Ces ingénieurs préparent l'auto du futur

Offert par Les Affaires


Édition du 20 Août 2016

Ces ingénieurs préparent l'auto du futur

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Édition du 20 Août 2016

Par Claudine Hébert

Pascal Blouin, consultant pour l'Institut du véhicule innovant, travaille sur un projet pilote de Téo Taxi.

Même s'il n'y a plus d'usines automobiles au Québec depuis bientôt 15 ans, plusieurs ingénieurs d'ici réussissent à tirer leur épingle du jeu au sein de cette industrie.

«Plusieurs PME québécoises ont mis au point des produits de niche, des composants utiles à la construction des véhicules. Ce domaine offre de belles occasions à nos ingénieurs», signale François Adam, directeur général de l'Institut des véhicules innovants, de Saint-Jérôme.

Des ingénieurs comme Pascal-André Fortin, Guillaume Carle et Sébastien Gaëtan, notamment, ont réussi à se tailler une place chez Tesla Motors, en Californie.

«L'électrification des véhicules, qui pousse l'industrie automobile à revoir ses façons de faire, ouvre des portes à nos ingénieurs», soutient le professeur João Pedro Fernandes Trovão, de l'Université de Sherbrooke, directeur de la Chaire de recherche du Canada sur l'hybridation du stockage d'énergie dans les véhicules électriques à haut rendement.

Plus cette industrie évoluera, plus il faudra de nouveaux logiciels, de microprocesseurs, de composants, de nouvelles générations de batterie, dit-il. «Des domaines dans lesquels les ingénieurs formés par les universités québécoises seront très prisés», précise le professeur Trovão.

Mesurer les performances des voitures de Téo Taxi

Combien de courses les voitures électriques de Téo Taxi peuvent-elles effectuer avant de recharger leur batterie ? Quelle est la durée de vie des voitures électriques pour un usage commercial ? Quel modèle offre les meilleures performances au sein de la flotte : la Kia Soul EV, la Leaf de Nissan ou la Tesla ? Toutes ces réponses, l'ingénieur Pascal Blouin et son équipe veulent les obtenir à l'aide d'un système de suivi qu'ils ont installé dans les quelque 100 véhicules Téo Taxi.

Diplômé en génie informatique de Polytechnique Montréal, Pascal Blouin a toujours été curieux de connaître le fonctionnement des appareils. «À 16 ans, j'ai démonté de A à Z le moteur de ma première voiture, un vieux Dodge 1989», raconte ce consultant de l'Institut du véhicule innovant (IVI) de Saint-Jérôme.

C'est d'ailleurs sur son vieux Dodge que Pascal Blouin a mis au point son premier système d'acquisitions de données, une petite boîte noire qui lui permettait, entre autres, de saisir la température, la pression ainsi que la puissance du moteur turbo de son véhicule.

«Grâce à ces expériences maison, je suis devenu un expert en ingénierie de systèmes, alors que cette discipline ne s'enseigne toujours pas à l'université», signale l'ingénieur de 37 ans. Cette facette de l'ingénierie lui a toujours permis d'avoir une meilleure vue d'ensemble sur les projets auxquels il prenait part, assure-t-il. «J'aime dire que je suis un couteau suisse plutôt qu'un scalpel.»

Après avoir travaillé sur la moto électrique de Lito Green Motion et chez Nova Bus, Pascal Blouin a été recruté par l'IVI en avril 2015. Depuis neuf mois, il travaille sur le projet-pilote Téo Taxi lancé par l'homme d'affaires Alexandre Taillefer. «Dire qu'au départ, nous étions à peine trois employés dans un garage poussiéreux de Pointe-Saint-Charles, dit M. Blouin. Aujourd'hui, nous sommes plus de 200 personnes à graviter dans cet environnement issu d'une volonté, d'une vision. De pouvoir collaborer à la configuration, à l'adaptation et à l'installation des interfaces dans les véhicules de la toute première flotte de taxis électriques, c'est une très grande fierté pour un généraliste comme moi.»

Faire sa place chez Tesla

Vous aimez l'intérieur des voitures Tesla ? Le positionnement des accoudoirs, des pédales et l'ergonomie du tableau de bord ? Vous craquez pour la console centrale, le design des sièges, les poignées de porte intégrées et l'emplacement des rétroviseurs électro-chromatiques ? Dites merci à Sébastien Gaëtan !

Cet ingénieur mécanique, diplômé de Polytechnique Montréal en 2006 et détenteur d'un diplôme en design de transport à l'UQAM, travaille au sein du service Ergonomie et facteur humain chez Tesla, à l'atelier de design de Hawthorne, près de Los Angeles. Depuis deux ans, il est responsable des outils de validation virtuels et physiques de l'ergonomie des véhicules. Il participe aussi au développement et au design de plusieurs composants intérieurs.

