Les clés du m-commerce

Publié le 13/05/2011 à 15:54, mis à jour le 13/05/2011 à 15:54

Les clés du m-commerce

Publié le 13/05/2011 à 15:54, mis à jour le 13/05/2011 à 15:54

Par Premium

Les consommateurs commencent de plus en plus à magasiner téléphone intelligent en main. Ce n’est que le début d’une tendance qui va révolutionner le commerce de détail. Heureusement, il est encore temps de s’y mettre…

Auteurs : Matt Anderson , Nick Buckner et Stefan Eikelmann, Strategy + Business

Peut-être avez-vous déjà entendu parler de Shopkick, sans trop savoir de quoi il s’agissait. C’est tout bonnement une application pour iPhone susceptible de bouleverser le commerce de détail aux États-Unis. Elle permet à ses utilisateurs de recevoir des kickbucks, à savoir des dollars virtuels, chaque fois qu’ils mettent les pieds dans certains magasins (Best Buy, American Eagle, Macy’s, etc.). Ces utilisateurs peuvent aussi glaner des dollars kick en accomplissant certaines tâches, comme utiliser leur iPhone pour numériser une affiche qui se trouve sur les murs de la salle d’essayage d’un magasin. Par la suite, ils peuvent échanger leurs dollars kick contre des cartes-cadeaux ou les transformer en dons à des organismes de bienfaisance. Mieux encore, chez Best Buy, il leur suffit de montrer à la caisse qu’ils utilisent Shopkick sur leur iPhone pour obtenir un rabais instantané.

Ainsi, cette application combine avec brio la polyvalence des téléphones intelligents, le système mondial de localisation GPS et la créativité marketing du Web. Elle est en passe de transformer la façon de vendre des biens, à une époque où les commerçants disent peiner à attirer et à fidéliser les consommateurs, rendus frileux par l’instabilité du climat économique mondial.###

Ceux qui vont tirer leur épingle du jeu seront sans nul doute les pionniers de ce qu’on appelle maintenant le m-commerce, ou commerce mobile. Ils auront en effet de bonnes occasions d’influencer les consommateurs, au moment précis où ceux-ci prennent une décision d’achat. Quant aux autres, ils verront de plus en plus souvent les clients déambuler entre les rayons, cellulaire en main, à la recherche de bonnes affaires. En d’autres mots, le m-commerce transformera pour la première fois Internet en un moteur de vente favorable à certains détaillants et dangereux pour d’autres.

Un marché en forte croissance

Même s’il s’agit d’un phénomène relativement nouveau, le m-commerce commence déjà à laisser sa marque. Selon un récent sondage de Booz & Company sur les habitudes de consommation et les attitudes des consommateurs américains à l’égard du commerce mobile, de 15 % à 20 % d’entre eux utilisent déjà leurs téléphones intelligents pour trouver de meilleurs prix et comparer des produits, et 25 % prévoient le faire dans un proche avenir. En fait, de 10 % à 15 % des revenus provenant de la vente au détail seront influencés par le m-commerce cette année, soit une somme totale de 340 milliards de dollars américains pour les ventes combinées des États-Unis, de la France, de l’Allemagne et du Royaume-Uni.

Et ce n’est qu’un début, car le taux de pénétration des téléphones intelligents (iPhone, BlackBerry, Android, etc.) va aller croissant : de 17 % aux États-Unis et 15 % dans l’Union européenne à 74 % et 43 %, respectivement, d’ici 2014. On prévoit que, d’ici 2013, la moitié des clients des points de vente au détail traditionnels utiliseront leurs téléphones intelligents pour faire leur magasinage.

Certaines entreprises engrangent déjà des ventes impressionnantes grâce au commerce mobile. Amazon.com a dépassé en juillet 2010 le milliard de dollars de ventes annuelles faites à partir d’appareils électroniques intelligents. De même pour eBay, à hauteur de presque deux milliards : aujourd’hui, le site Web de ventes aux enchères adjuge un article toutes les deux secondes grâce à eBay Mobile.

Du coup, d’autres grands groupes entrent dans la danse, à l’image de Facebook. En août 2010, ce réseau social a lancé son outil de géolocalisation Lieux, qui permet à ses 500 millions d’utilisateurs de signaler en direct à leurs amis l’endroit où ils se trouvent (commerce, restaurant, bar, salle de spectacle, etc.). Les détaillants peuvent ainsi exploiter cette fonctionnalité pour leur offrir des cadeaux, des rabais, ou tout bonnement pour faire des suggestions d’achats. C’est d’ailleurs ce que font déjà American Apparel, Best Buy, Dell, Macy’s, Sears et Walmart. Selon le même sondage de Booz & Company, plus de 85 % des consommateurs ont affirmé que les détaillants devraient en faire plus pour intégrer les réseaux sociaux à leurs offres pour le commerce mobile.

