La rémunération des PDG sous l'emprise du «marché du talent»


Édition du 25 Novembre 2017

La rémunération des PDG sous l'emprise du «marché du talent»


Édition du 25 Novembre 2017

Par Diane Bérard

L’IGOPP suggère de simplifier les programmes de rémunération – afin que les membres puissent les maîtriser et voter en connaissance de cause – et de mettre fin à la standardisation.

En 15 ans, le document type expliquant la rémunération des dirigeants canadiens a quintuplé. Il fait désormais 34 pages ! D'une entreprise à l'autre, c'est du copier/coller, ces modèles de rémunération étant tous rédigés par les mêmes firmes de consultants. «Les comités de rémunération des CA sont sous l'emprise de principes de rémunération généralement acceptés», ironise Yvan Allaire, président exécutif du CA de l'Institut sur la gouvernance d'organisations privées et publiques (IGOPP).

L'IGOPP vient de publier sa seconde prise de position sur la rémunération des dirigeants, intitulée Trancher le noeud gordien. On y affirme, entre autres, que la rémunération des PDG repose sur des hypothèses fausses ou faibles. Un exemple : la haute transférabilité du talent de gestion d'une industrie. Au nom de ce «marché des talents», le CA devrait accorder une rémunération élevée au PDG, pour éviter qu'il quitte le navire. «Pour un cas de recrutement externe réussi, on relève une dizaine d'échecs, souligne Yvan Allaire. Recruter un PDG externe dénote l'échec du processus de relève. D'ailleurs, les entreprises le savent. En 2016, 90 % des firmes du S&P 500 qui ont changé de dirigeant ont promu un de leurs cadres.»

Une autre fausse prémisse : la relation entre les mesures entreprises par le PDG et la valeur de l'action. «Ce lien est surévalué, dit Yvan Allaire. Trop de facteurs externes, politiques, sociaux et économiques influent sur un titre.» Une troisième hypothèse erronée est la notion de rémunération à risque comme mesure incitative. «Les PDG ne reçoivent pas une rémunération à risque, précise Yvan Allaire. Ils reçoivent une rémunération variable. Ce n'est pas tout ou rien. C'est tout ou un peu moins.»

Au fil des augmentations basées sur les prémisses précédentes, la rémunération médiane des PDG canadiens atteint aujourd'hui 8 millions de dollars canadiens. C'est de 2 à 3 fois plus que celle des 2e et 3e dirigeants les mieux rémunérés et 140 fois plus que le salaire moyen des travailleurs du secteur privé. Ce fossé a entraîné un effritement de la confiance dans la capacité et la compétence des comités de rémunération à établir et à contrôler la rémunération des dirigeants. «Les comités de rémunération perdent leur légitimité, constate Yvan Allaire. Les autorités réglementaires s'immiscent de plus en plus dans leur travail et le vote consultatif des actionnaires gagne en popularité. Les administrateurs savent qu'ils sont sur la sellette.»

Des solutions pour reprendre le contrôle de la rémunération des PDG

«Aucun CA ne peut agir isolément, estime Yvan Allaire. Faire bande à part comporte trop de risques. Il faut un forum où les présidents de CA et les présidents de comités de ressources humaines/rémunération puissent discuter entre eux et s'entendre collectivement.» Il établit un parallèle avec la Coalition canadienne pour la bonne gouvernance, dont les investisseurs institutionnels se sont dotés en 2002.

Le rapport de l'IGOPP suggère aussi de simplifier les programmes de rémunération - afin que les membres puissent les maîtriser et voter en connaissance de cause - et de mettre fin à la standardisation. «Chaque entreprise a sa dynamique et ses enjeux d'investissement», rappelle Yvan Allaire.

Le rapport propose de remplacer l'attribution annuelle d'actions par une attribution aux trois ans. Et que ces unités d'actions soient exerçables au terme d'un nombre d'années établi selon le cycle d'investissement de l'industrie, qui peut aller jusqu'à 10 ans.

Enfin, l'IGOPP estime que le CA devrait déclarer dans la Circulaire de procuration qu'il est informé du rapport entre la rémunération du PDG et la rémunération médiane dans l'entreprise ainsi que dans la société civile, et qu'il juge ce rapport approprié dans le contexte de l'entreprise, de l'industrie et des valeurs de la société ambiante.

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