Alléguer un handicap ne suffit pas pour renverser un congédiement

Publié le 15/05/2010 à 00:00

Alléguer un handicap ne suffit pas pour renverser un congédiement

Publié le 15/05/2010 à 00:00

Un employeur est justifié de congédier un employé pour absentéisme excessif, dans la mesure où ce dernier allègue un handicap, mais ne parvient pas à le démontrer. Telle est la décision rendue par la Commission des relations du travail (CRT) dans l'affaire Lajoie et Provigo Québec, D.T.E. 2010T-241 (C.R.T.).

L'employeur n'avait aucune obligation d'accommodement à l'égard du plaignant. En effet, celui-ci n'a pas démontré que les migraines dont il souffrait étaient un handicap. Le congédiement était donc justifié par son absentéisme excessif, dit la CRT.

Les faits

Commis d'épicerie, le plaignant est au service de Provigo depuis 1989.

En octobre 2005, son médecin conclut que le plaignant est incapable d'accomplir ses fonctions et confirme un arrêt de travail pour une période indéterminée en raison de douleurs cervicales graves. En 1996, le plaignant consulte une clinique spécialisée pour les migraines.

Les problèmes du plaignant s'amenuisent graduellement, et en février 2006 son médecin le considère prêt à effectuer un retour au travail progressif sans restrictions. Le plaignant doit alors être revu par son médecin en juin 2006. Malgré son rendez-vous, il ne s'y présente pas.

En 2006, l'employeur avise le plaignant quant à la procédure à suivre s'il doit s'absenter ou arriver en retard au travail : il doit aviser son employeur, et il doit lui fournir un certificat médical.

Au cours des mois d'août et septembre, le plaignant s'absente à de nombreuses reprises, et ce, sans avis préalable et sans justification. Il est alors averti, à deux reprises, de ses manquements.

En octobre 2006, le plaignant retourne consulter son médecin à cause de la réapparition de ses migraines. À cette date, le médecin constate que le plaignant a cessé sans raison de prendre sa médication. Par ailleurs, il note que le travail est beaucoup " mieux toléré " par le plaignant. D'autres médicaments lui sont alors prescrits et il est convoqué pour un rendez-vous, six mois plus tard. Le plaignant ne retournera jamais consulter ce médecin.

De janvier 2007 à juin 2007, le plaignant s'absente à 12 reprises sans aviser son supérieur et sans autorisation. À la suite de sa dernière absence injustifiée, l'employeur le suspend pour une journée. En décembre 2007, il s'absente une fois de plus sans motif et sans autorisation. L'employeur lui impose une suspension de cinq jours. Or, à la date où il doit reprendre le travail, le plaignant ne se présente pas et ne justifie pas son absence. L'employeur décide donc de le congédier.

Le plaignant dépose alors une plainte à la Commission des normes du travail, alléguant qu'il a été congédié sans cause juste et suffisante.

Devant la Commission des relations du travail (CRT), le plaignant fait valoir qu'il souffre d'un handicap, soit ses migraines, et qu'à ce titre, l'employeur n'a pas respecté l'obligation d'accommodement qu'il avait à son égard. Il invoque également ses 19 ans d'ancienneté auprès de l'employeur, et allègue que le congédiement est prématuré, puisque l'employeur n'a pas respecté le principe de progressivité des sanctions.

La décision

La CRT retient qu'à l'époque où le dossier d'absentéisme du plaignant est devenu problématique, l'employeur n'a été avisé ni de limitations fonctionnelles ni d'un quelconque handicap dont pouvait souffrir le plaignant.

Il est vrai qu'à l'automne 2005, le médecin du plaignant avait déclaré que ce dernier souffrait de migraines et de douleurs cervicales; cependant, par la suite, son médecin certifie que le plaignant était apte à retourner au travail, et ce, sans limitations. Or, depuis cette date, l'employeur n'a reçu aucun avis relatif à un quelconque handicap ou à des limitations dont il aurait dû tenir compte.

La Commission indique que si le plaignant a souffert de migraines qui l'empêchaient de se présenter au travail en 2006, 2007 ou 2008, il est incompréhensible qu'il n'ait pas consulté son médecin comme il l'a fait par le passé. Pour la Commission, le fait de ne plus consulter le médecin qui l'a traité avec succès, et le fait de ne pas prendre les médicaments prescrits pour limiter celles-ci, sont des indices assez concluants que les migraines du plaignant ne sont pas un handicap.

La CRT conclut que le congédiement du plaignant est justifié, en raison de son insouciance à se conformer à un ordre clair et réitéré de l'employeur, soit d'aviser de ses absences et de les motiver. Elle est également d'avis que l'employeur a suivi une progression des sanctions appropriée. En conséquence, elle rejette la plainte.

L'auteure est avocate chez Loranger Marcoux

lesaffaires.redaction@transcontinental.ca

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