Une expérience originale

Le commerce de détail devient de plus en plus numérique et mobile, si bien que les consommateurs sont de mieux en mieux renseignés et s’attendent à de nouveaux services de la part des détaillants. L’heure est donc à l’adaptation, et à cet égard Amazon.com constitue le parfait exemple.

Comment ? En misant sur la synchronisation. Ainsi, si vous placez un CD dans votre panier d’achat lorsque vous magasinez à l’aide de votre téléphone intelligent, le même CD y sera toujours quand vous vous connecterez un peu plus tard à partir de votre ordinateur. En outre, sur sa page d’accueil consacrée au commerce mobile, Amazon.com fournit des conseils personnalisés, des historiques d’achats, des évaluations ainsi que diverses recommandations de produits. La réalisation la plus remarquable d’Amazon est une option appelée Amazon Mémorise. Les consommateurs peuvent prendre une photo d’un produit en magasin (voire d’un article dans leur maison), et Amazon leur envoie, en quelques minutes, des liens vers des produits similaires en vente chez Amazon.

Walmart, pour sa part, fournit aux consommateurs une expérience de commerce mobile qui met l’accent sur le magasin dans lequel ils se trouvent. Ainsi, la chaîne de magasins permet à sa clientèle de chercher des évaluations de produits en numérisant le code-barres des produits en magasin à l’aide d’un téléphone intelligent.

Cette stratégie illustre un autre des résultats du sondage de Booz & Company : le taux de conversion (le pourcentage des clients chez qui le lèche-vitrine débouche sur un achat) augmente de 240 % quand les consommateurs consultent des évaluations de produits pendant leur magasinage — dans le cas présent, il s’agissait d’achats inférieurs à 200 $.

Best Buy a conçu une approche encore plus ambitieuse. Son service Twelpforce, créé en 2010, regroupe un grand nombre d’employés chargés de répondre aux questions des consommateurs posées sur Twitter à propos des marques et produits vendus en magasin. La plupart de ces messages sont envoyés par des consommateurs pendant qu’ils se trouvent dans des points de vente Best Buy.

Mais les utilisations les plus novatrices du commerce mobile restent à inventer. Un détaillant de vêtements haut de gamme, par exemple, pourrait développer une application permettant aux clients de photographier des ensembles qui leur plaisent, dans la rue ou au travail, puis d’assortir ces articles, dans des garde-robes virtuels, avec des photos de vêtements qui se trouvent réellement chez eux, pour ensuite jumeler tous ces renseignements et y ajouter les recommandations du détaillant. Le client pourrait également discuter de ses achats potentiels avec ses amis, grâce à des réseaux sociaux, pour créer une effervescence instantanée favorisant la décision d’achat.

Comme l’illustre cet exemple, le détaillant du futur devra toujours garder en tête les préférences de sa clientèle à partir d’une variété de sources de données — photos, vidéos, clavardage et quoi d’autre encore —, puis lui proposer des produits extrêmement ciblés, au juste prix, pour convaincre, par exemple, une consommatrice d’acheter le nouveau chemisier dont elle rêve ou qu’elle vient d’apercevoir en sirotant un espresso au café du coin.

Les détaillants ayant pignon sur rue devront également synchroniser leurs activités de commerce électronique et mobile avec les systèmes de marketing des points de vente, poussant ainsi les possibilités de ventes additionnelles, de ventes croisées et de service à la clientèle à des niveaux inégalés.

Un pas de plus vers la fidélité

À l’heure actuelle, la stratégie la moins exploitée dans le m-commerce est l’utilisation d’un programme de fidélisation bien intégré.

À l’exception de la Zone récompenses de Best Buy, qui offre aux consommateurs des points à chaque achat et lors de certaines opérations de promotion, en magasin ou en ligne. Pourtant, selon le sondage de Booz & Company, 54 % des consommateurs aimeraient bénéficier d’un compte de fidélité pouvant être enrichi par des opérations mobiles.

D’autres fonctionnalités du commerce mobile sont encore peu utilisées par les commerçants. Ainsi, le sondage indique que l’application la plus couramment employée par les consommateurs à domicile et au travail est celle qui permet de prendre la photo d’un produit pour le montrer à des amis. En magasin, les clients se servent le plus souvent de leur cellulaire intelligent pour consulter une publicité reçue sur leur appareil, ou un site d’évaluation de produits. D’ailleurs, la publicité modifie leur décision d’achat dans 38 % plus de cas lorsqu’ils se trouvent en magasin, plutôt qu’à la maison ou au bureau, toujours selon le sondage de Booz.

