Il faut ranimer la confiance

Publié le 01/02/2009 à 00:00

Il faut ranimer la confiance

Publié le 01/02/2009 à 00:00

Je suis convaincu que l'économie peut être un facteur de justice sociale. Mais la création de richesse ne suffit pas si la richesse créée est captée par quelques-uns au détriment du plus grand nombre. Il existe un concept nommé " juste profit " qui permet de concilier à la fois les soucis des actionnaires et ceux des employés, des membres des collectivités, des clients et de l'environnement général de l'entreprise. Et je crois que nous pouvons tous, à notre manière, faire une différence et rendre le monde des affaires meilleur, plus moral et plus éthique. C'est pourquoi, en 1998, j'ai fondé l'Institut québécois d'éthique appliquée, après un parcours de quinze ans dans le monde des affaires et des études en administration et en philosophie. Et c'est aussi pourquoi j'ai accepté de rédiger cette chronique tous les mois.

Tous les jours, les PDG prennent des décisions capitales pour la société. Chaque fois, ils font bien plus que choisir entre l'option A et l'option B : ils hiérarchisent leurs valeurs personnelles et celles de l'organisation. Certaines options valent pourtant mieux que d'autres sur le plan moral. Cependant, c'est rarement une préoccupation. La décision prise est souvent celle qui maximise la valeur à court terme de l'entreprise. Le souci du profit à court terme n'est pourtant pas le seul indicateur valable et il n'est certainement pas l'indicateur du degré d'éthique d'une entreprise.

En ce début d'année 2009, c'est l'impensable fraude pyramidale du financier Bernard Madoff qui retient l'attention et qui porte les gens d'affaires à parler d'éthique ou de manque d'éthique. Cette fraude nous ramène à une dure réalité : pour pouvoir fonctionner, le marché a besoin de confiance. Les nombreux scandales financiers survenus au cours des dernières années ont contribué à détruire l'exercice de cette confiance ou à le rendre difficile. Sans confiance, le marché ne peut fonctionner ; sans confiance, les entreprises ne peuvent conduire leurs affaires. L'année dernière, tout au long du procès Norbourg, plusieurs PDG m'ont demandé si je croyais que les sommes disparues seraient remboursées ou devraient l'être. À cette question, force est d'admettre que sur le plan de l'éthique et de la conduite des affaires, le dommage causé par la perte de confiance chez les investisseurs représente un coût bien plus grand que n'importe quelle amende ou n'importe quel remboursement.

Les lois, les règles ou les règlements visent, en aval, à punir les coupables. En amont, l'éthique commande plutôt que le geste déviant ne soit pas commis, évitant ainsi la perte de confiance envers l'entreprise. L'éthique vise à agir correctement. Elle empêche les comportements déviants en inspirant aux décideurs une vision moralement positive de la gestion des organisations. Une telle organisation, en inspirant la confiance, réduit ses coûts de transaction et de conduite de ses affaires. Ce qui est un argument considérable aux yeux d'un PDG.

Au fil des mois, je vous entretiendrai des bénéfices d'une gestion éthique pour les entreprises. Je proposerai aussi un éclairage sur des problématiques concrètes afin d'éviter les pièges d'une gestion non éthique. Que faire face à un dirigeant qui prend des décisions qui, tout en étant légales, sont injustes ? Et si l'on fait des affaires à l'étranger, doit-on se conformer aux " coutumes " du pays et offrir des pots-de-vin ?

L'éthique a longtemps été considérée comme une manière de clore un débat. Je vous propose plutôt de la voir comme une occasion de le relancer. Que pouvons-nous faire pour rendre plus juste la conduite des affaires, et ainsi augmenter la confiance nécessaire au bon fonctionnement du marché ? Et pour faire en sorte que les termes respect et intégrité ne soient pas que des mots sur la première page du rapport annuel ou du plan stratégique ?

René Villemure est éthicien. Il est aussi le fondateur de l'Institut québécois d'éthique appliquée. Il conseille les dirigeants des grandes sociétés publiques et privées en matière de gestion éthique et de gouvernance éthique.

rene.villemure@ethique.net

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