«Il faut se comparer avec les meilleurs, pas avec le gars au bout de la rue», selon Elyse Allan

Publié le 14/06/2010 à 00:00

«Il faut se comparer avec les meilleurs, pas avec le gars au bout de la rue», selon Elyse Allan

Publié le 14/06/2010 à 00:00

Par Diane Bérard

Photo : Bloomberg

GE Canada vient d’investir 63,5 millions de dollars (M$) à son usine de Bromont. Le gouvernement du Québec ajoutera jusqu’à 13,3 M$ à cette somme. Nul doute qu'Elyse Allan y est pour beaucoup. La pdg de GE Canada est une pro du lobbying, elle a dirigé la Chambre de Commerce de Toronto et siégé, entre autres, au comité consultatif canadien sur les finances et à la Chambre de commerce du Canada. Sans compter les quelques années qu’elle a passées chez Hydro Ontario. Elyse Allan a débuté sa carrière chez GE en 1984. Elle y est revenue vingt ans plus tard pour diriger la filiale canadienne. Nous l’avons jointe à ses bureaux de Mississauga.

Diane Bérard - Vous dirigez une filiale, vous êtes donc responsable de résultats sur lesquels vous n’avez pas toujours le contrôle. Comment composez-vous avec cette situation ?

Elyse Allan - D’abord, j’accepte mes responsabilités. Je ne tente pas de me défiler en prétextant que j’ai les mains liées. Je consacre plutôt mes énergies à influencer. Ceux que je dois convaincre se trouvent souvent à l’autre bout du monde; j’interagis donc avec des gens que je vois très peu, que je ne rencontrerai parfois même jamais. Mes demandes doivent être très articulées et mes dossiers parfaitement étoffés, car je ne peux compter sur nos relations interpersonnelles pour les convaincre de m’allouer les ressources que je désire.

D.B. - La présidence de la Chambre de Commerce de Toronto a-t-elle été une bonne école ?

E.A. - Absolument. Mon passage là-bas a certainement joué en ma faveur lorsque GE cherchait un dirigeant pour sa filiale canadienne. Faire du lobby pour une Chambre de commerce ou pour une filiale, c’est du pareil au même.

D.B. - Comment vous y prenez-vous pour obtenir votre part du gâteau par rapport aux autres filiales ?

E.A. - Je suis réaliste. Avant de présenter un projet, je me demande « Est-ce une priorité pour GE ? ». Si la réponse est non, je ne gaspille pas mes énergies en luttes stériles. Par contre, en cas de réponse positive, je travaille d’arrache-pied pour me faire entendre ! Je présente mon projet au plus grand nombre de gens afin qu’ils militent pour ma cause. L’univers des filiales est concurrentiel, mais j’aime croire que cette compétition est saine et qu’au bout du compte les meilleurs projets l’emportent.

D.B. - Le Canada a-t-il des atouts aux yeux de GE ?

E.A. - D’abord, nous sommes rassurants, grâce à notre taux d'endettement relativement faible, à notre système bancaire stable et à notre marché financier solide. Ensuite, nos richesses naturelles ont une valeur inestimable. GE est fort consciente du potentiel de notre secteur énergétique et des occasions de transfert de technologies.

D.B. - GE est une entreprise mythique à la culture très forte, comment est-ce d'y travailler ?

E.A. - Je me sens comme une enfant dans un magasin de bonbons. J'ai un plaisir fou à découvrir ce que je peux tirer de tout cela.

D.B. - La magie GE tient beaucoup à son processus de recrutement élitiste.

E.A. - GE a des attentes élevées, c'est vrai. Et les gens attirés par elle sont exigeants envers eux-mêmes.

D.B. - Quelle sorte d'oiseau rare est recruté par GE ?

E.A. - Il faut un degré élevé de maturité. Cela suppose que vous pouvez vous motiver vous-même : vous connaissez vos cibles, débrouillez-vous pour les atteindre ! Cela suppose aussi que vous pouvez composer avec l'ambiguïté; que vous acceptez que tout change constamment autour de vous, que vous ne vous laissez pas paralyser par ce changement, et que vous prendrez des décisions malgré tout. Si vous manquez de confiance en vous ou que vous n'avez pas de principes moraux solides auxquels vous accrocher, vous ne tiendrez pas le coup. La créativité est aussi essentielle, on s'attend constamment à ce que vous tentiez de nouvelles choses. Vous avez le droit de vous tromper... à condition d'avoir géré les attentes de vos supérieurs au préalable. Je parle ici de gestion de risque : vous devez être conscient des risques associés à votre projet, et oser les annoncer à l'avance, sinon...

D.B. - Trouvez-vous des candidats ?

E.A. - C'est long ? le processus de recrutement comprend de 5 à 10 rencontres ? mais on finit toujours par y arriver.

D.B. - La compétitivité du Canada vous préoccupe, vous avez siégé à de nombreux comités qui l'ont étudiée. Quelles sont vos recommandations ?

E.A. - Faire tomber les barrières au commerce entre les provinces et apprendre à nous comparer avec les meilleurs du monde et non avec « le gars au bout de la rue ». Il faut aussi commercialiser les innovations que nous développons pour nos entreprises du secteur des ressources naturelles et les diriger vers des marchés comme la Chine et l'Afrique.

D.B. - Qui est responsable d'améliorer la productivité des entreprises ?

E.A. - Elles-mêmes. Nous n'avons pas à nous tourner vers le gouvernement pour qu'il fasse le travail à notre place.

D.B. - Le lobby des banques américaines fait beaucoup jaser, comment voyez-vous la relation entre les entreprises et le gouvernement ?

E.A. - Ce n'est pas blanc ou noir. Sans échanges entre le monde des affaires et le gouvernement, les politiques fiscales et économiques ratent leur cible.

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