La possibilité de comparer des prix entre différents magasins au moyen du cellulaire est également très populaire. Il arrive plus souvent aux consommateurs de comparer des prix quand ils sont en magasin plutôt qu’à la maison ou au bureau, mais cette fonctionnalité exerce la même influence sur la décision d’achat dans tous les contextes. La recherche d’informations sur des produits à l’aide du cellulaire figure, elle aussi, parmi les utilisations les plus populaires, peu importe l’endroit où se trouve l’acheteur.

Il est temps de passer à l’action

Si vous êtes un détaillant à la recherche d’une stratégie de commerce mobile, commencez par évaluer rigoureusement votre entreprise. Il n’existe pas de solution toute faite ni universelle. Vous devez plutôt tenir compte des principales capacités techniques de votre organisation, des canaux commerciaux dans lesquels vous évoluez (magasin à grande surface ou petit commerçant, commerce mobile, stands, etc.), de la dynamique concurrentielle de votre secteur et de l’état actuel du commerce mobile en soi. (N’oubliez jamais que la technologie mobile évolue presque de jour en jour.) En d’autres mots, une stratégie de commerce mobile doit s’adapter à la réalité de l’entreprise qui l’exploite.

La plupart des détaillants commencent par adapter leurs capacités en matière de commerce électronique (le site Web présentant les produits, par exemple) au domaine du m-commerce, sans apporter trop de modifications. Cela leur permet, au moins, d’entrer en scène et d’être sur le même pied que le reste du marché. Mais ça ne suffit pas ; l’étape suivante consiste à développer de véritables applications de commerce mobile, capables d’accélérer la croissance des revenus : viser des segments clés, influencer la prise de décision des acheteurs ou arracher des ventes à la concurrence pour augmenter ses parts de marché.

Dans certains cas, les détaillants adoptent une stratégie offensive : ils inondent les téléphones intelligents de promotions et de données sur des produits pour supplanter la concurrence et influencer directement les décisions d’achat. À titre d’exemple, le fabricant d’équipement et de vêtements de plein air North Face se sert des données recueillies par les GPS et les services de positionnement des cellulaires pour créer des « géo-territoires » dans certaines régions des États-Unis. Dans ces zones virtuelles, les clients reçoivent des incitatifs d’achat spéciaux dès qu’ils se trouvent à proximité d’un magasin qui vend les produits de la marque.

Dans d’autres cas, une stratégie davantage axée sur le service convient mieux, notamment lorsqu’il s’agit de protéger ses parts de marché ou d’enrichir encore plus une expérience d’achat déjà bien rodée. C’est un peu ce que fait Ikea avec la technologie de la réalité augmentée, qui permet aux clients de créer un modèle virtuel de la chambre pour laquelle ils achètent des meubles (en saisissant les dimensions de la pièce et du mobilier), puis de la voir avec les nouveaux meubles installés, pour s’assurer que l’aménagement leur plaît. En proposant à la clientèle une telle expérience, non seulement on rend service aux clients, mais on garde aussi toute leur attention sur les produits en magasin, ce qui réduit les risques qu’ils se tournent vers leur fureteur pour chercher ailleurs d’autres options.

Dans un cas comme dans l’autre, il faut créer une panoplie d’occasions d’entrer sur la scène du commerce mobile, y compris la possibilité de collaborer avec des partenaires externes comme des spécialistes du placement publicitaire et de l’analyse des données en ligne, à l’image  d’AdNetwork, de DataXu et d’AdMob. De plus, il faut nécessairement intégrer ces solutions de commerce mobile externes à ses propres systèmes internes de TI et de marketing — autrement dit, aux systèmes qui servent actuellement à recueillir de l’information sur la clientèle et à analyser les données commerciales. En fait, le commerce mobile exercera une forte pression sur les systèmes d’analyse marketing traditionnels, qui ne sont généralement pas conçus pour réagir de façon déterminante aux données en temps réel.

Comme le démontrent les premières applications déjà déployées, la mise en œuvre du commerce mobile risque de varier considérablement en fonction de l’entreprise qui l’exploite. Mais il y a un dénominateur commun pour toutes les utilisations du commerce mobile, aussi vital que la technologie elle-même : il s’agit de proposer à la clientèle un moyen agréable, satisfaisant et inventif d’acheter vos produits et de vous rester fidèle. Tant qu’on garde cet objectif en tête, toute application de commerce mobile lancée aujourd’hui deviendra bien vite aussi incrustée dans les habitudes de consommation de vos clients que les catalogues d’il y a 50 ans ou les sites Web d’il y a 15 ans.

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