Le Québec «néo-entrepreneurial»

Publié le 07/02/2018 à 06:00

Le Québec «néo-entrepreneurial»

Publié le 07/02/2018 à 06:00

[Photo : 123RF]

J'ai eu la chance de parcourir chacune des 17 régions du Québec ces deux dernières années. J'ai vu, entendu, souvent même expérimenté des projets portés par des collectivités inspirées et inspirantes. Malgré un contexte économique local trop souvent ardu (quoi qu'en disent certaines statistiques nationales enviables), j'ai vu partout des gens prendre résolument en charge le développement de leur milieu de vie.

Dans chaque région, j'ai pu observer cette tendance entrepreneuriale qui semble en évolution, notamment chez les jeunes qui sont non seulement de plus en plus nombreux à manifester une intention à cet égard, mais qui le font aussi de plus en plus dans une perspective de transformation de notre économie. De 2009 à 2017, le nombre de jeunes (de 18 à 34 ans) manifestant l'intention de créer ou de reprendre une entreprise a triplé. Malheureusement, il existe toujours un fossé entre l'intention d'entreprendre (40% des jeunes) et l'action (à peine 5% chez ces mêmes jeunes) selon l'Indice entrepreneurial québécois 2017. Pour tenter de combler ce fossé, il était utile d'aller voir ce qui motive les nouveaux entrepreneurs.

D'emblée, soulignons que jamais on n'aura autant entendu parler du concept d'impact social des entreprises que depuis deux ans : ici et là, des jeunes se regroupent pour créer des entreprises ayant un impact environnemental positif ; ailleurs, des travailleurs souhaitent reprendre l'entreprise qui les embauche pour éviter une fermeture et assurer leurs emplois ; des artistes réinventent leurs modèles d'affaires en culture et intègrent à leurs projets une dynamique plus entrepreneuriale afin de vivre de leur art ; d'autres collectivités revalorisent un patrimoine sous-utilisé. On réinvente les modèles jusqu'à redéfinir les objectifs même de la création d'entreprises.

Au-delà de la mécanique traditionnelle de création de richesse s'appuyant sur la mise en marché d'un produit ou d'un service, ce qui a capté mon attention partout au Québec, c'est cette volonté de plus en plus forte d'innover dans la forme et les buts poursuivis par l'entreprise. Les collectivités visent à se doter d'entreprises ancrées dans leur région et dont les retombées économiques seront directes et locales. Fini le ruissellement hypothétique, les citoyens se mobilisent et se regroupent pour développer des solutions qui leur rapporteront des bénéfices collectifs, valoriseront leurs ressources naturelles, procureront de bons emplois et assureront ainsi la vitalité durable de leur territoire.

Sur les campus, nombre d'étudiants universitaires et collégiaux sont avides de modèles différents. Plutôt que de chercher d'abord à s'enrichir personnellement pour ensuite devenir philanthropes, ils cherchent d'entrée de jeu des projets conjuguant leurs objectifs professionnels, sociaux et environnementaux. L'impact immédiat qu'ils ont autour d'eux prend le dessus sur l'accumulation comme façon de se réaliser. Ils cherchent aussi à partager le leadership au sein de l'entreprise et souhaitent tirer profit de mobilisations collectives plutôt qu'individuelles. En réponse à cette réalité, plusieurs cursus scolaires évoluent et intègrent de plus en plus de modèles économiques et organisationnels autrefois absents.

Un peu partout, des initiatives surgissent également qui appuient l'innovation sociale autant que technologique. Laboratoires, incubateurs et autres FabLabs, les organisations proposant une démarche intégrée de l'innovation au sens large se multiplient et la frontière entre le social et la technologie s'efface pour laisser réellement place à la créativité des nouveaux entrepreneurs.

Devant les nouvelles technologies et les enjeux sociaux qu'elles induisent - ne pensons qu'à l'intelligence artificielle -, la nécessité de soutenir une nouvelle logique économique ne pourra que croître. Une chose semble claire dans toutes les régions du Québec : le potentiel de l'entrepreneuriat au service du collectif est indéniable et la soif des entrepreneurs pour un autre modèle de développement est manifeste. Les collaborations se multiplient entre les élus, les acteurs économiques et la société civile. Discrètement mais sûrement, l'économie québécoise sort des sentiers battus pour faire face à deux des principaux enjeux contemporains que sont les inégalités socioéconomiques et les défis environnementaux.

Sans surprise, ce sont les sources de financement qui évoluent plus lentement. Trop souvent séduites par une rentabilité rapide et strictement économique, plusieurs grandes institutions financières sont encore à la traîne devant la migration inévitable de l'économique vers le socioéconomique. Certes, de nouvelles avenues s'ouvrent allant de l'investissement d'impact au financement participatif, en passant par les obligations communautaires. Mais pour pouvoir passer plus systématiquement de l'intention d'entreprendre à l'action, il faudra plus. Les banques ne devraient surtout pas oublier que ces nouvelles façons d'entreprendre représentent un marché d'avenir.

L'économie du Québec se responsabilise et se démocratise. S'il y eut à d'autres époques les tigres asiatiques et leur cousin celtique, la nouvelle donne indique que le modèle québécois pourrait lui aussi faire école, mais pour les bonnes raisons!

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