Pourquoi Ford s'en tire mieux que GM et Chrysler

Publié le 18/04/2009 à 00:00

Pourquoi Ford s'en tire mieux que GM et Chrysler

Publié le 18/04/2009 à 00:00

Deux piliers des Big Three, General Motors et Chrysler, sont à genoux. Mais le troisième, Ford, s'en tire relativement bien, et s'offre même le luxe de lever le nez sur l'aide de Washington !

Les statistiques ne disent pas tout, mais elles donnent toutefois un aperçu de la réalité, y compris dans l'industrie automobile. Au premier trimestre de 2009, la part de marché de Ford au Canada était en hausse par rapport à la même période de 2008, tandis que celles de GM et de Chrysler reculaient.

Ainsi, selon Desrosiers Automotive Consultants, la part de marché de Ford au pays est passée de 12,9 à 14 %. Pendant ce temps, GM voyait la sienne dégringoler de 22,7 à 17,6 %, et Chrysler, de 15,1 à 13,7 %. Et on note la même évolution des parts de marché des trois poids lourds aux États-Unis.

Malgré la crise économique, Ford tient sa place, tandis que GM et Chrysler assistent, impuissants, au dégonflement de leur positionnement concurrentiel.

Pourquoi Ford (dont les ventes sont également en recul en raison de la récession) tire-t-il mieux son épingle du jeu ? Sa réussite tient à plusieurs facteurs, selon deux spécialistes de l'industrie automobile, Christian Navarre, professeur à l'École de gestion Telfer de l'Université d'Ottawa, et Yan Cimon, professeur au Département de management de l'Université Laval.

Ford a compris vers où allait le marché

Il y a environ quatre ans, alors que GM et Chrysler continuaient de vendre de gros véhicules énergivores, Ford a amorcé sa révolution en commençant le développement de petits véhicules hybrides.

Ces nouveaux modèles ne seront commercialisés en Amérique du Nord que d'ici deux ans. Et à compter de 2010, Ford vendra sur le marché américain des petites voitures comme la Fiesta, qui n'a jamais cessé de rouler sur les routes d'Europe.

" Ford a compris que ce marché prendrait de l'importance ", souligne Christian Navarre.

Et, contrairement à ses concurrents GM et Chrysler, Ford s'est réveillé alors que le prix du baril de pétrole était d'environ 50 $ US, un prix alors relativement élevé mais bien loin des sommets atteints en juillet 2008, lorsque le baril d'or noir a frôlé 150 $ US.

Le bon patron à la bonne place

Bien des entreprises commettent l'erreur de garder un capitaine sans expérience à la barre du navire quand la mer est agitée. Un écueil que Ford a su éviter. Bill Ford, ex-pdg aujourd'hui président du conseil d'administration, a cédé sa place à Alan R. Mulally à temps, en septembre 2006.

" Il a compris que l'entreprise avait besoin de quelqu'un d'expérimenté ", dit Yan Cimon. Et M. Mulally n'était pas le premier venu. S'il n'avait pas d'expérience en automobile, il en avait en revanche une solide dans la commercialisation d'avions, ayant été vice- président de Boeing et pdg de la division Boeing Commercial Airplanes Group. En 2005, un an avant qu'il quitte l'avionneur, Boeing avait enregistré des ventes records de plus de 22,6 milliards de dollars américains.

" One Ford "

Le constructeur a aussi mis en place la stratégie One Ford pour gagner en efficacité et mieux répondre aux besoins de plus en plus homogènes des consommateurs de par le monde. Elle consiste à harmoniser davantage la production internationale des véhicules.

La Focus est un bon exemple. Elle est commercialisée presque partout sur la planète, et alors qu'auparavant chaque marché avait une version adaptée, toutes les Focus du monde partagent la même ingénierie de base. " GM et Chrysler centralisent aussi leur production au niveau mondial, mais Ford le fait beaucoup mieux ", affirme Yan Cimon.

De plus, cette stratégie One Ford implique que les usines nord-américaines produiront à terme davantage de petites voitures écoénergétiques et moins de camions et de VUS, suivant un modèle qui a fait ses preuves en Europe.

Restructuration avant la crise

La position de force dans laquelle se trouve Ford tient aussi au refinancement de sa dette, effectué à la fin de 2006 et au début de 2007, avant que la crise économique éclate et que les sources de crédit aux entreprises se tarissent.

Pour attirer les capitaux des investisseurs, l'entreprise a adossé une grande partie de sa dette à des actifs comme des usines ou des participations. " Que ce soit un trait de génie ou de la chance, un fait demeure : Ford avait des liquidités pour affronter la récession ", note Christian Navarre.

Pour se donner une marge de manoeuvre supplémentaire, Ford a également restructuré ses activités en fermant des usines et en se débarrassant de marques comme Jaguar et Land Rover, revendues au constructeur indien Tata Motors, en juin 2008. " Cette restructuration procurait plus de liquidités au constructeur et cadrait aussi avec sa stratégie de simplification de structure One Ford ", précise Yan Cimon.

La force de la marque

Alors que GM et Chrysler font courbettes et concessions au gouvernement américain, sans parler de l'ingérence de la Maison-Blanche dans leur gestion, Ford s'en sort sans l'aide des contribuables. Le symbole est fort et frappe l'esprit du consommateur.

" Ford apparaît comme un leader tandis que les deux autres sont en crise ", constate Yan Cimon. Or, c'est connu, les gens préfèrent généralement les gagnants aux perdants.

Et en termes de marketing, on pourrait traduire ça par " force de la marque ", un actif incorporel, mais ô combien important.

Autre facteur ayant un effet d'entraînement sur les ventes de Ford : les gens lui font davantage confiance qu'à GM et Chrysler, car l'entreprise semble solide et durable.

Ce qui est loin d'être le cas des deux autres constructeurs qui pourraient faire faillite.

15 %

Part de marché de Ford aux États-Unis, en 2008, comparativement à 24,7 % pour GM et à 10,1 % pour Chrysler.

francois.normand@transcontinental.ca

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