L'équipe de Sébastien Gaëtan veille à améliorer le modèle S, qui est déjà sur le marché depuis 2012, le modèle X, commercialisé depuis 2015, et travaille au développement du prochain modèle 3, la version Tesla plus abordable, dont les premières livraisons sont prévues pour la fin de l'année 2017.

«J'ai toujours rêvé de faire du design automobile. Enfant, je m'endormais avec une voiture dans les mains», indique l'ingénieur qui a collaboré au développement du véhicule solaire Esteban de Polytechnique.

Comment cet ingénieur d'ici s'est-il retrouvé chez Tesla ? «Tout a commencé par un stage chez Dassault Système, à Montréal, qui s'est prolongé par quatre années de travail en tant que consultant en gestion du cycle de vie de produits. Je travaillais à l'aide d'un logiciel de conception 3D. Je suis ensuite passé chez Rand North America, qui est devenu Inceptra, une filiale nord-américaine de Dassault. En 2010, Inceptra est devenu fournisseur de plateforme 3D pour Tesla Motors. Ce rapprochement m'a permis de développer les bonnes relations», raconte l'ingénieur de 32 ans.

Autre atout non négligeable, Sébastien Gaëtan est issu de parents diplomates. À ce titre, il a eu l'occasion de vivre en Colombie et au Portugal. «Pouvoir m'exprimer dans la langue de mes coéquipiers qui parlent espagnol ou portugais facilite de beaucoup les interactions au travail.»

Enfin, Sébastien Gaëtan n'est pas le seul ingénieur formé au Québec qui évolue dans la cour de Tesla. «On doit être au moins une dizaine, répartis entre l'atelier de design de Los Angeles, l'usine de San Francisco et la société mère à Palo Alto. Je viens d'ailleurs d'embaucher, en mai dernier, un stagiaire provenant de Polytechnique, Eric Hovington, qui sera avec nous jusqu'en décembre.»

Un peu de la Beauce dans nos voitures

Lorsque les ingénieurs mécaniques Marc-André Drouin et Jean-Nicol Tremblay ont reçu leur diplôme (respectivement de l'Université Laval en 1996 et de l'Université de Sherbrooke en 2005), ils ne s'attendaient pas à ce que leurs études les mènent un jour à occuper un rôle dans la construction de véhicules automobiles.

«En fait, c'est notre employeur Texel, une entreprise de géotextile de Saint-Elzéar-de-Beauce, qui nous y a entraînés», indique Marc-André Drouin, chef de la plateforme Transport.

Depuis 2009, les membranes ThermoFit et Versaflex de Texel, qui permettent de remplacer le plastique injecté, intéressent grandement les constructeurs automobiles en quête de matériaux pour alléger leurs véhicules. «Nos produits disposent également de caractéristiques acoustiques très recherchées par les constructeurs», précise Jean-Nicol Tremblay, chargé de projet chez Texel depuis 2011.

Les membranes que développent les deux ingénieurs se retrouvent notamment dans les arches de roue, les portes et les voûtes de toit de nombreux modèles, tels le Ford F-150, la Cruze de GM, l'Odyssey de Honda et la Toyota Camry. «Au total, près de trois millions de véhicules en Amérique du Nord roulent avec un petit morceau de la Beauce dans leur habitacle», souligne M. Drouin.

Depuis deux ans, les revenus de la section Transport sont passés de 6,5 à 13 millions de dollars, soit 15 % du chiffre d'affaires total de Texel. Une réussite qui s'explique en grande partie par la grande écoute auprès des clients... et le travail d'équipe des deux ingénieurs. Précisons que Texel travaille avec les sous-traitants des constructeurs automobiles plutôt qu'avec ces derniers.

«On rencontre habituellement nos clients ensemble. Bien que ce soit un peu dur pour l'ego, les clients me perçoivent comme le représentant commercial. Jean-Nicol, lui, est vu comme le technicien. C'est lui qui explique les technicités de notre produit et les adaptations qu'on peut lui apporter pour satisfaire les besoins du sous-traitant. Bref, à deux, on décroche les contrats», explique Marc-André Drouin. Et des contrats, il y en aura pour les deux ingénieurs. Outre l'électrification des véhicules qui favorisera une plus grande utilisation des membranes Texel, l'entreprise vient de changer de mains. En juillet dernier, Texel a été achetée par l'américaine Lydall, un leader en produits textiles non tissés dans l'industrie automobile.

 

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