Entrevue: Steve Brown, évangéliste en chef, Intel

Publié le 17/08/2013 à 00:00

Entrevue: Steve Brown, évangéliste en chef, Intel

Publié le 17/08/2013 à 00:00

Par Diane Bérard

Steve Brown, évangéliste en chef, Intel

Pour permettre à son épouse d'étudier, le père de Steve Brown, un chercheur, amenait ses garçons à son laboratoire. Seul l'ordinateur venait à bout des énergiques frères Brown. Et éveilla une vocation chez Steve. «Je veux travailler pour ceux qui créent des ordinateurs», a-t-il dit. Cet ingénieur est devenu le premier évangéliste en chef d'Intel. J'ai rencontré M. Brown dans le cadre de C2-MTL.

Diane Bérard - Quelles sont les qualifications préalables pour devenir évangéliste ?

Steve Brown - Je suis un bon généraliste. J'en connais un peu sur plusieurs sujets, ce qui me permet de faire des liens. Et puis, je suis bon vulgarisateur. J'arrive à simplifier des notions complexes pour que les profanes à l'extérieur d'Intel comprennent ce que nous faisons et pourquoi nous le faisons.

D.B. - Pourquoi vouliez-vous ce titre ?

S.B. - Parce que je suis un professeur frustré. Deux situations me rendent heureux. Voir apparaître une première lueur dans l'oeil de celui qui apprend quelque chose de nouveau. Puis, en déceler une seconde lorsqu'il réalise ce qu'il peut faire de ce nouveau savoir.

D.B. - On imagine votre rôle surtout tourné vers l'extérieur, mais vous travaillez beaucoup avec les employés. Expliquez-nous.

S.B. - J'aide nos 108 000 employés à comprendre où va le monde, où va la technologie et où va Intel. Tout ça pour les aider à défnir leur rôle. Chacun travaille fort sur son projet. Je leur apporte une vue d'ensemble. Mais, surtout, je présente le tout pour susciter leur enthousiasme. Pour leur donner envie de pousser leurs projets au-delà des frontières connues, pour maximiser les retombées de nos innovations sur la vie des gens.

D.B. - Vous affirmez que les machines nous rendent meilleurs. Ne nous rendent-elles pas plutôt paresseux ?

S.B. - (rires) Rappelez-vous les années 1970 : on annonçait la fin du travail, la société des loisirs. Les robots travailleraient à notre place. Ce n'est jamais arrivé, parce que ce n'est pas ce à quoi nous aspirons. Nous voulons travailler, avoir un effet. Rares sont ceux qui ont envie de se tourner les pouces toute la journée. La technologie accroît notre productivité et notre impact.

D.B. - Vous ne voyez donc que des côtés positifs à la technologie ?

S.B. - Je considère la technologie comme neutre. Tout dépend de l'usage qu'on en fait. Je peux utiliser mon cellulaire pour appeler ma mère en Angleterre et lui accrocher un sourire aux lèvres pour la journée. Ou je peux m'en servir pour ignorer les amis avec qui je suis en train de souper au restaurant. Cette fois, au lieu de décrocher un sourire à mon entourage, je les contrarie en textant. Voilà le point de départ de la conversation que nous devrions avoir en famille, entre amis et en société. Comment voulons-nous utiliser la technologie ? Quel niveau d'intrusion sommes-nous prêts à accepter ? Dans les années 1970, cette conversation a eu lieu à propos de la télévision. Voulions-nous l'écouter pendant les repas ? Au lit ? En présence des invités ? Aujourd'hui, c'est de l'usage de nos appareils mobiles qu'il est question. Demain, ce sera des robots. Laisserons-nous nos enfants seuls avec notre robot personnel ? Accepterons-nous que des robots dispensent des soins à nos parents ?

D.B. - Après la révolution Internet, vous entrevoyez la révolution des robots. Cela ressemble à de la science-fiction...

S.B. - Imaginer que nous posséderons tous notre propre R2-D2, ça c'est de la science-fiction. Parler de véhicules qui se conduisent seuls, c'est une vision d'un avenir très prochain. Ces véhicules seront des robots dans lesquels nous nous assoirons. Et les maisons intelligentes seront des robots dans lesquels nous vivrons. Les robots, ce sont des machines autonomes. Des machines qui «sentent» le monde et qui peuvent prendre des décisions. Ce sera la prochaine révolution technologique.

D.B. - Mais on parle de robots depuis des décennies...

S.B. - C'est vrai, les idées étaient là avant la technologie. Aujourd'hui, la technologie rattrape la créativité. Ainsi, nous pourrions donner la vue aux robots aujourd'hui. Mais cela exigerait un ordinateur aussi gros que cette salle. Il reste encore du travail à faire.

D.B. - Les plus grands effets de la technologie sont à venir. Dites-nous en plus.

S.B. - Les progrès auxquels nous avons assisté dans les secteurs de la fabrication, des médias et de la santé ne représentent qu'une infime portion de ce que la technologie peut nous apporter. Nous n'avons pas atteint le point de bascule faute de puissance. Mais nous y arrivons. Chaque année, les ordinateurs sont de plus en plus performants. Le dessin et la fabrication assistée par ordinateur n'étaient qu'une étape. L'impact de l'imprimante 3D sera plus important. Elle permettra l'ultra-personnalisation. Voilà qui va bouleverser la chaîne d'approvisionnement mondiale et les modèles manufacturiers. En santé, le point de bascule sera atteint lorsque les traitements personnalisés seront possibles. Plutôt que de vous soigner avec des médicaments ou des traitements efficaces sur sept milliards d'humains, on vous administrera une médecine efficace sur vous.

D.B. - Les développeurs d'applications sont cools. Les fabricants de microprocesseurs, plus tellement. Vous sentez-vous laissé pour compte ?

S.B. - On nous tient pour acquis, c'est vrai. Tous les deux ans, Intel lance des microprocesseurs plus petits et plus rapides. Dans la tête des gens, cela va de soi. On ne pense plus à la somme de travail requise pour atteindre ces niveaux de puissance et de miniaturisation. Mais notre travail consiste aussi à se tenir en retrait. Nous mettons au point la technologie qui permet à Dreamworks de produire des films incroyables. Aux compagnies pharmaceutiques de mener leurs recherches. Aux physiciens nucléaires de se pencher sur la prochaine génération d'énergie.

D.B. - Vous croyez toutefois que la quincaillerie informatique s'apprête à redevenir cool. Pourquoi ?

S.B. - Ma génération était fascinée par le fonctionnement des ordinateurs. Nos enfants voulaient simplement que ceux-ci fonctionnent. Les logiciels, puis les applications ont capté toute leur attention. Nous amorçons une nouvelle ère. Les gens se remettent à fabriquer des objets. Ils ne veulent pas acheter, ils désirent créer. Ainsi est né le Maker Mouvement (makerfaire.com), une communauté de patenteux et d'inventeurs. Nos microprocesseurs leur sont essentiels. Ils ont donc un contact direct avec une technologie que la génération précédente ne voyait jamais.

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