Les acrobaties de Daniel Lamarre

Publié le 01/07/2009 à 00:00

Les acrobaties de Daniel Lamarre

Publié le 01/07/2009 à 00:00

Alors que plusieurs concurrents hésitent à présenter leurs spectacles ou les annulent, le Cirque du Soleil investit dans une stratégie de diversification qui touche aussi bien les lieux de représentation que le contenu.

Le jeu de mots est inévitable parce qu'il est pertinent : Daniel Lamarre fait preuve d'une agilité exceptionnelle par les temps qui courent. Alors que la " grande récession " pousse les entreprises à limiter le nombre de nouveaux projets, le PDG du Cirque du Soleil voit en elle une belle occasion de croissance.

L'entreprise montréalaise fondée par Guy Laliberté en 1984 a lancé le spectacle OVO dans le Vieux-Montréal en avril dernier. En septembre, elle conjuguera la comédie, la danse et le chant dans un vaudeville présenté à Chicago. En décembre, elle rendra hommage à Elvis Presley, à Las Vegas.

Pourtant, plusieurs indicateurs donnent à croire que ce n'est pas le moment d'accélérer. Le Cirque du Soleil constate que l'assistance à ses spectacles a diminué de 10 points de pourcentage et est passée à 80 %. À Las Vegas, où le Cirque offre six spectacles permanents, le nombre de visiteurs a chuté de 15 %.

L'entreprise, qui vend entre 12 et 15 millions de billets par an, prévoit pour 2009 une baisse de 5 % de son revenu, qui s'établit à 800 millions de dollars. Qu'importe : elle est résolue à prendre de la vitesse. Daniel Lamarre explique que le lancement de deux spectacles cette année s'inscrit dans une stratégie de diversification déjà bien amorcée.

Le premier volet de cette stratégie a été géographique. " Au cours des trois dernières années, le nombre de villes où nous nous sommes produits lors de nos tournées est passé d'une centaine à 250. Et nous avons lancé deux spectacles permanents en Asie, à Tokyo et à Macao. "

Le deuxième volet de la stratégie de croissance repose sur la diversification du contenu. Le premier numéro de cabaret, présenté par un maître de cérémonie à des clients attablés, a pris forme avec Zumanity, à Vegas. Love, le spectacle mettant en vedette les succès des Beatles, a lancé le genre music-hall, davantage axé sur la chanson. Pour sa part, Elvis sera le héros d'une revue dont le style combine la danse, la musique et les sketches.

Ce PDG, qui a amorcé sa carrière en journalisme, rappelle que cette expansion touche aussi les lieux physiques. " Nous avons toujours donné nos spectacles sous des chapiteaux ou dans des théâtres construits pour nous. Depuis deux ans, nous les présentons dans des arénas, et nos deux nouvelles productions auront lieu dans des théâtres plus saisonniers. "

Cette ouverture permet au Cirque d'élargir son champ d'action à partir du même endroit, explique le PDG. " À Las Vegas, il aurait été impossible d'offrir six spectacles simultanément. Et à New York, je n'aurais jamais songé à présenter trois ou quatre spectacles. Cependant, la diversification du contenu nous permettra de le faire en 2010 et 2011. C'est le même scénario à Tokyo. J'ai un spectacle permanent chez Disney et un autre en tournée avec notre partenaire, Fuji. Les deux fonctionnent bien simultanément. "

Multiplier ainsi les genres nous per-met d'étendre notre portée. "Nous attirons des clients différents de ceux qui assis-tent à nos spectacles habituels, explique Daniel Lamarre. L'hommage aux Beatles, par exemple, a attiré des spectateurs qui n'avaient jamais vu une seule de nos productions auparavant. "

Il reste que chaque projet du Cirque représente un investissement financier de taille. Lancer un spectacle permanent coûte entre 35 et 50 millions de dollars, et une tournée représente un investissement de 20 à 25 millions. Comment le dirigeant justifie-t-il de telles dépenses, alors que les consommateurs se serrent la ceinture ?

" Oui, les gens vont y réfléchir à deux fois avant d'acheter une maison ou une voiture, reconnaît-il. Mais ils continuent de consommer des biens dans le secteur du divertissement. Les ventes de billets de cinéma sont en croissance. Ce que nous voyons, c'est que nous réussissons malgré tout à maintenir de bons taux d'assistance pour nos spectacles. "

" Le plus important, ajoute le PDG, c'est que pendant une période difficile, on joue de prudence. Plusieurs concurrents reportent des projets en chantier ou y mettent fin. Il y en a beaucoup, à Vegas. De nombreux spectacles ne se concrétisent pas. Aller à contre-courant peut être payant. Le moment est propice pour poursuivre notre croissance, parce que ces projets nous donneront un avantage concurrentiel considérable. Ce qui nous permettra en fin de compte d'atteindre notre objectif, soit d'augmenter nos parts de marché. "

Pour mieux comprendre cette stratégie, il faut observer le modèle d'affaires du Cirque, qui est plutôt atypique. " Le meil-leur exemple de nos valeurs, poursuit Daniel Lamarre, c'est la série de critères que nous appliquons pour choisir de nouveaux projets. Premièrement, le défi créatif. Deuxièmement, le choix de nos

L'ENJEU

GAGNER des parts de marché afin de renforcer la position du Cirque au sein de son industrie.

LA STRATÉGIE

LANCER de nouveaux spectacles variés.

LE MONDE

POSER des défis aux employés afin de les retenir et de maintenir le niveau d'emploi.

L'UNIVERS DE DANIEL LAMARRE

Lieu de naissance : Grand-Mère (Mauricie)

Dernier endroit visité : Côte d'Azur

Ce qu'il écoute dans son iPod : Céline Dion, U2 et Garou

Dernier film vu : Slumdog Millionaire

Dernier livre lu : la biographie de Warren Buffett

Sources d'inspiration : Luc Beauregard, du cabinet de relations publiques National, André Chagnon, fondateur de Vidéotron, et Guy Laliberté

Premier emploi occupé : journaliste au quotidien Le Nouvelliste

Un autre emploi qu'il aurait pu apprécier : relationniste

Une qualité recherchée chez les autres : la passion

Personnage historique qu'il aurait aimé rencontrer : Winston Churchill

Daniel Lamarre sera honoré le 23 septembre 2009 au Gala du Commerce en compagnie des autres Audacieux. Les profits de ce gala serviront à remettre des bourses d'études.

finances@munger.ca

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