne des magasins David's Tea, à l'occasion de l'événement Expérience Client organisé la semaine dernière à Montréal par le Groupe Les Affaires.

James Stockdale ? Cet officier de la Marine américaine a survécu à huit années de torture durant la guerre du Vietnam grâce à deux mantras a priori contradictoires : il se disait sans cesse «Je vais finir par m'en sortir» ainsi que «Je dois affronter la dure réalité qui est la mienne». «Autrement dit, il a su combiner optimisme et réalisme, ce qui lui a permis de survivre à l'horreur absolue, tandis que les autres - trop optimistes ou trop réalistes - n'ont pas survécu», a expliqué M. MacDonald. Et d'ajouter : «C'est la même chose en affaires, il faut maintenant trouver le moyen d'harmoniser optimisme et réalisme pour avoir une chance de survivre, voire de grandir».

Comment atteindre une telle harmonie ? Grâce à une vertu inusitée : la vulnérabilité ! «La clé du succès, c'est de permettre au client et à l'employé à qui il s'adresse de nouer un lien authentique. Et qui dit authenticité dit vulnérabilité, laquelle peut s'exprimer, par exemple, par des phrases franches du genre "Écoutez, je n'ai pas la réponse à votre question, mais je vais me renseigner et vous la donner au plus vite". Pourquoi ? Parce que c'est en étant vrai et sincère qu'on peut toucher le coeur du client, pas autrement ; et donc en reconnaissant ses faiblesses, sans faux-semblant», a dit M. MacDonald.

Steve Lamontagne, directeur de groupe chez Loblaw.

L'avantage d'avoir un talon d'Achille

La vulnérabilité est, par conséquent, un signe de courage. Comme en atteste une mésaventure récente de l'Industrielle Alliance. «Le printemps dernier, nous avons joué de malchance. En effet, notre service à la clientèle s'est retrouvé en sous-effectif, et la situation s'est aggravée du fait que nous implantions une nouvelle technologie à ce moment-là ; de nombreux employés étaient accaparés par des programmes de formation. Résultat : au lieu des habituelles trois minutes d'attente au téléphone pour joindre l'un de nos assistants, il arrivait que des clients patientent 50 minutes ! C'était inacceptable, bien entendu», a raconté Christine Hébert, vice-présidente, services aux assurés, de l'Industrielle Alliance, assurance auto et habitation.

L'assureur se trouvait dès lors en situation de vulnérabilité. Ce qu'il a eu la sagesse de reconnaître, avant d'y faire face : «Embaucher à toute vitesse n'était pas la meilleure solution. À la place, nous avons développé l'entraide entre employés afin de soulager ceux qui en avaient trop sur les bras, a expliqué Mme Hébert.

«Par la même occasion, nous avons revu notre façon de travailler en équipe, en incitant chacun à prendre plus d'initiatives qu'auparavant, sans avoir à toujours en référer à son boss, a-t-elle ajouté. Du coup, la crise a été surmontée en peu de temps et nous avons tiré une nouvelle force de notre faiblesse passagère.»

Pour sa part, la chaîne de supermarchés Loblaw a parfaitement conscience que son talon d'Achille concerne la jeunesse de sa main-d'oeuvre. «La plupart de nos employés sont des jeunes qui travaillent pour payer leurs études, ou encore qui voient leur passage chez nous uniquement comme un tremplin pour leur carrière. Notre défi est de susciter la passion chez eux. Car si jamais un client sent que l'employé n'a rien à faire de sa requête, il ne remettra plus les pieds chez nous, c'est certain», a dit Steve Lamontagne, directeur de groupe chez Loblaw.

La solution ? «La transparence. Les employés de chaque magasin se réunissent une fois par semaine pour discuter des bons et des mauvais coups des derniers jours. Pour discuter de ce qui s'en vient à court terme. Pour discuter de ce qu'on pourrait faire encore mieux», a-t-il dit, en soulignant que «l'engagement découle de la reconnaissance, en particulier auprès des générations Y et Z».

«La vulnérabilité est source d'authenticité. Elle permet d'être à la fois humble et fidèle à soi-même. Bref, elle favorise l'amélioration et ouvre la voie à l'excellence. Et c'est pour ça que l'avenir appartient sans l'ombre d'un doute à ceux qui sauront en tirer parti», a résumé M. MacDonald.

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